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Trophées CIO/LMI 2012 : les meilleurs managers de l'IT livrent leurs bonnes idées (Deuxième partie)

Trophées CIO/LMI 2012 : les meilleurs managers de l'IT livrent leurs bonnes idées (Deuxième partie)

Six managers, DSI, DG ou ingénieur, champions de l'innovation donnent leur vision du management de projets qui font appel à l'informatique et au numérique. Ils ont été distingués lors de la douzième édition des Trophées CIO et du  Monde Informatique qui s'est déroulée le 20 novembre 2012 au Pavillon Dauphine à Paris.

PublicitéLe 20 novembre 2012, CIO et Le Monde Informatique ont décerné les Trophées 2012 des Managers de l'IT pour des projets où l'informatique et le numérique occupent une place centrale.

Cette douzième édition de la manifestation était placée sous le signe de l'innovation et se déroulait à l'occasion de la conférence « Innovations et défis 2013 de la DSI ». Six managers ont été distingués. Il s'agit de DSI, directeurs métiers, directeurs généraux ou ingénieurs.

Nous revenons cette semaine en détail sur leurs réussites. Chaque lauréat s'est prêté au jeu des questions/réponses. La semaine passée, nous vous avons présenté les lauréats de l'Excellence Opérationnelle, de l'Innovateur et du Stratège. Cette semaine, la parole est donnée aux lauréats du Trophée de la Valeur Métier, du Trophée de la Transformation Numérique et au Grand Prix.

Trophée de la Valeur Métier

La transformation des processus métier pour délivrer toujours plus de valeur ajoutée était récompensée par le Trophée de la Valeur Métier. Remis par Pascal Buffard, président d'AXA Group Solutions, président du Cigref, il a distingué Albert Asseraf, directeur général en charge du marketing et de la stratégie de JCDecaux, ainsi que Pierre Niox-Château, DSI de la même entreprise. « Quand nous disons que la DSI est au coeur de la transformation des processus métiers, notre présence ensemble ici en est la meilleure preuve » a observé Albert Asseraf.

Le leader mondial de la publicité extérieure réalise 2,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Les évolutions numériques sont au coeur de sa stratégie actuelle. Parmi ses innovations récentes, JCDecaux a rendu interactives les affiches publicitaires extérieures via l'offre « Usnap ».

Le service « Usnap » permet de prendre en photo une affiche, celle-ci est reconnue par une application sur smartphone, et des informations complémentaires sont transmises au mobinaute. Il y a eu 1000 campagnes publicitaires Usnap réalisées depuis deux ans et 72 000 téléchargements de l'application réalisés à la mi 2011.

Dans le cadre de la Communication Extérieure Digitale, JCDecaux propose une offre qui diffuse la présence des marques sur 400 écrans en aéroports en France, et 12 500 écrans dans le monde. Pour cela, les équipes de JCDecaux, dont la DSI, ont conçu une plateforme de diffusion des contenus en temps réel multi-formats, le Digital Management System.

Enfin, les expérimentations (...)



Enfin, les expérimentations avec la ville de Paris en matière de mobilier urbain interactif ont inclus un dispositif baptisé le « décodeur urbain ». Il s'agit d'un écran tactile accessible par les citoyens, commandé via Android, afin de diffuser des informations géolocalisées.

PublicitéLa remise du Trophée en vidéo

Pour Albert Asseraf, le plus grand défi que JCDecaux a dû relever pour se transformer est fréquemment rencontré : « la difficulté est de gérer le changement de façon transversale car une entreprise ne peut pas changer si l'on confie le changement à une personne, un individu unique, qui va dire voilà comment il faut faire ». La transformation doit donc être un travail collégial associant toutes les directions.

Proximité DSI-métier

« Nous avons à organiser une proximité quotidienne avec tous les acteurs de l'entreprise » souligne en retour Pierre Niox-Château, DSI de l'entreprise. Les modèles de développement très hiérarchisés, très cloisonnés entre maîtrise d'ouvrage/assistance maîtrise d'ouvrage/maîtrise d'oeuvre, un modèle très franco-français finalement, doivent laisser la place à des modèles plus interactifs et collaboratifs.

Pierre Niox-Château estime : « si nous n'avions pas adopté un modèle d'organisation innovant, nous n'aurions pas pu aboutir aux résultats qui nous valent aujourd'hui d'être primés. »

Vivre dans l'approximation

Plutôt qu'une zone d'inconfort mentionnée par Bruno Patino, Directeur général délégué au développement numérique et stratégie de France Télévisions et directeur de France 5, Pierre Niox-Château préfère parler de « zone d'approximation ». Les spécifications d'un projet ne peuvent plus être, dès l'origine, parfaitement connues. Cette approximation contamine le planning voire aussi le budget.

Mais il existe une contrepartie à l'acceptation de cette approximation. « Il faut organiser avec une extrême rigueur et un grand formalisme la gestion de risque » relève Pierre Niox-Château.

