La SNCF mise sur le numérique pour vous faire de nouveau aimer le train

Nouvelles rames, numérisation du réseau. A la SNCF, le numérique prend une part croissante dans l'exploitation et la modernisation des infrastructures. La direction du groupe y voit un levier essentiel pour répondre à ses enjeux en matière de coûts et d'absorption de la demande.
PublicitéMettre plus de trains, donc plus de passagers, sur les rails, tout en diminuant le coût d'exploitation du train. C'est cette ambition qu'affiche Carole Desnost, la vice-présidente technologies, innovation et projets groupe de la SNCF : « nous sommes passés de l'écologie à l'urgence climatique », note-t-elle pour expliquer le contexte justifiant cette accélération. Sans oublier évidemment l'ouverture à la concurrence qui touche désormais de nombreux services de l'opérateur historique (grande vitesse y compris). Pour le groupe public, une des réponses à cette ambition réside dans la technologie, que celle-ci soit embarquée dans les trains ou viennent aider à moderniser un réseau vieillissant.
La SNCF sera livrée des premières rames de sa cinquième génération de TGV, le TGV M, début 2026. Celles-ci embarqueront 35% de passagers en plus par rapport aux rames duplex actuelles, mais aussi une batterie de traction, permettant de récupérer de l'énergie au freinage et de rejoindre la prochaine gare en cas de rupture de caténaires. Au-delà de cette évolution attendue, la SNCF conçoit un robot spécifique, Mars LGV, pour assurer la reconnaissance automatisée des lignes à grande vitesse chaque matin. Bardé de capteurs, afin de récupérer un maximum de données sur la voie mais aussi l'environnement, et piloté à distance, ces robot, financés dans le cadre de France 2030, doivent entrer en service en 2030. Et remplaceront les rames commerciales qui ouvrent actuellement les voies et qui sont donc mobilisées pour une opération technique, sans transporter de voyageurs.
Rames légères surveillant l'état du réseau
Surtout, au-delà de la seule grande vitesse, la SNCF travaille à des formats de rames assurant des dessertes sur des voies peu fréquentées, voire inexploitées. Comme Draisy, un train électrique léger (trente places assises environ) bardé de capteurs, censé redynamiser des lignes peu fréquentées ou fermées. Au total, via des développements avec des partenaires, la SNCF participe ainsi à la conception de trois formats de trains légers (Telli, Flexy et Draisy), dont un modèle hybride capable aussi de rouler sur route, tous financés via le plan France 2030. « L'idée de départ consiste à créer des véhicules légers qui n'abîment pas les infrastructures, afin de ne pas avoir à réinvestir sur ce volet, précise Carole Desnost. L'objectif est de diviser le coût d'exploitation par deux. » Ces nouvelles rames embarquent des systèmes assurant la surveillance de l'infrastructure et du matériel roulant. « J'ai ouvert un axe de recherche sur comment produire du ferroviaire moins cher », lance Jean-Pierre Farandou, le président du groupe SNCF.
Misant sur des composants issus de l'automobile, Draisy, le futur train des campagnes de la SNCF, ambitionne de diviser par deux les coûts d'exploitation et de maintenance par rapport à un train régional classique. (Photo : SNCF)
Publicité« Nous sommes le chef de file de la filière en France, mais nous ne faisons pas les choses seuls. Nous travaillons avec les autres acteurs de la filière, avec les laboratoires de recherche et d'innovation ou avec des start-ups comme Mistral », souligne Jean-Pierre Farandou, le président du groupe SNCF. Draisy, par exemple, est le fruit des travaux d'un consortium réunissant la compagnie nationale, l'industriel Lohr, les PME GCK Battery et Stations-e, ainsi que l'Institut de recherche technologique Railenium. Ce train des campagnes, dont les développements ont été lancés en 2022, est attendu pour 2028.
Moderniser la signalisation pour faire rouler plus de trains
A ce matériel d'un genre nouveau, s'ajoute le déploiement d'un nouveau système de signalisation, ERTMS (European Rail Traffic Management System, soit le système européen de gestion du trafic ferroviaire), qui remplace les multiples systèmes nationaux que doivent actuellement cumuler les rames circulant dans plusieurs pays. Ce système promet de réduire l'intervalle entre les trains de 40%, améliorant d'autant les capacités sur les lignes très fréquentées. « Via la modification du signal sur l'axe Paris-Lyon, nous pouvons ainsi passer de 13 à 16 trains par heure. C'est une solution pour répondre à la hausse de la demande. Mais ce système coûte cher, c'est pourquoi nous le déploierons d'abord sur les lignes les plus fréquentées », dit Carole Desnost. Ce système doit aussi aider à moderniser la ligne Marseille-Vintimille.
Selon Jean-Pierre Farandou, le déploiement d'ERTMS, « un système tout numérique », couplé à la mise en oeuvre de centres de commande centralisés (une vingtaine sont prévus), coûtera 500 M€ environ. « On ne va pas mettre des algorithmes sur de l'électro-mécanique », ironise le toujours président de la SNCF. Le nouveau système de signalisation s'accompagne d'une modernisation du système radio assurant les échanges entre le sol et le bord, d'abord sur une déclinaison du standard GSM, puis sur un standard dérivé de la 5G (FRMCS, pour Future Railway Mobile Communication System).
Réseau : Jean-Pierre Farandou veut un milliard supplémentaire
« Nous ne ferons pas le train du futur sur le réseau du passé, reprend Jean-Pierre Farandou. Tous nos efforts d'innovation ne valent pas grand-chose sur un réseau en mauvais état. Il ne sert à rien de progresser avec l'IA sur le matériel roulant si le réseau tombe en panne », dit le dirigeant, présent opportunément à la conférence de presse qu'organisait la SNCF sur ses projets innovants pour faire passer des messages au gouvernement en pleine conférence sur le financement du rail. Et le dirigeant de réclamer un milliard d'euros supplémentaire en 2028 pour financer la rénovation du réseau.
En complément :
- Julien Nicolas, SNCF : « Un SI performant et au juste prix pour affronter la concurrence »
Article rédigé par
Reynald Fléchaux et Félix Hostachy
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