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Comment l'ESCP développe son approche phygitale avec une Phygital Factory

Comment l'ESCP développe son approche phygitale avec une Phygital Factory
Anthony Hié, directeur de la transformation digitale de l’ESCP, présente ici la Phygital Factory de l’ESCP.

Inaugurée le 14 avril 2021, la Phygital Factory de l'ESCP Business School marque une étape majeure du programme So'School de transformation phygitale de l'école de commerce. Anthony Hié, directeur de la transformation digitale, détaille le plan déployé et comment il a aidé à un passage en relatif bon ordre de la crise sanitaire.

PublicitéL'institution n'est pas récente : fondée en 1819, l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP, utilisant aujourd'hui la marque ESCP Business School) est considérée comme la plus ancienne des écoles de commerce au monde au sens actuel du terme. Outre ses deux campus parisiens (le site historique près du cimetière du Père Lachaise et l'ancien site de l'Ecole Européenne des Affaires), l'ESCP dispose de campus à Berlin, Madrid, Varsovie, Turin et Londres. Si le classement est soumis à de nombreuses variations, l'ESCP fait systématiquement partie du trio de tête des écoles de commerce françaises (avec l'ESSEC et HEC) et était sixième au niveau mondial en 2020 selon le Financial Times. Dans un marché mondial de la formation extrêmement concurrentiel, l'ESCP a pris le parti de miser sur l'innovation. Sur la période 2019-2022, l'école a lancé un programme de transformation phygitale baptisé « So'School ». Celui-ci a déjà permis de bien amoindrir l'impact de la crise sanitaire sur les enseignements et vient de voir une nouvelle étape franchie avec une inauguration (assez symbolique) d'une « Phygital Factory » le 14 avril 2021.

So'School est un programme comprenant 47 projets de transformation selon quatre grands axes comme l'avait déjà présenté Anthony Hié, directeur de la transformation digitale de l'ESCP. La « Phygital Factory » constitue le premier de la liste. Le deuxième est la création d'un « jumeau numérique » de l'école sur la plateforme Hubs de la Fondation Mozilla avec, en sus, le développement de projets autour de la réalité virtuelle à des fins pédagogiques. Bien entendu, une digital workplace (Sowego) est au menu, en l'occurrence basée sur la plateforme Jalios, associant de la collaboration, un intra/extranet, une SSO et, à terme, l'intégration du e-learning (plus exactement du « digital learning », nous allons y revenir). Enfin, l'ESCP s'est aussi dotée d'une plate-forme d'open-innovation (Openeo). « Notre premier objectif est d'améliorer l'expérience étudiant mais aussi l'expérience des enseignants comme du personnel » insiste Anthony Hié. Il précise : « je travaille en tandem avec José Ramon Cobo, le doyen associé en charge de l'innovation pédagogique. »


La 'Phygital Factory' se situe à l'entrée du bâtiment principal de l'école afin que chacun passe devant en entrant ou en sortant.

Inaugurée le 14 avril 2021, la « Phygital Factory » se situe à l'entrée du bâtiment principal de l'école. Anthony Hié précise : « cet emplacement n'a pas été choisi au hasard car, ainsi, les étudiants comme les enseignants et intervenants passent devant aussi bien en entrant qu'en sortant. Beaucoup viennent voir ce que c'est, par curiosité, même avant l'inauguration officielle. » Cette inauguration a été, il est vrai, repoussée à cause de la crise sanitaire. Mais ce petit laboratoire d'innovation est opérationnel depuis plusieurs mois. L'idée est clairement d'amener à co-construire (à commencer par les innovations pédagogiques mais pas seulement), à innover, à développer la culture digitale. A terme, des installations similaires vont être déployées sur les autres campus.

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La totalité de l'ESCP, y compris ici la 'Phygital Factory', a été virtualisée sur la plateforme Hubs de la Fondation Mozilla.

Des innovations présentées par des start-ups peuvent y être manipulées pour de vrai. Anthony Hié insiste : « les gens viennent ici pour toucher du doigt, matérialiser, voir les liens, tester les outils. Dans une digital factory, tout reste très virtuel et les gens ont souvent du mal à comprendre en quoi tout cela est bien concret. » Mais toucher du doigt n'est pas le seul objet de cet endroit qui n'occupe qu'une assez faible surface composée de trois pièces. Etudiants et enseignants peuvent aussi s'initier à la manipulation d'outils numériques performants, notamment en réalité virtuelle ou en digital interactif. La Phygital Factory repose sur les trois principes habituels des « factories » : « design, make, share » (concevoir, fabriquer, partager).


La première salle permet aux étudiants et enseignants de découvrir des outils innovants en démonstration.

