L'incendie d'OVH n'est pas un cas de force majeure, un éditeur SaaS débouté par la justice

Hébergé par OVH, l'éditeur Jarvislegal a tenté de se dédouaner des interruptions de service de son logiciel SaaS en invoquant un cas de force majeure causé par l'incendie de datacenter de son prestataire. Un argument rejeté par le tribunal, le contrat prévoyant ce risque de défaillance.
PublicitéPour le tribunal judiciaire de Versailles, l'incendie du datacenter d'OVH, à Strasbourg en mars 2021, n'est pas un cas de force majeure pour un éditeur SaaS qui y était hébergé et cet événement ne justifie pas l'indisponibilité du service de cet éditeur, en l'occurrence Jarvislegal qui propose une solution pour les cabinets d'avocats. Dans un arrêt du 11 avril 2025, rapporté par l'avocat Alexandre Archambault, le tribunal estime que la société Jarvislegal « ne peut se prévaloir de la force majeure dès lors que la sauvegarde sur deux serveurs opérés par des fournisseurs distincts localisés à des endroits différents à laquelle elle s'était engagée était destiné à prévenir le risque de la défaillance de l'un ou l'autre des serveurs et qu'elle a failli à cette obligation. » Le magistrat ajoute : « l'incendie survenu dans les locaux de la société OVH constitue un événement qui non seulement pouvait être raisonnablement prévu mais avait même été anticipé lors de la conclusion du contrat. » Le plaignant, un cabinet d'avocats, a subi des interruptions de service de son logiciel de gestion pendant plus de 15 jours, suite à cet incendie.
Fausse promesse dans le contrat
Dans son contrat, Jarvislegal avait en effet précisé que « l'ensemble des données est redondé sur un minimum de 2 serveurs, chacun opéré par un hébergeur distinct (OVH et Gandi) ». Mais à la survenance de l'incendie, le constat était tout différent, les données de backup étant stockées dans un autre bâtiment d'OVH (mis hors tension après le sinistre), et non auprès d'un second prestataire, à savoir Gandi. Dans son arrêt, la cour note que Jarvislegal « ne conteste pas ne pas avoir eu de deuxième hébergeur ». Pour les DSI et RSSI, cette affaire met en lumière la nécessité de vérifier l'effectivité des sauvegardes promises dans les contrats SaaS. Le tribunal souligne que le cabinet d'avocats « est fondé à rechercher la responsabilité de la société dont le manquement contractuel est à l'origine de la coupure du logiciel ».
Le magistrat s'est également penché sur la question de la réversibilité des données en cas de rupture du contrat et du format de restitution desdites données. Le cabinet d'avocats plaignant a reçu un fichier brut, « mais sans avoir pu obtenir le mode d'emploi en permettant l'exploitation de la part de son prestataire qui s'y était contractuellement engagé, le RGPD exigeant en tout état de cause une restitution dans un format 'structuré' ». Pour l'ensemble de ces manquements, Jarvislegal a été condamné à payer 16 000 euros de dommages et intérêts à son client.
Suite au spectaculaire incendie du datacenter d'OVH à Strasbourg en mars 2021, plusieurs jugements ont éclairé la responsabilité des uns et des autres. Signalons notamment l'affaire Bati Courtage en 2023 et celle concernant Bluepad en mars de la même année. Dans les deux cas, des clients de l'hébergeur roubaisien ont obtenu des réparations devant la justice.
Article rédigé par

Jacques Cheminat, Rédacteur en chef LMI
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