Stratégie

Open Data dans l'énergie : l'autre exception française

Open Data dans l'énergie : l'autre exception française
L’Agence ORE publie 218 jeux de données (ici le maillage des réseaux énergétiques sur le territoire), dont 51 découlant strictement d’une contrainte réglementaire.

La loi française impose aux distributeurs de gaz et d'électricité de partager un certain nombre de données en Open Data. Un cas unique en Europe qui a donné naissance à une structure dédiée, l'Agence ORE.

PublicitéSix ans après la création de l'Agence ORE (pour Opérateur de Réseau d'Energie), l'initiative reste unique en Europe, comme les responsables de cette association ont pu le constater en décembre dernier lors de l'Energy Data Summit, un événement organisé à Bruxelles par l'éditeur français Opendatasoft et réunissant des spécialistes de la donnée énergétique. Créée dans le cadre de la loi pour une République numérique de 2018, cette association loi 1901 a pour vocation de partager en Open Data les données de 128 gestionnaires de réseaux de distribution de gaz ou d'électricité en France (on parle de GRD). « Nous avons deux missions essentielles : mettre à disposition des distributeurs les outils leur permettant de répondre aux enjeux réglementaires et publier les données concernées par cette réglementation en Open Data », résume Yves Fouquet, le directeur de l'agence ORE, structure financée par ses membres (à hauteur du nombre de points de livraison qu'ils desservent) et dotée d'un budget d'environ 2 M€.

Aujourd'hui, 218 jeux de données sont ainsi mis à la disposition de tous. « Nous ne savons pas qui les utilise. Nous savons simplement que les territoires - régions, communes, communautés d'agglomérations... - sont friands de ces informations pour les aider dans la mise en place de leurs politiques publiques », commente Yves Fouquet. Même si les jeux de données en Open Data peuvent aussi intéresser des profils plus inattendus, comme l'association des pêcheurs à la ligne ou celle de vol à voile, intéressées par le positionnement des lignes électriques aériennes.

Au mieux, au niveau de la maille Iris

« L'énergie est un secteur très compartimenté, un contexte qu'on ne retrouve pas forcément ailleurs. Le besoin d'échange de données en temps réel entre les acteurs y est donc important. Par ailleurs, si on se concentre sur les transporteurs et distributeurs, on est face à un marché moins concurrentiel, favorisant la mise en oeuvre de logiques de partage de la donnée », analyse Jean-Marc Lazard, le Pdg d'Opendatasoft qui fournit la plateforme qu'exploite l'Agence ORE pour diffuser ses jeux de données.


Yves Fouquet, directeur de l'agence ORE, une structure financée par 128 gestionnaires de réseaux de distribution de gaz ou d'électricité en France. (Photo : D.R.)

Notons toutefois que les publications de la structure concernent de la donnée froide et agrégée, autrement dit insuffisamment précise pour effectuer des optimisations à l'échelle d'un logement par exemple. Les données des compteurs communicants Linky (électricité) et Gazpar (gaz) ne sont ainsi évidemment pas disponibles. « Dans nos jeux de données, le niveau d'agrégation le plus fin dont nous disposons se situe au niveau de la maille Iris », précise le directeur de l'Agence. Développée par l'Insee, cette structuration découpe le territoire de la France en îlots d'environ 2 000 personnes (la France compte près de 17 000 mailles Iris).

PublicitéDépasser l'Open Data ?

Si l'Agence ORE résulte avant tout de la législation, elle l'a aujourd'hui largement dépassé, 51 des 218 jeux de données actuellement disponibles seulement découlant d'une contrainte réglementaire. « Notre principe, c'est de permettre à tous les distributeurs d'énergie de publier des informations d'intérêt sur un outil commun », résume Yves Fouquet. Par exemple, on y retrouve ainsi les postes source (les transformateurs) ou des agrégats de consommation à des mailles différentes de celles décrites dans la réglementation. Au-delà de l'exercice imposé par la loi, l'agence ORE apparaît désormais comme une forme de mutualisation de l'outillage, ici la solution Opendatasoft. « C'est une façon de partager la licence de cet outil », observe Yves Fouquet. Pour ce dernier, le choix de cette solution s'est imposé assez naturellement, Enedis (qui avait ouvert très tôt des jeux de données sur sa plateforme propre, data.enedis.fr), GRDF et SRD étant déjà des utilisateurs de la technologie. « L'architecture que nous avons mis en place permet aux GRD de travailler avec un seul contrat ou plusieurs, avec une continuité technique », indique le directeur de l'agence ORE.

Les jeux de données actuellement disponibles sur le site de l'agence sont en accès gratuit. « Mais la question du dépassement éventuel du cadre de l'Open Data se pose régulièrement », reconnaît Yves Fouquet. Pour ce dernier, si les GRD conservent des jeux de données qui sont au coeur de leur relation client, le législateur et la CRE (Commission de régulation de l'énergie) seraient favorables à ce que l'Agence ORE descende au niveau de la maille adresse. Avec un accès aux données qui se ferait alors après authentification. « Mais, aujourd'hui, les distributeurs n'y sont pas prêts », reconnaît Yves Fouquet

Ce dernier indique que des réflexions sont également menées au sein de l'agence pour s'ouvrir à d'autres typologies d'acteurs du monde de l'énergie (réseaux de chaleurs, transporteurs). Notons d'ailleurs que de premiers jeux de données publiées par ORE témoignent de cette volonté d'ouverture, comme celui relatif aux voitures immatriculées par commune et par type de recharge (venant de la société AAA Data) et celui portant sur les stations GNV publiques en France provenant de l'AFGNV (Association française du gaz naturel véhicules). De premiers pas sur le créneau des nouvelles mobilités, sur lequel la société Gireve, spécialisée sur l'intermédiation dans ce domaine au niveau européen, dispose de plusieurs longueurs d'avance.

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