En réalité virtuelle, on peut se promener dans le jumeau numérique de la phygital factory « physique », ce n'est pas un campus virtuel mais plus un lieu de co-création et de co-working virtuel avec les étudiants. On peut y rencontrer les avatars des autres visiteurs pour échanger avec eux. L'intérêt peut sembler mineur mais il n'en est rien. En effet, ce campus est accessible, par Internet notamment, pour des étudiants ou des enseignants à domicile partout dans le monde ou bien présents sur les autres campus. Au delà de l'effet waouh, il s'agit bien d'abolir les distances et de permettre la collaboration en temps réel avec tous les membres de la communauté ESCP, où qu'ils soient. L'intégration se poursuit et, en particulier, les écrans d'informations affichés dans l'école devraient apparaître bientôt en temps réel dans le jumeau numérique à la même place.


La deuxième salle permet de découvrir la réalité virtuelle.

Si on peut utiliser un navigateur et un écran ordinaire pour circuler dans le jumeau numérique de l'ESCP, on peut aussi utiliser des casques de réalité virtuelle. Dans ce cas, la circulation est bien sûr en 3D. De la même façon, les rencontres effectuées se font via les avatars configurés par chacun lors de sa connexion. La réalité virtuelle est le sujet de la deuxième salle de la « Phygital Factory ».


Parmi les exercices proposés, l'ESCP a mis en place un entraînement à la prise de parole en public devant des amphithéâtres remplis d'un public réaliste.

Au delà d'une simple interface de communication, la réalité virtuelle est aussi un moyen d'entraînement. Il existe ainsi la possibilité d'apprendre à prendre la parole en public devant un amphithéâtre de plusieurs milliers de personnes. L'environnement est totalement virtuel mais très réaliste, y compris dans les réactions du public, afin de rendre l'expérience pertinente.


La troisième et dernière salle de la 'Phygital Factory' permet de créer des contenus digitaux aussi bien par les étudiants que par les enseignants.

Enfin, en matière de « make », la troisième salle permet de créer des contenus digitaux grâce à la plateforme tout-en-un de RapidMooC. Elle peut être utilisée autant par les étudiants devant réaliser des présentations que par les enseignants ou la direction de l'école. Mais la crise sanitaire n'a-t-elle pas montré que la vidéoconférence ne posait plus de problème, y compris pour donner des cours ? Cette remarque fait sourire Anthony Hié. Pour lui, « un cours en visioconférence n'est pas un contenu digital. » Il s'agit en effet de cultiver les contenus eux-mêmes mais aussi les interactions possibles. Il doit être possible d'engager les étudiants dans un cursus digital avec des pédagogies plus actives.


Les étudiants ne sont pas les seuls utilisateurs, enseignants et direction peuvent aussi utiliser la phygital factory pour créer des contenus.

Anthony Hié précise l'approche : « OpenClassRoom ou Linkedin Learning, par exemples, sont des pure players de l'enseignement 100% en ligne. Notre singularité est notre ADN : nous comptons sur le phygital, c'est à dire l'association du physique et du virtuel, pour créer une expérience sans couture. L'approche visée pour le développement du digital est le 20/40 : 20 % minimum en digital, 40 % minimum en présentiel, le solde constituant un espace de liberté supplémentaire pour les professeurs qui souhaitent produire plus de digital. Actuellement, notre marge de progression reste importante sur le digital, il faut noter qu'un cours en visioconférence qui n'exige pas de scénarisation accrue au niveau digital ne contribue pas à ces indicateurs. »


Les salles de cours magistraux sont équipées pour permettre de dispenser des enseignements simultanément en présentiel et en distanciel, notamment grâce à une dalle d'enregistrement sonore au plafond permettant une captation spatiale du son de toute personne présente, sans aucun micro individuel.

Le phygital, donc, est hybride, par définition. En 2018, trois salles de cours magistraux ont été équipées à titre expérimental pour permettre un enseignement phygital, abolissant toute différence entre présentiel et distanciel. Parmi les innovations qui font la différence, la sonorisation spatiale est un élément important : personne n'a besoin de micro individuel pour s'exprimer sur place, qu'il s'agisse de l'enseignant ou des étudiants posant des questions. Avant la crise sanitaire, les cinquante salles principales (sur quatre-vingt salles en tout, le solde étant plutôt dédié aux travaux en petits groupes) ont été équipées de la même façon.


Les enseignants peuvent intervenir en hybride : être présents dans la salle et intervenir autant pour des étudiants présents physiquement que pour d'autres en distanciel.

Comme disait Louis Pasteur, « le hasard ne sourit qu'aux esprits bien préparés ». La survenue de la crise sanitaire a évidemment, à cause des confinements, perturbé profondément le fonctionnement de toutes les écoles et universités. Mais, à l'ESCP, les enseignements ont pu se poursuivre, le présentiel étant limité en fonction des jauges posées par le gouvernement. « Alors que s'amorce la fin de crise, le phygital s'impose comme une évidence, associant un retour du physique au maintien du numérique » se réjouit Anthony Hié. Ce mot de « phygital », emprunté à la distribution, s'applique bien à l'enseignement. Et il a un aspect intéressant en termes de conduite du changment, c'est son côté passage progressif du physique traditionnel au numérique innovant. Le professeur n'est pas dématérialisé, il est bien présent, mais il peut s'appuyer sur le numérique pour augmenter son enseignement.

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