Juridique

Vers une LCEN 2.0 pour prendre la mesure du Web 2.0

Le rapport rédigé par deux députés sur le bilan de la Loi pour la confiance dans l'économie numérique préconise l'adoption d'une nouvelle loi pour tenir compte des bouleversements engendrés depuis 2004 par l'apparition du Web 2.0.

PublicitéPrès de quatre ans après l'adoption de la Loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), le législateur devrait plancher sur une nouvelle norme qui prendrait en compte l'apparition des modèles posés par le Web 2.0. C'est du moins ce que prônent les députés Jean Dionis du Séjour (Nouveau centre, déjà rapporteur de la LCEN en 2004) et Corinne Erhel (PS) dans un rapport, présenté ce 16 avril, censé faire le bilan de la LCEN. Selon les rapporteurs, « la loi a été mise en oeuvre de manière assez exhaustive, même si certains décrets n'ont pas été faciles à prendre ». Au-delà des questions relatives au droit de réponse sur Internet ou à la prospection automatique par automate, les deux députés déplorent que l'article 55 - qui prévoyait l'élargissement des numéros verts sociaux aux téléphones mobiles - ait été implicitement abrogé par la loi Chatel cet automne. Surtout, le document présenté aujourd'hui s'attarde sur la distinction entre les notions d'hébergeur et d'éditeur sur Internet, et sur la responsabilité afférente. La loi de 2004 est limpide : les hébergeurs ne sont pas responsables du contenu hébergé chez eux mais doivent agir promptement dès qu'ils ont le signalement d'un contenu manifestement illicite. Mais, précise Jean Dionis du Séjour, « on est frappés par le nombre de contentieux vis-à-vis d'une loi qu'on estime claire. La jurisprudence est variée, elle part dans tous les sens ». Des juges plus sévères avec les hébergeurs Cette application variable du texte adopté il y a quatre ans découle, selon les rapporteurs, de l'apparition récente du Web 2.0 : « L'essentiel du contenu est désormais déposé par les internautes. Le choix des Unes ou de la mise en page est de plus en plus automatisé », expliquent les édiles. De fait, la qualité d'éditeur se raréfie et incite les juges à se montrer plus sévères avec les hébergeurs. En témoigne la récente affaire ayant conduit à la condamnation d'Eric Dupin, le concepteur de Fuzz.fr, pour un billet publié par un internaute. Pourtant, le mis en cause « n'a ni écrit le billet, ni mis en ligne, ni placé dans la rubrique où il apparaissait, observe Jean Dionis du Séjour. Nous considérons donc qu'Eric Dupin est un hébergeur et que le juge des référés a pris une décision qui n'est pas correcte. » La notion d'éditeur explose en vol En parallèle, la justice n'a pas hésité à relaxer Dailymotion, arguant justement de ce que le site n'était qu'hébergeur et n'avait pas à assumer la responsabilité d'un éditeur. Face à cette incertitude jurisprudentielle, « il va falloir légiférer, on n'y coupera pas car les contentieux vont se multiplier. La notion d'éditeur est en train d'exploser en vol. Je porterai le message auprès du secrétaire d'Etat à l'économie numérique [le fraîchement investi Eric Besson, NDLR] : l'architecture de 2000 doit être revue ». En d'autres termes, les rapporteurs appellent à une modification de la loi de 2004 pour que celle-ci redéfinisse plus sévèrement la responsabilité de l'hébergeur puisque celle de l'éditeur a tendance à disparaître. Une mesure qui ne doit pas exonérer les fournisseurs d'accès de prendre leur part dans la lutte contre les contenus illicites. Sur ce point, les députés sont formels : « les FAI ne se sont pas mobilisés, ils n'ont rien compris. On voit bien que le traitement des sites odieux a été sous-traité par les hébergeurs à leur association, l'AFA [Association des fournisseurs d'accès et de services Internet, NDLR]. » Ce transfert ne saurait perdurer, estiment Jean Dionis du Séjour et Corine Erhel, qui proposent de « confier à une autorité administrative, telle que la Cnil ou l'Arcep, le soin de veiller à l'application par les hébergeurs de leurs obligations ». Enfin, le rapport adresse un carton rouge à la France pour sa lutte contre le spam, jugée « carrément insuffisante ». L'Hexagone serait ainsi « l'un des pays les moins organisés » pour combatte les pourriels, et le travail de la Cnil - à travers notamment la mise en place de Signal-Spam - est qualifié de « bricolage ». Les deux parlementaires préconisent alors d'élargir la définition du pourriel aux sujets politiques, associatifs et humanitaires, et de confier à l'Arcep le soin de mener la lutte anti-spam.

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