Stratégie

Le méga contrat Oracle-OpenAI laisse des questions en suspens pour les entreprises

Le méga contrat Oracle-OpenAI laisse des questions en suspens pour les entreprises
Pour les entreprises, le méga contrat entre Oracle et OpenAI peut interroger sur la stratégie du premier, et leur propre activité. (Photo Oracle)

OpenAI a confirmé une commande de plus de 300 Md$ d'infrastructure datacenter à Oracle dans le cadre du projet Seagate. Selon les analystes, des questions se posent sur l'impact de l'opération sur les autres clients OCI, voire sur Fusion ou l'ERP d'Oracle, même s'ils restent optimistes.

PublicitéOpenAI vient de passer une commande historique d'infrastructure cloud à Oracle dans le cadre d'un contrat de 5 ans, à compter de 2027, pour un montant de plus de 300 Md$. Une information obtenue par le Wall Street Journal auprès de proches de l'éditeur californien . L'opération fait partie du projet Stargate annoncé en janvier à la Maison-Blanche, voué à déployer un réseau de datacenters pour l'IA dans le monde entier. Un programme qui semblait jusque-là tarder à se concrétiser pour des raisons de différends avec le troisième partenaire, semble-t-il, le Japonais Softbank, toujours selon un article du début de l'été dans le Wall Street Journal.

Ne pas tourner le dos aux clients existants

À l'occasion de la présentation des résultats de son premier trimestre fiscal 2026, Oracle a confirmé que son carnet de commandes avait gonflé de 359 % par rapport au premier trimestre 2025, atteignant 455 Md$ d'engagements clients, dont 317 Md$ signés uniquement durant les trois premiers mois de son année fiscale. Et le contrat avec OpenAI le fait aussi sortir de son statut de fournisseur traditionnel de bases de données et d'ERP pour prétendre à une place de géant du cloud, voire de l'IA générative. Matt Kimball, vice-président et analyste principal chez Moor Insights and Strategy, s'interroge sur l'impact que pourrait avoir ce contrat sur les entreprises en général, dont les clients d'OCI, mais pas seulement. « Elles vont devoir prendre du recul pour tenter de comprendre l'influence que cette opération aura potentiellement sur leur propre stratégie, leurs opérations, leur pile technologique et même leurs résultats, estime-t-il. En réalité, il s'agit pour eux de se demander comment ce contrat positionne réellement Oracle en tant qu'acteur du cloud et quel poids futur il aura sur ce marché. »

Avec des contrats de ce type, les questions sont nombreuses. Les acheteurs de cloud doivent-ils s'enthousiasmer parce que le marché serait désormais aux mains d'un Big 4 et non plus d'un BIG 3, Oracle Cloud Infrastructure (OCI) rejoignant AWS, Azure et Google Cloud ? Au contraire, les structures déjà clientes d'OCI doivent-elles s'inquiéter qu'un seul client achète autant de capacité ? « Des questions « parfaitement légitimes et rationnelles », selon Matt Kimball de Moor, même si l'analyste estime inutile de s'inquiéter outre mesure. « OCI a un plan de développement de ses datacenters et de son infrastructure, qu'elle exécute avec une grande efficacité, explique-t-il. Et à bien des égards, le fait qu'OpenAI, choisisse de travailler avec OCI devrait en réalité rassurer ses clients et non le contraire, car cela signifie que le géant de la genAI a confiance en la capacité d'Oracle à répondre aux besoins de tous ses clients. »

