Tribunes

Externalisation offshore : cessons de nous voiler la face !

Externalisation offshore : cessons de nous voiler la face !

La mondialisation des services informatiques est en marche. Pour en profiter pleinement et sortir de la pénurie des compétences, les entreprises françaises doivent tourner le dos à une vision trop restrictive de l'externalisation offshore, pour s'engager dans un véritable plan de redéploiement industriel à l'échelle mondiale de leur informatique.

PublicitéUn jour, il faut aller en Chine, le lendemain à Poitiers ou Grenoble. Et le surlendemain, c'est à Marrakech qu'il faut installer son centre externalisé de développements informatiques. À lire les enquêtes régulièrement publiées sur le sujet, tout se passe comme si la problématique de l'externalisation offshore devait se résumer au choix d'une destination. Un choix qui s'effectuerait à tâtons, dans le secret des comités de direction, discrétion oblige. Cette obligation de discrétion a largement contribué à créer une vision simpliste du problème. Dans de nombreuses entreprises, l'externalisation offshore est encore vécue comme une menace par les équipes informatiques, bien que voulue par la direction, confrontée à la problématique de raréfaction des compétences. Dans la plupart des cas, ce conflit d'intérêts a été résolu en déplaçant la responsabilité sur les sous-traitants. Pour être référencés auprès des grands comptes, les SSII et intégrateurs doivent aujourd'hui démontrer leur capacité à externaliser dans une optique toujours globale de compression maximale des coûts. Le marché français approche du point de rupture Mais déplacer un problème n'a jamais permis de le résoudre. Et ce sont aujourd'hui les SSII qui sont confrontées de plein fouet à l'effet de ciseaux provoqué par la pénurie des compétences d'une part, et l'obligation de réduire les coûts d'autre part. D'année en année, la situation s'aggrave. En 2006, le taux de chômage des informaticiens en France flirtait avec la barre des 5%, soit deux fois moins que la moyenne nationale (Source ANPE, 2006). Simultanément, la pression accrue sur les coûts continue de réduire la marge de manoeuvre des entreprises et des SSII, et leur capacité à attirer les compétences expertes dont elles ont besoin. Les deux phénomènes sont intimement liés. Car plus les budgets sont comprimés, moins les rémunérations proposées récompensent la rareté ou l'étendue des compétences demandées. Le risque, c'est celui de l'asphyxie. Même si la profusion de SSII, une spécificité bien française, peut encore faire illusion pendant un certain temps, le marché se rapproche dangereusement d'un point de rupture, où la situation ne sera tout bonnement plus tenable ni pour les uns, ni pour les autres. Revoir en profondeur la structure des coûts Face à une telle menace, il devient urgent de cesser de se voiler la face et de remettre en cause le modèle. Si l'on ne peut pas jouer sur les coûts pour sortir de la pénurie des compétences, il convient de s'intéresser à la structure des coûts et d'évaluer son adéquation à un nouveau contexte de marché mondialisé. Une analyse rapide montre qu'il est nécessaire d'aller au-delà des ratios standards d'évaluation des coûts de maintenance, de migration ou d'intégration, pour réaliser une analyse plus fine de la structure des coûts. Il s'agit d'avoir une idée très précise des délais, des compétences requises, du rapport qualité prix attendu, afin de déterminer au cas par cas le mode d'exécution le plus adéquat parmi les différentes options disponibles. L'objectif, qui est aussi au coeur des démarches d'industrialisation de l'informatique, est d'abord de faire mieux, avant de faire moins cher, en utilisant les bonnes compétences au bon moment et au bon prix. Il ne s'agit pas de choisir une orientation contre une autre, mais d'utiliser tout l'éventail des possibilités offertes par l'évolution de l'industrie des services informatiques à l'échelle mondiale. Mondialiser pour mieux orchestrer À l'étranger, les expériences réussies qui prêchent pour l'adoption de cette démarche d'industrialisation mondialisée sont déjà nombreuses. Les sociétés multinationales implantées dans de nombreux pays ont été les premières à s'engager dans une véritable stratégie de redéploiement industriel de leur informatique. Dans leur philosophie, ces stratégies sont assez proches des concepts de 'lean manufacturing' développés par l'industrie automobile. Chaque sous-traitant ou service interne occupe une place précise dans la chaîne globale de réalisation de l'objectif métier. Il est choisi sur le long terme, pour sa capacité à répondre à l'impératif de compression des coûts, mais aussi en fonction de l'adéquation exacte de ses compétences à la tâche demandée. Dans le monde de l'informatique, et sous l'impulsion des sociétés multinationales, nombre de spécialistes de la sous-traitance offshore et nearshore ont déjà anticipé cette évolution. De plus en plus, ces sociétés affichent des compétences spécialisées par domaine technologique ou fonctionnel, ou par phase de réalisation des projets. Nécessité de connaître l'entreprise ou la langue, complexité de la tâche, tous les paramètres sont pris en compte pour une gestion plus fine des compétences et des périmètres d'intervention de chacun. Vers une logique d'écosystème durable et agile Dans son ensemble, l'industrie informatique mondiale profite donc déjà de la globalisation. Pour être applicable en France, cette approche nécessite d'en finir avec la logique de « l'essai pour voir ». Sans ce préalable, l'externalisation ne peut être envisagée dans toute sa dimension stratégique. Au passage, il est également nécessaire de couper court à une appréciation souvent dévalorisante et fausse du niveau de compétence de l'externalisation offshore. Une fois ces barrières psychologiques franchies, tout l'enjeu pour l'entreprise est de développer un véritable écosystème de sous-traitance agile, pour puiser les compétences là où elles se trouvent. Cette approche de partenariats durables permettra aux sous-traitants et aux services internes à l'entreprise d'apprendre à travailler ensemble, d'élaborer des méthodes et des outils communs, etc. Dans ce processus, les équipes informatiques internes à l'entreprise on évidemment un rôle clé à jouer. A elles d'initier, grâce à leur expérience, les méthodes, les choix technologiques, les processus de développement, qui permettront à l'ensemble des sous-traitants de travailler en cohérence. Loin d'être une menace, l'externalisation offshore est en réalité un atout, aussi bien pour la réactivité et la compétitivité de l'entreprise que pour la valeur ajoutée de ses équipes informatiques. Enrichie par une approche de développement basée sur des cycles courts et un contrôle continu, comme le proposent les méthodes agiles, l'externalisation offshore restitue à l'entreprise maîtrise et visibilité sur ses projets informatiques. Elle offre aussi un autre avantage immédiat et durable, une véritable porte de sortie à la pénurie endémique qui frappe le marché français des services informatiques, par une meilleure exploitation du potentiel de la mondialisation.

Partager cet article

Commentaire

Avatar
Envoyer
Ecrire un commentaire...

INFORMATION

Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.

Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire

    Publicité

    Abonnez-vous à la newsletter CIO

    Recevez notre newsletter tous les lundis et jeudis

    La question du moment
    La politique commerciale de VMware a-t-elle redéfini vos priorités en matière de modernisation des infrastructures ?