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La Maif mise sur son portail d'API pour aller vers l'open insurance

La Maif mise sur son portail d'API pour aller vers l'open insurance
Thomas Ollivier, responsable développement et partenariats B2B du groupe Maif : « Le portail d’API nous permet de développer notre capacité d’acquisition de sociétaires avec des partenaires. »

Le lancement du portail d'API de la Maif, début 2022, s'inscrit dans la tendance de l'open insurance, en visant à construire un écosystème de partenaires autour des produits et services de l'assureur. En amont, l'entreprise s'appuie sur une stratégie bien affûtée, tant dans les choix technologiques que dans ceux des partenaires.

PublicitéFace à un marché de l'intermédiation en assurance en plein essor, la Maif a décidé de lancer son propre portail d'API début 2022. Pour l'assureur, il s'agit de transformer cette tendance de fond en opportunité, en créant un écosystème de partenaires affinitaires autour de ses produits. Thomas Ollivier, responsable développement et partenariats B2B du groupe Maif et Guillaume Rincé, directeur des technologies de la Maif, expliquent quels sont les enjeux métiers et technologiques derrière ce portail, fruit de travaux de longue haleine.

Selon Thomas Ollivier, la désintermédiation dans le secteur des assurances est à la fois une menace et une opportunité pour les assureurs. « Le marché voit un nouveau canal de distribution prendre de l'ampleur. En effet, le marché du B2B2C augmente très vite, avec une hausse estimée entre 50 et 60 % jusqu'en 2026. D'après le site de l'Orias, les inscriptions en mandataires d'intermédiaires en assurance ont pratiquement triplé entre 2007 et 2020, avec un quart des demandes venant de la distribution automobile et de la mobilité et environ 23 % venant du secteur de l'immobilier et des énergéticiens. » La Maif a entamé des travaux depuis plusieurs années pour se saisir de ces opportunités, en développant sa capacité d'acquisition de sociétaires via des partenaires », indique le responsable développement et partenariats B2B. Le portail d'API s'inscrit dans cette ambition, une façon pour l'assurer d'appréhender l'open insurance. « Nous complétons une partie de notre stratégie d'acquisition. Cette orientation nécessite l'APIsation de nos offres, mais cela ne s'arrête pas là. Il faut aussi le faire savoir, et rendre ces API accessibles », souligne Thomas Ollivier. Enfin, le choix des partenaires s'effectue avec une attention particulière. « Nous cherchons des acteurs en affinité avec notre marque, avec un processus de sélection et de détection », décrit le responsable. En amont, il faut un alignement des enjeux marketing, des choix technologiques et des enjeux de marché. « Le fait d'APIfier nos offres nous a conduits par exemple à modifier la gouvernance de nos produits de gestion sociale et prévoyance, pour bien délimiter le rôle des partenaires et préserver la cohérence avec notre politique tarifaire et commerciale », illustre-t-il. L'assureur regarde également si les partenaires envisagés s'inscrivent dans la stratégie du groupe. Ainsi, pour toucher une cible de trentenaires, il prospecte les plateformes digitales les plus utilisées par ces derniers. « Ensuite seulement, nous parlons du produit, de l'étape ou des parcours sur lesquels interviennent les transactions exposées à travers les API. Celles-ci s'inscrivent dans quatre grands groupes : indication d'affaires, présentation des tarifs, devis et souscription », indique Thomas Ollivier.

PublicitéApporter de la valeur ajoutée aux partenaires

Le portail permet d'interagir avec les API et de les exposer. Selon le CTO, c'est à la fois une vitrine et une manière d'apporter de la valeur ajoutée, notamment en termes de sécurité et de maîtrise des transactions. Il offre des fonctionnalités d'API management, comme la gestion des souscriptions, la définition des droits d'accès ou encore des statistiques d'utilisation telles que le volume d'appels. Sur le plan technologique, un tel projet soulève également des défis conséquents. « Cette stratégie demande de valider des investissements technologiques importants, ainsi qu'une trajectoire technologique d'ouverture du système d'information », pointe Guillaume Rincé. Pour construire ce portail, la Maif a développé elle-même différentes briques depuis environ quatre ans, notamment Otoroshi pour la gestion des API et Daikoku pour la partie portail. L'assureur a d'ailleurs choisi de mettre ces outils en open source. Ce choix de faire soi-même les composants techniques répond à un enjeu d'indépendance selon le CTO. « Il s'agit de ne pas avoir de coupure entre le business et le client. Nous avons besoin d'une relation directe avec nos partenaires, notamment pour assurer la sécurité des données. Des données personnelles transitent par ces API, il nous faut donc une parfaite maîtrise de la chaîne », souligne Guillaume Rincé. Dans le même temps, il faut travailler les fonctions du coeur de métier, pour les rendre accessibles avec une bonne performance. Enfin, la Maif mène aussi des travaux sur son système d'information plus ancien, pour le moderniser et le rendre compatible avec cette attente d'ouverture.


