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La guerre de la publicité en ligne est déclarée

La guerre de la publicité en ligne est déclarée

PublicitéLe marché de la publicité en ligne, auquel personne ne croyait au moment de la bulle de 2000, est en passe de devenir le Saint Graal d'Internet, et l'objet d'une guerre sans pitié entre les géants de la Silicon Valley. Au risque de rouvrir l'hypothèse d'une bulle Internet prochaine. Il est vrai que les chiffres sont prometteurs. Les taux de croissance de l'e-publicité sont de plus de 50% par an depuis 2004. Selon ZenithOptimedia, Internet pèsera 10% du marché publicitaire en 2007, et deviendra l'un des trois principaux supports pour les annonceurs d'ici 2009. En France, la publicité en ligne a représenté prés de 1,6 milliards d'euros d'investissements pour les annonceurs selon l'IREP. C'est encore loin derrière la presse, la télévision ou la radio, mais c'est en constante progression. Aux Etats-Unis, les dépenses de publicité en ligne sont passées de 6 milliards de dollars en 2002 à 12,4 milliards en 2005 : une croissance de 106% sur trois ans, alors que le marché de la publicité n'augmentait globalement que de 19% sur la même période selon Morgan Stanley. De quoi susciter bien des appétits. Appétits d'autant plus aiguisés que le marché est très concentré sur quelques sites Internet qui raflent l'essentiel de la mise, et qui en tirent l'essentiel de leurs revenus. Google réalise ainsi 99% de son chiffre d'affaires grâce à la publicité en ligne. De quoi être attentif au secteur. Google est également leader sur le marché, en attirant ce trimestre 76% du total des recettes sur les moteurs de recherche aux Etats-Unis, devant Yahoo !, qui doit se contenter de 16,7 %, et Microsoft. Voici donc les trois grands protagonistes qui vont se jeter dans la bataille à la concentration : Google, Yahoo ! et Microsoft. Et les cartes commencent à tomber. Google, le petit « jeune » du marché qui a démarré bien après les deux autres, a d'ores et déjà une grande longueur d'avance. Il a clairement affiché sa volonté de faire cavalier seul. Il a aussi dégainé le premier en procédant mi- avril à ce qui a été considéré comme une véritable déclaration de guerre : le rachat de la régie publicitaire en ligne DoubleClick pour 3,1 milliards de dollars en cash, soit près de 12 fois son chiffre d'affaires estimé. Rachat record pour Google, qui se place en position dominante, en s'approchant des agences en relation avec l'annonceur. Google choisit donc de remonter sur sa chaîne de valeur, pour mieux la maîtriser. Et de faire sérieusement monter les prix. Panique du côté de deux challengers de Google. Microsoft prépare ses armes et se lance dans la bataille, en protestant d'abord officiellement contre le danger monopolistique que présente ce rapprochement, en attendant mieux. Belle ironie, alors que la société est sortie affaiblie de son interminable procès anti-trust aux Etats-Unis, et fait l'objet de demandes fortes de l'Union Européenne pour s'ouvrir à la concurrence. De son côté, Yahoo ! annonce sa réplique en rachetant en action et en cash début mai les 60% qui lui manquaient dans Right Media, autre spécialiste de la publicité en ligne. Pour 680 millions de dollars, soit 4 fois plus cher que ce que lui avaient coûté les premiers 40%, achetés six mois auparavant. L'effet Google/DoubleClick est passé par là, et les enchères n'ont pas fini de monter. C'est Microsoft qui en fera les frais. Mais a-t-il d'autres options ? La firme de Redmond s'offre le 21 mai l'agence eQuantive pour 6 milliards de dollars, soit prés de 14 fois le chiffre d'affaires annuel de la société, et une surcôte de 85% par rapport à la valeur du titre en bourse. En un mois, trois géants de la publicité en ligne ont rejoint les 3 géants de l'Internet, et le jeu a profondément changé. Au prix fort. Est-ce que ce sera suffisant ? Rien n'est moins sûr. En effet, in fine, c'est une refonte plus profonde du secteur qui se prépare. Microsoft et Yahoo ! peuvent-ils espérer longtemps jouer chacun leur carte contre le géant Google ? Les rumeurs de rachat de Yahoo ! par Microsoft ont repris, relayées par le Wall Street Journal qui fait état de discussions avancées entre les deux groupes. Ce n'est pas la première fois que ces rumeurs agitent le microcosme Internet de la Silicon Valley, mais cette fois l'enjeu stratégique est de taille pour les deux acteurs. Valorisé à 50 milliards de dollars, Yahoo ! n'est pas bon marché, même pour Microsoft. Et la fusion, si elle doit avoir lieu, ne sera pas facile tant les deux groupes ont des zones de frictions et de recoupements. Rapidement démenti par Terry Semel, le patron de Yahoo !, il est néanmoins plus que probable que le mouvement de concentration amorcé dans le secteur va se poursuivre à un rythme élevé dans les mois à venir, et à des prix qui vont faire monter les spéculations et créer des situations de volatilité fortes sur un marché pourtant bien assaini ces dernières années. Au risque de créer une nouvelle bulle ?

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