Stratégie

Pascal Wronski, DSI de Saint Maclou : « On doit créer de la valeur par la relation humaine »

Pascal Wronski, DSI de Saint Maclou : « On doit créer de la valeur par la relation humaine »
Pascal Wronski (Saint Maclou) : « Après la DSI partenaire des métiers, l'enjeu est désormais de soutenir l’entreprise dans son développement. »

Pilotant depuis 2011 la direction de l'organisation et des systèmes d'information de Saint Maclou, Pascal Wronski a engagé un vaste plan d'adaptation de la DSI pour répondre aux nouveaux enjeux métiers et de transformation digitale. Nos confrères de LMI ont fait le point avec le dirigeant.

PublicitéLMI : Comment avez-vous été amené à rejoindre Saint Maclou et comment la DSI était-elle à l'époque ?

Pascal Wronski : J'ai rejoint Saint Maclou il y a un peu plus de 8 ans maintenant pour une fonction de DSI, même si aujourd'hui la fonction a évolué puisque l'on est passé à une DOSI. En arrivant fin 2011, la DSI était très peu connectée avec les métiers, un peu repliés sur eux-mêmes. Les métiers avaient délégué le SI à la DSI, ce qui arrangeait pas mal de monde. La DSI était donc très technique. Le challenge que nous avons souhaité porter en mettant en place ce projet de transformation était de mettre en place une DSI business partner, beaucoup plus proche des métiers et plus lisible pour elles, et donner ou redonner le pouvoir du système d'information aux métiers. Nous avons arrêté les projets qui démarraient sans sponsor métier. Il a fallu prendre des positions assez fermes, avec l'appui de la direction générale bien entendu. Nous avons nommé des interlocuteurs privilégiés pour chaque direction métier, en créant des fonctions qui n'existaient pas au sein de la DSI, comme des responsables de domaines métier (qui n'existaient pas à l'époque) et des profils avec une double compétence 60% métier et 40% IT, en capacité de challenger le métier, d'expliquer pourquoi on ne fait pas et comment on fait autrement.

Cette organisation a été le point de départ de nouveaux projets : lesquels ? Où en êtes-vous aujourd'hui ?

Je reviens quelques années en arrière... Le système d'information d'il y a 6 ans était un SI complètement spécifique, reposant sur un AS400, qui avait en moyenne une trentaine d'années. Notre projet était de remettre à plat tout le SI en commençant par les fondations en termes d'infrastructure d'entreprise, c'est-à-dire poser les processus niveau back office avec la mise en place d'un ERP Dynamics. Celui-ci se prêtait assez bien à notre business et au métier de service de pose, avec 400 salariés-poseurs. Cela nous a demandé au total 4 ans de projet, sans parler de la phase amont d'étude. Nous avons tout rasé et tout reconstruit.

D'autres projets se sont greffés pour apporter cette couche transformation digitale avec les magasins connectés, omnicanal et d'un changement de paradigme de Saint Maclou d'un point de vue technologique ?

En effet. Quand vous passez d'un monde AS400 à un ERP, avec ce que tout cela peut engendrer en termes de changement, les enjeux sont technologique, mais seulement. Il faut essentiellement gérer dans ce type de projet des changements humains et d'état d'esprit à tous niveaux, IT, métier et top management. Partir de ce socle était important. Comme je disais à l'époque, on imagine mal construire une maison en commençant par le toit. Parler de transformation digitale sur un socle SI qui était peu fiable, avec des gros trous dans la raquette, cela n'était pas envisageable.

PublicitéDes choix technologiques qui vous ont peut-être conduit vers la virtualisation, la conteneurisation aujourd'hui...

Nous avons aussi dans le cadre de ce projet externalisé notre datacenter. Cela a été un choix important, qui ne signifie pas que j'évacue le sujet. La technologie reste un sujet important, mais la DSI n'est pas un simple outilleur, c'est aussi un apporteur d'affaires. Par exemple, deux projets métiers ont été initialisés par la DSI. Le premier portait sur la mobilité : nous avons équipé nos vendeurs d'une tablette pour aller chez le client. Un autre concernait le CRM opérationnel, avec la mise en place d'un référentiel client unique et d'un outil développé en interne pour être le plus accessible possible aux conseillers de vente, alors peu technophiles, et de les aider à capter de l'information client, la qualifier avec une vue 360, gérer tous les points de contacts... Aujourd'hui, la deuxième étape de ce projet est l'omnicanalité.

