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Des services publics numériques pensés pour le citoyen... enfin ?

Des services publics numériques pensés pour le citoyen... enfin ?
Rémi Letemple, Senior Research Analyst pour le cabinet IDC : « Il faut rendre la bureaucratie invisible pour les citoyens. » (Photo :D.R.)

Numériser un service existant ne suffit plus : les citoyens attendent désormais du secteur public une expérience proche de celle des meilleurs acteurs du privé. Ce qui suppose de repenser la conception même des services.

PublicitéEn tant qu'analystes, nous sommes au coeur des discussions et des interrogations de deux publics : les vendeurs et les acheteurs d'IT. En ce qui me concerne plus directement, j'ai eu la possibilité, ces dernières semaines, d'échanger avec des responsables d'entités publiques issus de toute l'Europe ainsi qu'avec les principales forces en présence dans le monde de la technologie sur les sujets liés aux services proposés aux citoyens.

Et bien que cela fasse maintenant quelques années que tout ce petit monde met en avant le retour à des services "citizen-centric", ou pensés pour le citoyen, nous avons le sentiment que les réflexions des différents acteurs se dirigent enfin vers une simplification de la réflexion. Et se focalisent sur quelques questions essentielles : quel est le besoin auquel nous souhaitons apporter une réponse en tant qu'acteur du secteur public ? ; comment définir ce fameux bien commun et comment la technologie peut-elle y apporter une réponse (ou tout au moins une partie de celle-ci) ?

Un arsenal d'outils à mettre en musique

Rendre les services gouvernementaux davantage pensés pour les citoyens n'est pas nouveau, mais jamais la palette d'outils technologiques à disposition n'a semblé si riche. Depuis la création de l'administration en ligne, la mise à disposition de services par les canaux numériques est devenue un instrument essentiel. Les différents gouvernements ont aussi investi dans des cartes d'identité à puce, des signatures électroniques, la gestion omnicanal et des applications de gestion de la relation avec les citoyens. Mais cela n'a pas suffi : les citoyens attendent plus, une expérience proche de celle rencontrée auprès d'acteurs privés.

L'accélération des services en ligne, principalement liée au Covid, a souvent été menée à la hâte et de manière fragmentée. Les nouvelles capacités technologiques, telles que l'intelligence artificielle (IA), la 5G et le edge ouvrent de nouvelles possibilités de casser des silos, d'améliorer l'expérience utilisateur et de rendre la bureaucratie invisible pour les citoyens. Cependant, de nombreux responsables politiques ou DSI nous confient bien souvent qu'ils sont davantage dans une logique de rationalisation de l'existant que dans une course effrénée à l'innovation.

Pour avancer efficacement, nous avons tenté de synthétiser les bonnes pratiques dont nous sommes témoins et d'en tirer quelques enseignements.

5 bonnes pratiques pour lier bénéfice et outils technologiques

- Rendre le partage de données systématique et sécurisé "by-design". Le principal avantage ici sera d'éviter d'imposer aux citoyens de fournir des informations plusieurs fois (pour enfin suivre le fameux principe du "dites-le-nous en une fois"). Des avantages concrets sont déjà mis en lumière, comme dans la ville de Gand, en Belgique, où certains services proactifs sont proposés et permettent aux citoyens de bénéficier automatiquement d'allocations.

Publicité- Simplifier l'accès aux démarches, en allant plus loin qu'un portail unique. Les processus de back-office doivent également être rationalisés pour permettre des expériences simples et homogènes, qu'on soit sur mobile ou non. L'intérêt de ces applications est d'organiser les démarches par événements de vie.

- Nouer des partenariats avec le secteur privé pour proposer des services allant plus loin que les démarches administratives. Dans certains cas de figures, l'achat immobilier ou d'un véhicule est simplifié par une connexion sécurisée entre services de l'Etat et banques. Cela garantit une traçabilité des transactions et évite la répétition des déclarations.

- Assurer l'accessibilité et l'inclusion de toutes et tous. L'IA générative et conversationnelle, la réalité augmentée et le metaverse constituent autant de passerelles permettant à certaines populations d'intégrer plus facilement le milieu scolaire/universitaire/professionnel. Pourtant, les premières initiatives vont plutôt dans le sens de l'exclusion des personnes neurodivergentes, ayant un handicap physique ou un accès limité au numérique. C'est la responsabilité de l'Etat de s'assurer de l'inclusion de tous les citoyens.

- Assurer de la transparence auprès des utilisateurs. Expliquer clairement aux citoyens à quoi servent leurs données et les inclure dans la réflexion sur les usages dès le début. Plusieurs villes, dont Amsterdam, ont développé un portail permettant de comprendre comment des algorithmes utilisent des données personnelles et à quelle fin.

Procéder dans l'ordre

Nous avons récemment été amenés à travailler sur l'initiative de jumeau numérique développée par le Port Autonome de Bordeaux. Plusieurs de nos interlocuteurs ont cherché à comprendre ce qui distinguait cette initiative et cela peut se résumer à : une gouvernance assumée et du bon sens.

Ce que l'on peut retenir des initiatives qui font désormais partie des bonnes pratiques, ce sont trois étapes :

- Cartographier les besoins des citoyens/usagers et les données déjà disponibles. Ceci est un impondérable pour éviter l'accumulation de plateformes et d'applicatifs métiers.

- En faire de même sur les processus opérationnels actuels et intégrer les parties prenantes aux projets dès le début. Dans l'exemple de la ville de Gand, des ateliers et entretiens ont été mis en place pour comprendre toutes les situations automatisables, ceci avec des citoyens comme avec des agents afin de parer à toute éventualité.

- Chercher un partenaire technologique une fois ces cartographies et cahiers de charges établis.

Tous les éléments sont entre les mains des responsables du secteur public, et de nombreux fonds européens permettent d'accompagner les investissements à court et moyen terme. Il faut maintenant penser usage, besoin du citoyen et bien commun !

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