Stratégie

Etude : l'aérospatiale s'envole vers des usines quasi autonomes

Etude : l'aérospatiale s'envole vers des usines quasi autonomes
Avec l'IA, la robotique ou l'informatique quantique, le jumeau numérique fait partie des technologies dont le secteur aérospatial attend le plus. (Photo : Airbus)

Dans une enquête menée par l'ESN indienne TCS, les industriels de l'aérospatiale estiment que 40% de leur production fonctionnera de façon autonome d'ici à 2032. Pour cela, ils comptent en particulier sur l'IA agentique et sur les jumeaux numériques.

PublicitéLes industriels du secteur aérospatial estiment que 60% de leurs opérations de production auront encore recours à l'humain d'ici 5 à 7 ans, mais que 40% reposeront sur des usines dites « lights-out » ou « dark factories ». Des sites de production entièrement ou presque entièrement automatisés, équipés de robots « intelligents et pilotés avec de l'analytique et de l'IA ».

C'est ce que conclut une étude menée par l'ESN indienne TCS (Tata consulting services) entre avril et mai 2025 auprès de 323 cadres dirigeants de l'industrie aérospatiale en Europe et en Amérique du Nord. 135 évoluant chez les constructeurs traditionnels, 50 chez les acteurs de la mobilité aérienne avancée (MAA, fabricant d'avions électriques à décollage et atterrissage verticaux ou eVTOL) et 138 chez les acteurs de la maintenance, réparation et révisions (MRO. Maintenance, repair and overhaul). Ces derniers sont d'ailleurs beaucoup plus modérés, s'attendant seulement à 2% d'autonomie complète et 33% de semi-autonomie.

L'agentique aux commandes

Le marché de l'aérospatiale se porte bien et devrait dépasser 1000 Md$ (860 Md€) d'ici à 2030, selon TCS, la MRO représentant 137 Md$ (117 Md€) à elle seule. Pour autant, le secteur est bousculé par de nombreux changements, comme le décrit l'étude. Par exemple, comme dans de nombreuses industries ou dans la logistique, le dérèglement climatique ou la situation géopolitique mondiale font de la résilience et de l'adaptabilité de la supply chain des enjeux centraux. Par ailleurs, le secteur aérospatial fait face à ses défis propres, avec l'arrivée de nouveaux entrants du côté des fabricants de lanceurs et, plus récemment, avec le développement des fabricants d'eVTOL. De quoi pousser les organisations du secteur à « réimaginer les fondements traditionnels de cette industrie », en particulier avec le numérique.
Deux répondants sur cinq s'attendent d'ailleurs bel et bien à des ruptures majeures liées à la technologie dans la décennie à venir. Ils identifient dans l'ordre les 5 domaines suivants : l'IA pour des décisions autonomes en temps réel, les jumeaux numériques pour piloter l'ensemble du cycle de vie produit - de la conception à l'intégration de service, en passant par la production -, les robots et les cobots, l'informatique quantique pour la simulation avancée, les matériaux et la logistique et enfin, l'edge computing et les systèmes de contrôle.

Dans un environnement d'ingénierie particulièrement complexe soumis à des régulations nombreuses et strictes, la combinaison humain-digital reste plébiscitée, si l'on en croit TCS. Une tendance dopée par l'arrivée de l'IA agentique. Près d'un répondant sur cinq affirme ainsi avoir déjà déployé des agents (6%) ou finaliser les bases techniques pour ce faire (13%). Les 80% restant demeurent cependant sceptiques sur la transparence et la capacité de contrôle associées, voire n'envisagent pas du tout l'agentique pour des questions de conformité réglementaire ou de confiance. Même progressive, cette bascule vers l'agentique promet ainsi, selon le rapport, de faire évoluer les systèmes de décision en exploitant une chaîne d'IA en collaboration avec les employés, sur des sujets à la fois à fort enjeu et très subjectifs comme la supply chain. Dans ce domaine, l'expérience des employés et l'infinie variété de situations sont, en effet, particulièrement importantes.

PublicitéJumeaux et threads numériques, métaplateforme

L'industrie aérospatiale n'est pas novice en matière de simulation ni de jumeaux numériques. Mais les dirigeants interrogés par TCS en font la deuxième technologie de rupture pour l'avenir du secteur, avec leur extension, les threads digitaux. Si jumeaux et threads s'appuient sur un même principe de représentations numériques d'équipements et de processus réels à partir de data réelles, les premiers se focalisent sur un process de production par exemple, alors que les seconds représentent l'ensemble du cycle de vie d'un produit, en se connectant à différents systèmes, dont les jumeaux numériques. Parmi les 135 répondants, 10% seulement disposent déjà de threads opérationnels, mais près de la moitié les ont déployés partiellement. Comme l'explique le rapport de TCS, « les jumeaux et les threads numériques couvrent la conception, la fabrication et le service, et les dirigeants peuvent ainsi les considérer comme une métaplateforme capable d'intégrer tout autant de l'IA, des analytiques en edge et même les futurs solveurs quantiques sous forme de modules ».

Du côté des entreprises de MRO, c'est aussi l'IA agentique, avec les analytiques prédictives, qui génère le plus d'attentes. Sur les 138 répondants, 38% en attendent un ROI de moins de 3 ans et 26% de plus un ROI compris entre 3 et 5 ans. Les jumeaux numériques et la data connectée suivent de près avec 35% espérant un ROI de moins de 3 ans, et 25% de plus pour un retour entre 3 et 5 ans. Pour 58% d'entre eux, ne pas passer à l'échelle en matière de transformation digitale engendrerait des pertes de revenus modérées, la perte de clients, des retards ou une augmentation des coûts opérationnels. Mais 22% vont jusqu'à craindre également des pertes de revenu majeures, voire une dégradation de la performance et des retards de livraison.

Optimisation de la performance et augmentation de la résilience

Enfin, le rapport de TCS rappelle que l'amélioration de la performance n'est pas le seul enjeu du déploiement de l'IA, des jumeaux numériques ou d'autres technologies numériques. Dans des environnements aussi complexes que ceux de l'aérospatiale, ceux-ci doivent aussi aider les industriels à augmenter la résilience de leurs systèmes, et en particulier de leur supply chain, face à des événements inattendus ou des ruptures. TCS a donc demandé aux 323 cadres interrogés dans son étude : « à quelle vitesse votre organisation pourrait-elle changer de sourcing en cas de défaillance d'un sous-traitant de rang 1 ? ». 11% répondent que ce serait possible en moins d'une semaine, 18% en moins d'un mois, mais la majorité (34%) ne réussirait à trouver une solution qu'entre un et trois mois. Pour 32%, cela prendrait même plus de 3 mois, sans oublier 5% qui avouent n'avoir aucun scénario applicable dans ce type de situation. Les MRO font mieux que les autres acteurs du secteur, avec une réactivité en moins d'un mois pour 39% d'entre eux, contre 18% pour les industriels et 28% pour les fabricants d'eVTOL.

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