Cette souplesse est la clé du succès actuel et probablement futur du groupe JCDecaux. Albert Asseraf observe ainsi : « notre défi demeure d'inventer le mobilier urbain de demain ». Des premières « sucettes » (panneaux d'affichage sur trottoir) aux Velib' (vélos en libre service à Paris), JCDecaux se targue d'être un marqueur de son marché.

Demain, l'espace public sera mis en scène par de nouveaux objets où la dimension numérique sera fondamentale. « Le jury a été enthousiasmé par la capacité de JCDecaux à réinventer son métier au travers d'innovations alors qu'il était en position de force » a témoigné Pascal Buffard.

Trophée de la Transformation Numérique



Trophée de la Transformation Numérique


Distinguer celui qui a su placer le numérique au coeur de nouveaux processus métier était l'objet du Trophée de la Transformation Numérique. Remis par Laurent Ferrari, DSI groupe d'EDF, il a récompensé Morald Chibout, DG d'Autolib, la société qui commercialise le nouveau service de véhicule électrique partagé à Paris.

La composante « système d'information » était au coeur de l'offre Autolib qui, sur le plan industriel, utilise diverses offres du groupe Bolloré (batteries, bornes multimédias...). Ouvert depuis un an, ce service, une première mondiale, rassemble 92% de clients satisfaits selon Morald Chibout.

La remise du Trophée en vidéo

« Notre plus grand défi a été le temps » a expliqué Morald Chibout. Il a relevé ainsi : « le contrat a été signé le 26 février 2011, je suis arrivé le 29 août et nous avons fait le premier test le 2 octobre pour une ouverture commerciale le 5 décembre 2011 avec un homme formidable mais pressé qu'est Vincent Bolloré. »

Dans ce délai contraint (sous la pression de fortes pénalités) et réduit, il a fallu faire travailler ensemble des entreprises très différentes les unes des autres dans leurs cultures et leurs métiers : Polyconseil pour le développement informatique, IER pour l'informatique embarquée, les fabricants de la voiture Bluecar, les centres d'appels...

La grande complexité du système doit cependant rester discrète, dissimulée. Pour l'utilisateur comme pour le conseiller en centre d'appels, la simplicité doit être le maître mot. « Ca a l'air bateau de dire cela mais il faut le faire » clame Morald Chibout. Celui-ci avait fixé deux défis : un abonnement doit être pris en moins de 5 minutes et la prise de la voiture en moins d'une minute. Ce n'était pas gagné au début, les informaticiens estimant cela impossible. Et puis, après d'amicales discussions, le résultat est pourtant là.

Souplesse et agilité ne suffisent pas à réussir ce genre de projets ou à atteindre de tels résultats. « La concertation est également indispensable » souligne Morald Chibout.

Deux pages maximum



Deux pages maximum


Pour éviter les documents illisibles ou trop rigidifiants, le directeur général d'Autolib a appliqué un principe simple : « j'ai exigé de la direction marketing qu'elle rédige ses spécifications sur deux pages maximum, ce qui leur interdit de rentrer dans le métier du DSI ». En limitant aussi drastiquement les volumes, le document de spécifications ne comporte que des vraies demandes métiers. « L'obtenir est beaucoup plus compliqué qu'on ne le pense » soupire Morald Chibout.

Limiter ainsi les demandes initiales implique aussi de gérer les demandes métier dans le temps. Ce qui ne peut pas être demandé à un moment donné parce qu'il est non-prioritaire pourra être développé ultérieurement.

Après ce démarrage en fanfare pour Autolib, les défis restent nombreux. Vincent Bolloré a ainsi communiqué largement sur les quatre ans d'avance d'Autolib sur son business plan. Autolib devrait ainsi être à l'équilibre économique fin 2014 au lieu de fin 2018 dans les prévisions.

Mais cette anticipation demeure à réaliser. Autolib est aussi une première qui intéresse beaucoup de villes dans le monde. « Réussir notre internationalisation fait partie de nos défis » convient Morald Chibout. Il avoue : « nous voyons deux ou trois grandes villes dans le monde par semaine et notre offre devra pouvoir être au menu ou à la carte », c'est à dire un copier-coller du service complet parisien ou bien juste une partie (la voiture, les bornes...).

Pour le groupe Bolloré, le grand enjeu stratégique est autour des batteries Lithium-Métal-Polymère. Le défi énergétique du XXIème siècle repose en effet sur le stockage de l'électricité produite de mille façons différentes.

Laurent Ferrari, DSI groupe d'EDF, a estimé pour sa part : « le jury a évidemment apprécié la rapidité avec laquelle le projet a été mené. Mais il y aussi des technologies variées qui ont été mises au service d'un nouveau business model dont le coeur est dans le système d'information ».

