Selon un rapport, les pratiques de Broadcom gagnent d'autres fournisseurs
Un observatoire dépendant de l'association des fournisseurs de services cloud européens souligne la persistance des pratiques de Broadcom avec VMware. Et la tentation, pour d'autres éditeurs, de s'engouffrer dans cette brèche.
PublicitéUn nouveau rapport, publié par l'observatoire européen de la concurrence dans le cloud (Ecco), écorne Broadcom sur sa politique commerciale liée à VMware. Selon l'observatoire, que gère le Cispe (regroupant plusieurs fournisseurs européens de cloud), la situation, déjà dénoncée en mai, s'est détériorée en 2025, le fournisseur américain tentant toujours de contraindre les clients de VMware à accepter des hausses de prix considérables (par un facteur 10 ou plus) et des conditions de licence onéreuses. D'après la dernière évaluation, la campagne de Broadcom sur ce terrain s'est poursuivie à un rythme soutenu.
Les difficultés à migrer, une aubaine pour Broadcom
Le problème, c'est que la migration vers un fournisseur concurrent est longue et coûteuse, si bien que de nombreuses entreprises et fournisseurs de services cloud (se reposant sur les technologies VMware pour bâtir leurs offres) n'ont pratiquement pas d'autre choix. « Pour certaines applications, il n'existe aucune alternative, car elles ne sont certifiées que pour fonctionner sur VMware. Même s'il est possible de déplacer les charges de travail, le processus peut prendre des mois, voire des années, pendant lesquelles les partenaires sont contraints de payer à la fois les frais de licence exorbitants de Broadcom et les licences de leur nouveau fournisseur », souligne l'Ecco. Par conséquent, cette démarche pourrait être « longue, coûteuse et potentiellement ruineuse », affirme l'observatoire dans son étude.
Ces difficultés de migration s'ajoutent aux intimidations juridiques présumées et aux lettres de mise en demeure envoyées plus tôt cette année aux clients disposant de licences perpétuelles et n'ayant pas souscrit d'abonnement, le mode de relation contractuelle que veut imposer Broadcom. Faisant part de sa détermination à contester ce régime, le Cispe a également déposé en juillet une plainte auprès du Tribunal de l'Union européenne contre la décision prise par la Commission européenne (CE) d'approuver l'acquisition de VMware, sous réserve de conditions qui ne faisaient aucune référence aux plaintes concernant son comportement. C'est l'autre facette de la campagne menée par l'Ecco et le Cispe : contester les positions de Broadcom et VMware tout en critiquant l'UE, accusée de ne pas en faire assez face à cette situation.
SAP sous le feu des critiques
Bon nombre des plaintes ont été déposées par l'association au nom de ses membres prestataires de services européens. En 2024, elle a créé l'Ecco afin de surveiller le comportement des grands éditeurs de logiciels sur le marché du cloud, encouragée par les concessions qu'elle a négociées avec Microsoft. Son premier rapport, qui portait sur les activités cloud de Microsoft, a finalement conduit à des changements dans les politiques de tarification à l'usage, de déploiement de cloud souverain et de confidentialité dans l'hébergement du fournisseur. Dans son tableau de bord, le dernier rapport d'Ecco attribue à Microsoft une note « verte », tout en soulignant que l'accord conclu avec l'entreprise ne couvre pas certaines questions telles que le regroupement des capacités d'IA ou la manière peu pratique dont Entra ID, Azure Active Directory et Microsoft 365 sont toujours liés entre eux. Cependant, selon l'observatoire, ce succès est contrebalancé par le fait que d'autres entreprises reproduisent désormais les tactiques de Broadcom. « L'un des effets les plus insidieux du comportement répréhensible de Broadcom est d'encourager d'autres fournisseurs à essayer d'imposer des conditions de licence moins favorables à leurs clients et partenaires », assure l'Ecco.
PublicitéParmi les fournisseurs visés figurent SAP et Citrix, le premier faisant actuellement l'objet d'une enquête de la Commission européenne pour comportement anticoncurrentiel. Le rapport de l'Ecco cite une série de plaintes à l'encontre de SAP, notamment l'une d'elles selon laquelle les clients européens se sentent contraints de migrer leurs applications sur site vers la plateforme cloud ERP de l'éditeur, « sans que cette transformation ne présente d'avantages clairs pour leur activité ». Les membres du Cispe se disent également mécontents de la nature « full-stack » de la nouvelle plateforme, ce qui signifie que les environnements SAP ne sont certifiés que sur de grands hyperscalers comme Microsoft, AWS et Google, excluant, selon eux, d'autres fournisseurs. De son côté, Citrix fait l'objet de critiques pour avoir prétendument mis en place un système de licence par abonnement similaire à celui de Broadcom, un modèle qui, selon l'Ecco, pourrait entraîner « des hausses de coûts significatives ».
Le besoin d'une régulation plus stricte
Selon AJ Thompson, chef de la stratégie commerciale du cabinet de conseil Northdoor, « ces pratiques ne se traduisent pas seulement par des augmentations de coûts, elles risquent également d'étouffer l'innovation et de compromettre les ambitions plus larges de souveraineté numérique de l'Europe. Des licences logicielles équitables, transparentes et flexibles sont essentielles pour favoriser un écosystème cloud compétitif qui donne du pouvoir aux fournisseurs locaux et protège les entreprises clientes. »
AJ Thompson exhorte les régulateurs « à agir rapidement, sous peine de voir des licences agressives éroder la concurrence et le choix offert aux clients ». Ni Broadcom ni SAP n'ont répondu à nos demandes de commentaires, mais une déclaration de Broadcom envoyée en réponse au rapport publié en mai par l'Ecco indiquait que l'entreprise se réjouissait « de l'opportunité d'avoir un dialogue constructif avec le Cispe » sur la manière dont ses produits peuvent aider les membres de l'association européenne à « être plus compétitifs et innovants ».
Article rédigé par
John E. Dunn, IDGNS (adapté par Jean Elyan)
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