PublicitéPeu d'inquiétudes sur la capacité d'exécution

L'analyste souligne par ailleurs qu'OCI a engagé d'imposantes mesures pour assurer que tous ses datacenters soient identiques. Il s'agit de garantir la même expérience à tous les clients, quelle que soit la région du monde où leurs charges de travail sont exécutées. « Je suis convaincu que la direction d'OCI veille à répondre aux besoins de tous ses clients, quelle que soit leur taille », poursuit l'analyste. Bien sûr, ceux-ci ont des raisons de se plaindre des coûts, des frais de licence et des conditions imposées par Oracle. Et ils le font. « En revanche, ils n'ont pas de raison de s'inquiéter quant à ce qu'Oracle fournit, ajoute-t-il. Ils sont très concentrés sur l'exécution et très déterminés » à offrir la même expérience à tous ses clients. Ils évoluent dans ce monde depuis bien plus longtemps que la plupart des entreprises [même si Microsoft est né deux ans plus tôt qu'Oracle, NDLR], ajoute-t-il. Lorsqu'ils commercialisent un produit, ils livrent un produit complètement fonctionnel. »

En résumé, lorsqu'ils envisagent un environnement cloud, les DSI doivent prendre en compte de nombreux facteurs : le coût de transfert des données, les charges de travail, les clouds hybrides, la sécurité, la résidence, la localisation et la confiance globale dans l'entreprise. Mais lorsqu'ils décident d'opter pour OCI, AWS, Azure ou GCP, ils ont rarement à se soucier du support informatique, souligne Matt Kimball. Tous anticipent la planification et le déploiement des capacités, la couverture géographique, etc. ».

Quid des bases de données et de Fusion ?

Le pari d'Oracle sur l'IA a toutes les chances de profiter aux clients traditionnels, selon l'analyste. « Cela crée une plateforme permettant aux clients Oracle d'étendre leur capacité GPU, à condition qu'elle soit disponible et que le modèle se développe », a-t-il déclaré. Chirag Dekate, vice-président analyste chez Gartner, abonde. « Les acheteurs de capacité cloud dans les DSI devraient considérer cet accord comme une véritable victoire. En revanche, ce sont peut-être les clients Oracle Fusion, ERP et bases de données qui pourraient craindre qu'Oracle se désintéresse de ses activités applicatives au profit de l'infrastructure cloud ».

Même si, comme le soulignent les analystes, ces activités restent le coeur de métier de l'éditeur et contribuent largement à ses résultats. Au vu des trimestriels présentés cette semaine, il est « très clair qu'Oracle reste ancré dans ses solutions d'entreprise ». C'est un « levier de croissance clé » et il continuera de moderniser et d'innover dans les bases de données et l'ERP. Ce n'est pas un réel sujet d'inquiétude pour les DSI. Au contraire, les clients bénéficieront probablement de la fusion potentielle de l'ensemble des techniques, et de fonctions encore plus avancées dans les logiciels historiques. »

Un intérêt commun dans les data

Certains doutent néanmoins encore de la concrétisation de l'accord, OpenAI n'ayant toujours pas réalisé de bénéfices. Pour financer l'opération, il lui faudrait générer au minimum 60 Md$ de chiffre d'affaires par an, soit six fois le montant actuel. Au-delà des préoccupations techniques, l'accord soulève en effet de nombreuses questions quant aux raisons pour lesquelles l'éditeur de ChatGPT a spécifiquement choisi Oracle. Matt Kimball souligne que les deux entreprises ont un point commun majeur : les données sont la clé de voûte de leur stratégie.

Oracle a toujours été une plateforme de gestion de données, construisant sa propre infrastructure cloud « littéralement de A à Z ». D'autres fournisseurs de datacenters traditionnels, apparus avant le cloud, ont dû s'y adapter. « Mais Oracle fait un travail remarquable pour répondre aux besoins des entreprises, juge Matt Kimball. Ils savent exploiter, déplacer et traiter les données plus rapidement que les autres. » Chirag Dekate confirme que, depuis sa création en 2016, OCI s'est distingué par ses capacités en ingénierie, sa rapidité de livraison et ses « piles d'infrastructure haut de gamme extrêmement fiables », et par ses partenariats stratégiques avec Microsoft et Google pour intégrer Vertex et Gemini à Oracle. « Ils ne cherchent pas nécessairement à proposer une solution full-stack entièrement intégrée, mais plutôt une pile cloud d'IA hautement innovante, avec une différenciation au niveau de l'infrastructure. »

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