Grand Prix



Grand Prix

Enfin, le dernier trophée attribué a été le Grand Prix. Il est traditionnellement remis à celui ou celle qui réunit au mieux toutes les qualités requises pour les autres Trophées. Remis par Patrick Franchinard, directeur de la performance et des achats ainsi qu'ex-DSI de Air Liquide Europe, il a distingué cette année François Couton.

Aujourd'hui Directeur analyse, prospective et pilotage de la performance chez Canal+, François Couton était DSI du groupe Canal + jusqu'en février 2012.

Sa carrière s'est partagée entre le métier et la DSI. François Couton a surtout accompagné la transformation numérique du groupe de télévision. Issu de la télévision payante, ce groupe a aujourd'hui aussi une activité de télévision gratuite. Comme tous ses concurrents, il doit affronter les défis du numérique, comme la dé-linéarisation de la consommation audiovisuelle.

Désormais, en effet, les programmes de télévision ne sont plus seulement consommés « en temps réel » sur son téléviseur mais également au travers d'offres de rediffusion, y compris sur Internet et via des terminaux variés comme les tablettes ou les smartphones. 

Accepter l'émancipation des métiers

En tant que DSI, François Couton a mis en place chez Canal+ un modèle de DSI externalisée à 80%, avec 600 collaborateurs, internes ou externes. Cette direction des systèmes d'information a développé un savoir faire industriel en matière de pilotage, de contractualisation et d'intégration.

Si François Couton défend l'idée qu'il faut accepter que les métiers s'émancipent de la DSI, il soutient qu'il faut les accompagner et s'assurer de la cohérence globale des solutions mises en place. De plus, chez Canal+ , la DSI accompagne la transformation des métiers vers le 100% numérique. Les programmes de la chaîne doivent être disponibles sur tous les écrans (box, TV, mobiles, tablettes, consoles, ...) dans le cadre d'une « supply chain » totalement numérique.

La chaîne ne devrait bientôt plus employer de cassettes vidéo analogiques. Cela implique de gros projets de BPM (Business Process Management) et de dématérialisation.
Plus classiquement, la DSI intègre les dernières tendances telles que le « BYOD » ou la virtualisation pour le quart des 4000 postes de travail de l'entreprise afin d'optimiser les tâches de certains intervenants. La DSI a transformé son infrastructure, en virtualisant les serveurs et le stockage avant de s'attaquer aux postes de travail et aux applications.

Le Big Data au service de l'humeur du moment

Par ailleurs, François Couton a mis en place avec le marketing du Groupe Canal+ un ambitieux programme de connaissance des clients. La DSI a ainsi délivré un service de recommandation sociale des programmes via les réseaux sociaux et par l'analyse des envies des abonnés.

Cette démarche repose sur l'usage d'un datawarehouse d'origine Teradata et la collecte des envies des spectateurs. La recommandation tient compte de l'humeur du client et de ses envies du moment que ce dernier indique dans une grille de 24 types. Cet outil a été mis en oeuvre avec l'aide d'une start-up et de sémiologues pour qualifier les films. Cet outil bénéficie de l'enrichissement en métadonnées pour qualifier chaque contenu proposé.

La remise du Trophée en vidéo

De tels développements exigent une parfaite collaboration entre la DSI et les métiers. « J'ai toujours travaillé dans la paix civile » s'est réjoui François Couton. Les enjeux concernaient en effet autant le marketing et la relation client que les systèmes d'information. Cette paix civile a permis aussi de sortir par le haut, en réduisant un peu les ambitions initiales mais sans casse majeure, d'un trop vaste projet de système d'information unifié.

Pour aboutir dans de grands projets, finalement, François Couton estime que (...)



Pour aboutir dans de grands projets, finalement, François Couton estime qu'il n'y a pas une seule méthode. Tout dépend du contexte et des objectifs. La méthode sera notamment différente selon le niveau de transformation induit sur l'organisation.

Mais, en revanche, selon François Couton, « pour réussir, il faut une vision tout en restant pragmatique, savoir écouter, s'appuyer sur les bons sponsors métier, savoir s'adapter, adopter des méthodes sans s'enfermer dedans, disposer de bonnes équipes et conserver du bon sens ».

Patrick Franchinard a, pour sa part, relevé : « pour le jury, le nom de François Couton s'est rapidement imposé, tant les défis qu'il avait eu à relever ont été clairs pour nous ».

Des ruptures en permanence

La télévision, aujourd'hui, est un monde qui subit d'innombrables ruptures qui constituent autant de défis. « Nous avons vécu l'arrivée de la TNT et l'arrivée des opérateurs télécoms dans le métier de la télévision, avec le triple play » a rappelé François Couton. Demain, face à la multiplication des terminaux, de nouveaux concurrents vont encore surgir. Ils auront pour nom Google ou Apple. Pour François Couton, « notre défi sera de poursuivre notre évolution pour nous adapter à ce nouveau contexte et survivre ».

Retrouvez les trois autres lauréats des trophées 2012 ici.

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