Cette omnicalité passe aussi par la transformation du magasin, web et, mais aussi physique comme la démonstration avec le magasin de Nation, peut-on en savoir un peu plus là-dessus ?

Pour le web, concrètement nous remettons à plat notre plateforme en passant d'un socle Magento à une architecture APIsée avec différentes solutions. C'est un travail qui a abouti en mars 2020. Ce site a pour vocation à devenir marchand. Nous avons aussi un projet sur la data car aujourd'hui subsiste une méconnaissance de nos clients. Ceux qui font un achat ou un projet en magasin sont connus, mais ce n'est pas le cas des plus de 7 millions de visiteurs qui viennent sur notre site. Nous travaillons avec une agence pour capter toute l'information sur ces clients potentiels et nous donner des éléments pour faire du précision marketing. Nous partons du principe que celle-ci va nous apprendre des choses, et à moment donné, il est prévu qu'elle nous passe la main. La DSI apporte l'accès à la donnée des SI, son savoir-faire en termes de BI sans aller jusqu'au datalake et big data, mais nous avons une volonté d'apprendre avec cette agence, en travaillant sur des cas d'usage.

Et concernant le magasin du futur ?

Il est à Paris Nation. Il a pour objectif, réussi, d'embarquer toute l'offre produits et services de Saint Maclou sur 150 m2, là où l'offre habituelle est sur 1 500/2 000 m2. C'est un magasin showroom, sans stock, avec une part de digital au travers de la table tactile qui permet d'associer plus de 6 000 produits à des codes RFID, des ambiances de pièces pour mettre le client dans son environnement et pouvoir imaginer son sol, son mur dans cet environnement. Nous avons voulu aussi quelque chose d'équilibré en termes de digital. Nous sommes convaincus que la singularité de Saint Maclou c'est l'humain, le conseiller-vendeur. C'est une solution digitale, équilibrée et utile pour le client et le conseiller. L'idée n'est pas de mettre des écrans partout, mais des solutions digitales qui facilitent la vie du vendeur et donnent quelque chose de concret aux clients. Notre vocation chez Saint Maclou est de devenir un acteur, sinon le leader en France de la décoration personnalisée par la relation. Pour cela, il nous faut créer de la valeur par la relation humaine.

En termes de socle technologique, quelle a été votre réflexion ?

La plateforme web que nous mettons en place inclut du cloud public AWS. Nous n'avons pas prévu de remplacer notre ERP dans l'immédiat, mais plutôt de le faire évoluer. Aujourd'hui nous avons ce socle. L'enjeu est désormais de construire une plateforme globale, ouverte, articulée par des API et des microservices. Nous sommes en train d'APIser notre SI, notamment en mettant une couche d'API management. La DSI doit évoluer, avec l'émergence du cloud, du SaaS. Il faut aller chercher ces solutions, ces start-ups qui se développent de plus en plus avec des services, car la DSI aura de moins en moins vocation à développer. Dans le cadre du projet web, nous utilisons des microservices fournis par des start-ups. Nous voulons mettre en place une plateforme globale articulée par ces API. Le DSI a un rôle majeur pour identifier ces start-ups en amont et les intégrer au SI.

Comment avez-vous mesuré la maturité et l'adhésion des utilisateurs ?

Nous avons eu de la chance. Ce projet de refonte du système d'information était demandé par tout le monde. En arrivant, je me rappelle qu'on me demandait : on y va quand ? Aujourd'hui il y a eu une évolution importante, des changements d'organisation, des nouvelles compétences qui sont arrivées au siège dans les équipes magasin on a mis en place Facebook Workplace en interne... Il y a eu un gros travail dans le chantier, du change par la DRH avec un fort développement et investissement sur la formation, la sensibilisation et expliquer le sens de tout cela.

Sur la base de votre expérience, quel conseil donneriez-vous pour faire du DSI un apporteur de valeur ?

L'enjeu c'est de passer à une DSI 3.0. Nous sommes passés de la DSI vue comme un centre de coûts à une DSI business partner, maintenant l'enjeu c'est d'aller vers une DSI business developper. Il faut être connecté avec les métiers, voire s'intégrer à eux, et même avoir un coup d'avance sur eux. Dans cette optique, il faut prendre le leadership sur ces actions de transformation digitale et devenir en quelque sorte un incubateur des innovations technologiques.

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