Chez Adeo, l'IA s'attaque à la complexité de la supply chain

Le groupe spécialiste de l'habitat a lancé un programme visant à développer des applications d'IA pour optimiser sa supply chain. Avec une démarche progressive pensée pour couvrir ses 18 entités et leurs besoins divers.
PublicitéAvec des enseignes grand public comme Leroy Merlin ou Weldom, mais aussi des marques B2B (comme BricoMan en France), et une implantation directe dans 11 pays, le groupe Adeo masque une chaine logistique étendue et complexe, qui est en elle-même un enjeu d'optimisation majeur pour ce groupe fondé il y a 101 ans. L'activité du spécialiste de l'habitat et du bricolage - 31,5 Md€ de chiffre d'affaires - génère le déplacement d'environ 3 milliards d'éléments par an (dont 2,7 milliards liés au réapprovisionnement des magasins). « Et cette chaine logistique comporte ses propres complexités, en raison de la diversité des produits, de celle des magasins et de la présence d'un canal B2B », indique Pierre Leder, directeur du programme IA et data sur la supply chain au sein du groupe Adeo. L'initiative que dirige le responsable fait partie des trois programmes stratégiques lancés par le groupe sur l'intelligence artificielle, aux côtés de ceux touchant au commerce d'un côté et aux produits de l'autre.
L'objectif central du programme, selon Pierre Leder, qui s'exprimait lors d'une session sur le Google Cloud Summit, le 22 mai à Paris ? Mieux positionner le stock de produits au sein d'un groupe comportant quelque 1200 points de vente, en y immobilisant les quantités les plus faibles possibles, tout en garantissant la qualité de l'expérience client et en préparant l'avenir de la supply chain maison. Et sur un stock représentant plus de 4 Md€, les idées d'optimisation sont multiples. « Nous travaillons dans un métier de centimiers », rappelle le responsable du programme. Façon de dire que, sur de tels volumes, le moindre gain unitaire se traduit par de réels bénéfices pour l'entreprise.
Un club utilisateurs par application
Le programme IA dédié à la supply chain d'Adeo s'appuie sur quatre grands principes : une impulsion donnée par la DSI mais toujours avec l'appui de la direction métier concernée (soit les 5 grands maillons de la logistique : approvisionnements, transports, logistique entrepôts, logistique en magasins et livraison des commandes), le développement de prototypes ciblés pour valider la valeur des cas d'usage, des itérations courtes et une flexibilité dans l'allocation des ressources. « Effectuer des projections ne serait-ce qu'à trois mois est très difficile », justifie Pierre Leder.
Le passage à l'industrialisation est guidé par ce que Romain Respriget, directeur conseil data et IA d'Avisia, cabinet qui accompagne Adeo sur ce programme depuis l'été 2024, appelle la règle des 3U. Soit la fréquence d'utilisation (Used), les capacités d'action offertes par la solution (Utilisable) et la valeur associée à ces actions (Useful). Par ailleurs, lors de l'industrialisation de la solution, Adeo s'efforce d'intégrer les utilisateurs à un club qui va assurer l'ajustement de l'application et ses futures évolutions au fil du temps.
PublicitéSur ce schéma, plusieurs initiatives ont vu le jour. A commencer par une application de prévision de la demande sur les nouveaux produits, testée avec l'entité espagnole de Leroy Merlin. « Trois business units ont depuis rejoint le club utilisateurs », se félicite Romain Respriget. Une seconde application se concentre sur la recommandation d'assortiments en entrepôts, afin d'accroître les livraisons des clients depuis ceux-ci, limitant ainsi la complexité en magasins. Un MVP (Minimum viable product), bâti sur BiqQuery et VertexAI de Google, a été développé, et 7 entités du groupe ont déjà rejoint le club utilisateurs dédié.
Vers un jumeau numérique de l'allocation des stocks
« Mais la première application issue du programme touchait au contrôle des palettes. Elle est en production dans 4 business units et il n'y aucun débat sur sa capacité à respecter la règle des 3U », ajoute Pierre Leder. D'autres applications - comme celle touchant à l'optimisation des circuits d'approvisionnement et des conditions d'achat ou celle dédiée à la détection des ruptures en rayons - sont également nées du programme. Pierre Leder ne cache pas que l'effort a aussi engendré des projets moins aboutis, soit par manque de maturité interne (sur la prévision de transport par exemple), soit faute d'actions de remédiation possible dans l'application (sur les alertes touchant aux délais, qui proviennent quasi systématiquement des transports). « Mais l'un des défis principaux que nous rencontrons consiste à faire simple, car nous nous adressons à 18 entités différentes », souligne le responsable. Ce besoin d'embarquer les différentes BU est intégrée dans la démarche de l'équipe à la tête du programme IA. Via des développements itératifs qui permettent d'intégrer peu à peu les BU, avant d'envisager la généralisation et la création du club utilisateurs.
A ces usages très ciblés (basés sur du Machine Learning ou des algorithmes de simulation), Adeo ajoute deux applications dites cockpit, permettant au groupe de visualiser la situation globale de sa supply chain. La première vise à évaluer le surstock, et ses sources, tandis que le second ambitionne de bâtir un jumeau numérique des stocks à l'échelle du groupe. Si les autres initiatives du programme n'ont pas été freinées par les questions de qualité de la donnée, selon le responsable, les premiers développements sur le jumeau se sont heurtés à cette difficulté, reconnaît-il. Et Pierre Leder de souligner que le data management est le programme stratégique clef de la DSI d'Adeo en 2025.
Article rédigé par

Reynald Fléchaux, Rédacteur en chef CIO
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