Un jumeau numérique du territoire français pour lutter contre les inondations

Avec la diffusion d'une culture du risque climatique ou des initiatives comme la renaturation du bord de l'eau, le jumeau numérique devient une clé de la lutte contre les inondations en France. Construit entre autres à partir des données du programme Lidar HD piloté par l'IGN, ce modèle 3D du territoire servira à tester des scénarios d'aménagement destinés à réduire les risques de crue.
PublicitéAprès l'IA au service de la transition écologique en 2024, c'est aux inondations que l'IGN consacre son Atlas « cartographier l'anthropocène » de 2025. Le numérique reste néanmoins au coeur du document, puisque l'Institut national de l'information géographique et forestière place son jumeau numérique parmi les instruments de lutte contre les risques croissants de crue et de submersion marine sur le territoire français, avec le développement d'une culture du risque climatique et des actions comme la renaturation des abords de cours d'eau ou la replantation de haies.
Le réchauffement climatique devrait entraîner une hausse des températures de 4 degrés en France d'ici à la fin du siècle, et en conséquence, une « augmentation de la fréquence ou de l'ampleur des inondations dans une large partie du territoire », rappelle dans le rapport de l'IGN, Cédric Bourillet, directeur général de la prévention des risques au ministère de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche. Face à cette perspective inquiétante, il évoque l'importance de la donnée géographique pour disposer à la fois d'une modélisation à l'échelle locale et d'une compréhension plus large, à l'échelle du territoire national.
Des scénarios d'adaptation de l'aménagement du territoire
Mais le jumeau numérique de la France et de ses territoires n'a pas pour seul objectif de collecter, présenter et analyser les données. Sur le modèle d'un jumeau industriel, il servira à mieux cerner le risque inondation en proposant aux institutions, aux collectivités, aux acteurs du public et du privé de tester différents scénarios d'aménagement. Il s'agit en effet d'évaluer différents types d'adaptation d'un aménagement du territoire souvent ancien et peu adapté à l'aggravation du dérèglement climatique. Un aménagement du territoire qui non seulement ne prévient pas les risques d'inondation, mais peut les accentuer : « artificialisation des sols, urbanisation, canalisation excessive des cours d'eau », etc.
Avec les simulations numériques, il sera possible de faire varier des paramètres comme « l'intensité des pluies ou les conditions d'occupation des sols et des vitesses d'écoulement associées ». Des atlas de scénarios d'inondations et d'impacts envisageables dans le futur seront construits et mis à destination, par exemple des aménageurs ou des collectivités, pour identifier les zones à faible risque d'inondation et ainsi sécuriser l'installation d'infrastructures sensibles comme les hôpitaux ou les casernes de pompiers.
Une cartographie Lidar du territoire
Pour alimenter ce jumeau, l'IGN coordonne le programme Lidar HD de collecte de données par Lidar destiné à cartographier en 3D la France hexagonale, la Corse et les DROM, à l'exception de la Guyane. Celui-ci a débuté en 2021 avec une première phase d'acquisition et devrait s'achever dans les mois à venir. Les premiers modèles 3D du territoire ont été livrés en open data en 2025 (équivalent de 135 000 km2). Mandaté par le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI), l'IGN a lancé à cette occasion, avec le Cerema et l'Inria, un appel aux communs qui a reçu 200 réponses de collectivités, entreprises et instituts de recherche.
PublicitéLe programme Lidar HD vise à réaliser une « cartographie 3D du relief et du sursol (bâtiments, routes, ponts, digues, végétation, cultures agricoles, etc.) avec un haut niveau de fiabilité. Selon Véronique Pereira, responsable du service projets et prestations de l'IGN, celle-ci va permettre de « prédire avec une marge d'erreur très faible jusqu'où l'eau va se propager sur une commune, selon l'ampleur de la crue de la rivière ou du fleuve qui la traverse ».
Une superposition de sources d'information
Des bases de données comme OCS GE (occupation du sol de l'ensemble du territoire) ou les PLU (plans locaux d'urbanisme) alimenteront également le jumeau. « La superposition de toutes ces informations permettra par exemple de simuler la destruction d'une digue lors de la crue centennale d'un cours d'eau tout en visualisant précisément et de manière simultanée les différents secteurs inondés à la suite de cette catastrophe », poursuit Véronique Pereira.
« Grâce à un travail de terrain continu, à un mix technologique associant images aériennes et satellites, et à la puissance accélératrice de l'intelligence artificielle, complète Sébastien Soriano dans le rapport, nos équipes scrutent et décryptent en permanence le territoire français. En révélant les différents lits d'un cours d'eau et les zones qui seraient touchées par une crue selon sa hauteur, la cartographie 3D de la France, qui se construit au sein du programme Lidar HD, en est une belle illustration ».
Article rédigé par

Emmanuelle Delsol, Journaliste
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