Guillaume Rincé, directeur technique de la Maif : « Nous avons besoin d'une relation directe avec nos partenaires, notamment pour la sécurité des données. »

Grâce à la flexibilité offerte par les API, la Maif peut mettre en oeuvre plusieurs modèles, à différents moments dans les parcours clients. L'assureur a ainsi mis en place un partenariat avec l'agrégateur bancaire Bankin', à la suite d'une demande émanant des clients de ce dernier. « Nos offres n'apparaissent dans les recommandations d'assurance que si les clients cherchent avec un critère de qualité. S'ils mentionnent uniquement le prix, elles ne sont pas visibles », décrit Thomas Ollivier. Ce parcours commence sur Bankin' et se poursuit sur maif.fr, avec un rebond téléphonique. « Quand nous avons mis en place le partenariat, nous avons suivi les apports de leads, en réconciliant la vision de Bankin' et la nôtre. En cas d'écarts de performance, nous faisons évoluer le parcours. C'est pour cela que nous avons mis en place un plateau téléphonique pour augmenter le taux de transformation », indique Thomas Ollivier. Un autre exemple concerne la MMJ (Mutuelle des métiers de la justice et de la sécurité). Après une première demande de partenariat qui n'avait pu aboutir, les deux mutuelles sont restées en contact. À l'occasion d'une refonte du site Internet de la MMJ, prévoyant une partie transactionnelle et des API, la Maif en a profité pour relancer le partenariat et proposer son parcours d'assurance de biens sur le nouveau site. Un dernier exemple concerne Odopass, une plateforme permettant aux particuliers de vendre et acheter des véhicules d'occasion dans un cadre sécurisé. « Il s'agit d'un partenaire bêta-testeur », explique Thomas Ollivier. « Ce sont souvent les premiers à embarquer les dernières évolutions de nos API. Ils vont ainsi intégrer les toutes dernières pour les tarifs et la souscription. Leurs retours sont importants pour nous. »

Une feuille de route partagée

Sur le portail, les API ne sont pas en libre accès. « Nous avons la liste de nos API qui est affichée, mais le partenaire doit recevoir un code fourni par nos équipes IT, dans le cadre d'une convention de partenariat. Le partenaire sera rémunéré en fonction du nombre de contrats souscrits derrière », précise Thomas Ollivier. Aujourd'hui, environ une dizaine de partenaires sont branchés au portail sur deux grandes API de recommandation et simulation de tarifs, pour des produits d'assurance automobile et camping-car, d'assurance bateau, ainsi que d'assurance location jeunes. « D'ici environ un an, nous prévoyons une vingtaine d'API sur le portail pour les produits Maif, mais aussi Altima et Maif vie. Nous voulons aussi élargir le portail à nos structures BtoB », ajoute Guillaume Rincé. En interne, les utilisateurs du portail proviennent de différents domaines d'activités, avec deux grands types de clients : d'un côté, les équipes qui créent les parcours, de l'autre les métiers qui sont dans une logique d'ouverture de leurs offres. « Nous priorisons les API à développer à partir d'un grand backlog. Nous décidons ensemble des bonnes priorités pour que tout le monde soit à l'aise avec la trajectoire et nous choisissons aussi en fonction de notre capacité à faire, avec une feuille de route très claire et partagée. C'est un aspect clef pour le succès de notre démarche d'APIsation », souligne le CTO. « Nous ne développons pas une API juste pour le besoin d'un partenaire. Quand nous sommes prêts, cela veut dire que derrière, toute l'organisation est alignée. C'est notre vision de la longue traîne, le but este pouvoir servir une multitude de partenaires différents », ajoute Thomas Ollivier. Cette volonté d'éviter les API spécifiques à un acteur réduit également les risques, selon Guillaume Rincé. « Si plusieurs partenaires utilisent la même API, cela permet assez vite de détecter un dysfonctionnement et cela facilite l'identification des problèmes. »

Un dernier élément essentiel qui a contribué à la concrétisation de ce portail est le travail d'acculturation qui a été mené en amont, dans toutes les strates de l'entreprise. « Il y a quelques années, nous étions confrontés à des enjeux de sensibilisation sur ces sujets. Nous avons passé pas mal de temps à suivre et expliquer les tendances. Aujourd'hui, la direction générale est complètement embarquée sur le sujet », pointe Thomas Ollivier. « Les API ce n'est pas magique, derrière il faut une compréhension du modèle économique et métier. Il faut comprendre que si on travaille dans un réseau, un sociétaire est peut-être arrivé via une application mobile de partenaires. Cette compréhension est essentielle à tous les niveaux », insiste Guillaume Rincé. Dans les prochains mois, d'autres parcours ont vocation à être intégrés par la suite, tels que l'assurance des EDPM (engins de déplacement personnel motorisés), l'assurance des propriétaires bailleurs, le crédit immobilier et des services de réassurance autour du logement.

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