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Il vaut mieux un bon accord qu'un mauvais procès !

Il vaut mieux un bon accord qu'un mauvais procès !

Médiation : un mode alternatif de gestion des litiges de plus en plus pratiqué

PublicitéL'adage selon lequel «mieux vaut un mauvais accord qu'un bon procès» est sans doute aussi ancien que l'existence du commerce et des procès eux-mêmes. Et si les plaideurs de Racine ou de Daumier n'y trouveraient plus leur compte aujourd'hui, l'air du temps semble de plus en plus enclin à inverser l'adage, professant, ce qui est de plus en plus vrai, qu'il vaut mieux un bon accord qu'un mauvais procès. C'est, qu'entre temps, le recours croissant à la médiation (conventionnelle ou judiciaire) est, en effet, venu bouleverser le paysage contentieux traditionnel. Si celui-ci ne mettait en présence que des parties assistées de leurs conseils face à un juge qui tranche, la médiation introduit désormais un personnage tiers, neutre, expérimenté et diplomate, en un mot suffisamment «rond» pour prétendre (et réussir le plus souvent) à rapprocher des points de vue jusqu'alors vécus par les parties comme strictement irréconciliables. De sérieuses raisons expliquent le développement de ce mode alternatif de résolution des conflits commerciaux... En premier lieu, les procédures judiciaires demeurent longues, génératrices de coûts (de conseils juridiques et techniques, mais également de ressources internes) et parfois aléatoires. Il faut bien reconnaître que, dès lors qu'elles ont une certaine importance, les affaires prendront fin assez marginalement avec le jugement de première instance et que, pour la plupart d'entre elles, les parties useront des deux degrés de juridiction mis à leur disposition, rajoutant du temps au temps et des coûts aux coûts... En second lieu, dans la niche des nouvelles technologies, l'expertise judiciaire à laquelle le juge recourt dans la majorité des cas est souvent décevante par la qualité des constats effectués et les conclusions produites. Il en ressort fréquemment, pour les différentes parties au litige, un saupoudrage de responsabilités qui rendra plus ou moins incertaine la lecture que le juge en fera ultérieurement. Enfin, les traces qu'une procédure judiciaire laisse sur ses protagonistes sont, sinon ineffaçables, du moins durablement profondes. Ces procédures entraînent généralement, pendant un temps plus ou moins long, une rupture totale des relations commerciales entre les parties. Entre acteurs économiques d'importance dont les chemins sont amenés à se recroiser, ces «blessures de guerre» sont donc largement contreproductives, y compris pour la partie qui sort vainqueur du conflit. Ces inconvénients majeurs ont par conséquent progressivement infléchi les comportements. Ceux des grands groupes industriels pour commencer, qui signent régulièrement entre eux des «chartes de conciliation» destinées à privilégier la diplomatie à la guerre de tranchée judiciaire. La pratique contractuelle, de son côté, traduit cette évolution par des insertions plus fréquentes de clauses de conciliation, de recours amiable avant tout procès (passant par une escalade des difficultés au niveau des directions générales), voire à des clauses de médiation, dans lesquelles les parties conviennent a priori qu'elles recourront, en cas de difficultés, à un tiers qui tentera de les rapprocher. Le comportement des juges consulaires a également notablement évolué depuis une dizaine d'années. Il est, en effet, désormais quasi systématique que les juges des Tribunaux de Commerce demandent aux parties, avant toute plaidoirie, si elles ont déjà tenté un rapprochement amiable, sinon si elles n'envisagent pas de le faire, et enfin lorsque la situation paraît bloquée, si elles accepteraient l'idée du recours à une médiation. Nul doute également que les comportements ont largement évolué sous l'influence d'organisations telles que le Centre de Médiation et d'Arbitrage de Paris. Il est vrai que cette organisation réalise un remarquable travail, non seulement auprès des grands groupes et des PME-PMI, mais également auprès des tribunaux, lesquels préconisent d'ailleurs très fréquemment ces médiateurs. L'intérêt du recours à la médiation est de fait multiple Elle offre un moyen de règlement des litiges relativement rapide et peu coûteux. Rapide parce que la médiation s'appuie généralement sur un calendrier de réunions assez dense. Peu coûteux parce que, non seulement, les frais du médiateur (qui plus est partagés entre les parties) restent peu élevés en eux-mêmes, mais surtout parce que, si elle aboutit à un règlement amiable définitif du litige, elle évite tous les frais liés aux procédures judiciaires. Elle offre également un véritable apport diplomatique, une méthodologie du dialogue orchestrée par le médiateur. Aussi permet-elle de réussir là où les deux parties accompagnées de leurs seuls conseils (et de la meilleure volonté du monde) auraient échoué. Enfin, à la différence d'une décision judiciaire qui impose une solution, la médiation offre, elle, un compromis. Ainsi, alors que la décision judiciaire génère couramment frustration, sentiment d'injustice, voire rancoeur chez la partie perdante, la transaction, fruit de la médiation, est un accord amiable en principe satisfaisant pour les deux parties. Cette «sortie par le haut» à laquelle les directions générales ont généralement été associées, loin de créer une rupture plus ou moins irréversible entre les parties, permet au contraire à celles-ci de renouer un dialogue qu'elles avaient rompu, voire de renouer des relations commerciales. Pour autant, la médiation n'est pas magique Elle ne se fera pas sans une véritable volonté des parties de trouver un accord et elle exige de chacune d'elles d'être à même de remettre en cause profondément sa perception du litige. Elle ne sera pas nécessairement possible à tout moment et n'est donc pas une alternative systématique et a priori à tous les contentieux judiciaires. Certaines querelles ont, en effet, parfois besoin d'être totalement vidées pour trouver une issue amiable. Entreprise trop tôt, en présence de parties trop vindicatives, la médiation aboutira certainement à un échec. En d'autres termes, la médiation ne sera jamais aussi efficace que lorsque le contentieux aura atteint son acmé, point d'équilibre survenant plus ou moins tôt selon les cas et qui dépendra essentiellement de la psychologie des interlocuteurs. A partir de là, la médiation constitue un relais alternatif idéal au contentieux judiciaire. Elle permet de déciller des yeux qui jusqu'alors étaient fermés sur des certitudes.

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