Microsoft contre le « kill switch » de Trump : SAP aujourd'hui, Bleu demain ?
Via son cloud dit souverain Delos, SAP pourra assurer une continuité de services pour les organisations européennes exploitant Azure et privées de ces services du fait de sanctions américaines. En France, Bleu examine la mise en oeuvre du même mécanisme.
PublicitéAprès le coffre-fort suisse pour stocker ses codes source hors de portée de l'administration américaine, piste évoquée par Microsoft sans plus de détails pratiques à ce stade, le premier éditeur mondial signe un accord avec SAP pour protéger les entreprises et administrations européennes des effets d'éventuelles sanctions d'Etats non européens. Comprendre, même si cela n'est pas précisé, des sanctions américaines qui viseraient une entité du Vieux Continent.
Dans le cadre du sommet franco-allemand sur la souveraineté numérique du 18 novembre, Delos Cloud, filiale de l'éditeur allemand qui construit une offre progicielle dite souveraine sur base Azure, a en effet annoncé avoir signé un protocole d'accord avec Microsoft. Ce MoU (Memorandum of Understanding) donne à Delos les « capacités techniques et légales » de maintenir les services cloud Azure d'une entreprise ou d'une administration européenne, même si un gouvernement étranger restreint l'usage des services Microsoft pour cette entité. En clair, la garantie d'une forme de continuité de service en cas de sanctions de l'administration Trump.
Réponse aux sanctions contre la Cour pénale internationale
Dans un communiqué, SAP précise que cet accord permet à des clients Microsoft touchés par les conséquences numériques de sanctions d'un gouvernement étranger de migrer leurs applications vers Delos Cloud. L'éditeur germanique ajoute que, par ce partenariat, il acquiert le droit « d'accéder et d'utiliser le code logiciel du cloud Microsoft », qui serait alors nécessaire dans ce type de situation de crise. Pour Delos, il s'agit donc à la fois d'une extension de la clientèle qu'elle est susceptible d'héberger (la filiale de SAP étant à l'origine un cloud de confiance Azure bâti uniquement pour le secteur public allemand) et d'un approfondissement des relations techniques avec Redmond, via un accès au code source lui permettant de conserver les moyens de fournir des services Azure aux entités sous sanctions. Notons qu'il s'agit à ce stade d'un simple protocole d'accord, Microsoft et SAP se donnant 6 mois pour concrétiser l'offre de repli sur Delos.
Prolongeant l'engagement de Microsoft de s'opposer légalement à toute injonction d'un gouvernement qui l'obligerait à interrompre ses services cloud destinés aux clients du secteur public européen, l'accord avec SAP vise à apporter une première réponse aux conséquences pratiques des sanctions américaines. Rappelons que celles-ci ont récemment ciblé plusieurs officiels de la Cour pénale internationale de La Haye, dont son procureur Karim Khan mais aussi le juge français Nicolas Guillou, les privant notamment d'accès aux services numériques de Microsoft (et de toute autre fournisseur américain). Concernant la première vague de sanctions ayant frappé Karim Khan, Microsoft a nié être directement à l'origine de l'interruption de ses services, se refusant toutefois à détailler le processus ayant conduit au changement d'adresse mail du procureur.
PublicitéBleu étudie le même protocole d'accord
Si l'accord a une portée avant tout allemande - l'Allemagne étant le seul pays où Delos opère -, la logique voudrait qu'une approche similaire soit répliquée en France avec le partenaire local de Microsoft, Bleu. La société, détenue par Capgemini et Orange et qui vient de franchir un jalon vers sa certification SecNumCloud par l'Anssi, s'appuie, elle aussi, sur Azure pour proposer des environnements cloud dits de confiance. Une source au sein de Bleu confirme d'ailleurs que la société étudie le même protocole d'accord que celui signé par SAP pour sa filiale Delos. La filiale de Capgemini et d'Orange se donne un peu de temps pour comprendre tous les tenants et aboutissants d'un tel accord, même si la perspective est jugée très intéressante en interne.
Pour l'heure, Bleu s'est contenté d'officialiser un accord d'assistance mutuelle avec Delos, pour gérer les crises cyber et situations d'urgence. Le partenariat franco-allemand comprend « la mise en place de capacités transfrontalières de détection précoce, d'analyse, de défense et de remédiation des cyberincidents », précise SAP dans un communiqué.
Article rédigé par
Reynald Fléchaux, Rédacteur en chef CIO
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