Stratégie

L'Armée part à l'assaut de l'IA

L'Armée part à l'assaut de l'IA
Pour le général Laurent Boïté, DSI des Armées (ici au Dataiku Summit), l'IA et le numérique en général sont la clé de l'indispensable accélération face à la situation géopolitique actuelle. (Photo : ED)

Pour accélérer face à la situation géopolitique et aux progrès des autres pays, l'Armée française mise sur l'IA. Au combat, pour augmenter équipements et militaires, mais aussi en base arrière.

PublicitéÀ l'occasion du Dataiku Summit à Paris le 24 septembre, le général Laurent Boïté, DSI des Armées françaises, a passé en revue le rôle de la data et de l'IA pour accélérer face à la situation géopolitique, et face aux progrès d'autres pays. « Avant, nous choisissions nos crises, en quelque sorte. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas », rassure-t-il dès le début de son intervention, évoquant l'impact des bouleversements internationaux de ces dernières années sur la France et son armée. « Cette situation est plutôt nouvelle pour nous, et nous devons nous adapter en permanence. Et je suis persuadé que c'est la dorsale numérique qui nous permettra de l'emporter face à nos futurs adversaires. Parce que le numérique, l'IA en particulier, sont les choix qui nous permettront d'accélérer ». Une conviction qui concerne aussi bien les opérations de combat que celles des bases arrière.

Sur le terrain, la data et l'IA sont des instruments désormais indispensables pour augmenter autant les matériels que les militaires. La notion d'augmentation des matériels prenant une place essentielle dans les conflits. « L'Ukraine massifie la robotique, explique par exemple Laurent Boïté. Ils produisent déjà près de 1,5 million de drones par an. Reste que ce sont des mitrailleuses "à l'ancienne" qui abattent les drones [ennemis] ». Des armes à l'ancienne certes, mais augmentées avec des dispositifs acoustiques et du machine learning, par exemple, pour détecter l'origine de la menace.

Data et IA au combat

L'Armée française augmente donc elle aussi ses équipements avec de l'IA. « Nous avons de toute évidence des chars, des avions, des navires, poursuit le général. Et ils ont une durée de vie de 30 à 40 ans. Or, les Rafale ou les Frégate sont déjà devenus d'énormes fusions de data, avec des processus très automatisés pour traiter les menaces. Quant aux Mirage, la génération précédant les Rafale, eux, ils sont recodés ». Le général Boïté évoque même un projet déjà testé dans des appareils suédois. Un pilote virtuel entrainé sur un simulateur réalise des centaines de milliards de vols « en accéléré » et gagne tous ses combats aériens. Son modèle est ensuite injecté dans un avion réel pour augmenter le pilote humain et affronter d'autres appareils réels. « C'est un outil très intéressant pour des armées dans lesquelles les pilotes sont moins bien formés, moins expérimentés que dans la nôtre, par exemple ».

Pour la base arrière, Laurent Boïté explique que les enjeux sont finalement assez similaires à l'industrie, avec des besoins liés à la maintenance, à la logistique, etc. « Les outils disponibles pour le privé sont tout à fait adaptés pour nous également. Nous avons, par exemple, des jumeaux numériques pour la maintenance prédictive. » Enfin, le général rappelle que, pour une administration, des outils comme l'IA sont aussi destinés à gagner du temps, à rendre les équipes plus productives, ce qui permettrait éventuellement de réaffecter certains effectifs dans des secteurs liés au combat qui ont davantage besoin de ressources.

PublicitéZero trust et cybersécurité data centric

Sans surprise, l'Armée est particulièrement sensible à sa cybersécurité, et doit l'être encore davantage avec le développement de la data et de l'IA dans ses systèmes. Avec une préférence pour la sécurité de type « aéroport » avec des vérifications en permanence, comme l'explique Laurent Boïté, plutôt qu'une sécurité de type « château fort », avec laquelle, une fois entrés, les pirates ont potentiellement accès à tout. « Nous avons donc fait le choix du zero trust, et nous passons sur du data centric plutôt que du network centric. Autrement dit, la data est désormais au coeur de tout ce que nous faisons, et nous ne la rendons accessible qu'à ceux qui en ont réellement besoin ».

« L'accélération technologique a principalement lieu dans le privé, constate néanmoins Laurent Boïté, avec des budgets colossaux chez les Gafam, par exemple. Nous n'avons pas ce type de moyens et nous essayons donc de nous appuyer de plus en plus sur la base numérique extérieure. J'aimerais beaucoup m'appuyer sur toutes les pépites que nous avons en France ». Mais le général cite également les nouveaux dispositifs à disposition de l'Armée au sein du ministère, et qu'il considère comme des « outils extraordinaires ». À commencer par l'Agence ministérielle pour l'intelligence artificielle de Défense, l'Amiad, qui « travaille sur toute la verticale, du matériel au logiciel », et le Commissariat au numérique de Défense. Fraichement créé, en août dernier, ce dernier dispose aussi d'une Fabrique numérique interne au ministère des Armées, un incubateur de services numériques. Enfin, « si le sport est une religion, le numérique doit aussi devenir une religion », conclut Laurent Boïté. Autrement dit, tous les militaires doivent désormais avoir une culture numérique.

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