Le DSI de Uniper profite d'une scission pour basculer vers le cloud


Quand les CIO américains partagent leur vision de l'avenir
Data science, cloud, machine learning et intelligence artificielle sont parmi les thèmes qui vont dominer l'année 2020. C'est du moins l'opinion des DSI interrogés par nos confrères de CIO Etats-Unis. Nous vous proposons de découvrir ici, en Français, ce que les CIO de grandes entreprises...
DécouvrirQuand le fournisseur d'énergie E.ON s'est séparé de son activité de gaz pour en faire une nouvelle entreprise, dénommée Uniper, le DSI de celle-ci a entrepris d'en moderniser l'IT.
PublicitéLa scission d'une entreprise - et de ses systèmes d'information - en deux entités distinctes est un défi, mais l'un de ceux que Damian Bunyan s'estime chanceux d'avoir rencontrés, car cela l'a aidé à défendre les avantages d'une modernisation du SI.
Ce dernier travaillait en tant que directeur des processus pour le fournisseur d'énergie allemand E.ON, quand l'entreprise a décidé de se réinventer en tant qu'acteur des énergies renouvelables, spécialiste des smart grids (infrastructures intelligentes). E.ON s'est alors séparé de ses activités historiques dans le stockage de gaz naturel, l'échange d'énergie et la production d'électricité, en regroupant celles-ci dans une nouvelle entreprise, Uniper, dont Damian Bunyan est devenu le DSI.
En tant que tel, celui-ci a la responsabilité de fournir les systèmes IT utilisés pour gérer et entretenir les centrales électriques, facturer les clients du gaz et supporter les activités de trading.
Au cours des discussions associées à la création de l'entreprise, quelqu'un lui a demandé comment il voyait le rôle de DSI. « Je n'avais pas réalisé qu'il s'agissait d'une question d'entretien d'embauche », relate-t-il, « aussi j'ai répondu un peu à la légère, disant qu'en complément de l'IT, il fallait donner aux DSI des responsabilités côté métier, afin qu'ils en subissent les aléas comme tout un chacun, mais puissent également en exploiter les opportunités. »
De fait, Damian Bunyan est aujourd'hui également responsable du reporting d'entreprise, de la facturation et du back-office pour l'activité de trading d'énergie de Uniper, qui représente un chiffre d'affaires de 100 milliards de dollars US par an.
« Quand je vais courir le week-end, je réfléchis à des cas d'usage que je peux déployer au lieu d'être un DSI qui doit vendre ses services aux collaborateurs et dit ' regardez, j'ai ce data lake, n'est-ce pas formidable ?' », raconte-t-il. De cette façon dit-il, s'il possède certaines technologies dont ses clients internes ne veulent pas dans l'immédiat, il peut lui-même se positionner en tête de file pour leur adoption.
Cette approche l'a aidé à aller plus loin que la supervision de la disponibilité des serveurs et les tickets de helpdesk. « Une simple question d'hygiène », observe-t-il. Il a également ajouté des éléments comme les fonds de roulement à ses indicateurs clefs.
« Durant une réunion de management, nous étions en train de parler du fait que nous avions d'importants fonds de roulement, soit parce que nous n'avions pas facturé assez vite nos clients soit parce qu'ils n'avaient pas payé une facture », raconte-t-il. À ce moment-là, celui-ci s'est dit qu'il pouvait apporter de l'aide sur cet enjeu.
Choisir un cloud et un seul
PublicitéQuand Uniper a démarré ses activités, ses principales applications d'entreprise étaient hébergées dans un data center vieux de dix ans, mis en place par leur ancien propriétaire et désormais concurrent. « Je me suis dit qu'il fallait en sortir », se souvient Damian Bunyan. La question était : pour aller où ?
« Quand vous quittez un data center vieux de dix ans, vous ne cherchez pas un autre data center du même âge pour remettre les choses telles quelles. Vous allez dans le cloud », souligne le DSI. Celui-ci aurait pu passer un temps conséquent à comparer différentes plateformes, application par application, mais au lieu de cela il a décidé de choisir un cloud, peut-importe lequel, afin de tout héberger.
Celui qu'il a retenu était Microsoft Azure, non parce qu'il était meilleur sur le plan technologique, mais parce qu'il avait déjà un contact chez eux et cherchait un fournisseur qui deviendrait un partenaire de long terme.
Damian Bunyan reconnaît volontiers que les grandes plateformes cloud ne sont pas toutes identiques. « Sans doute qu'AWS est le leader du marché sur certaines fonctionnalités, et que j'empêche mon équipe d'accéder à ces technologies de pointe », admet-il. Cependant, les principaux bénéfices du passage au cloud proviennent de choses comme le remplacement de feuilles de style éparpillées par des outils analytiques basés sur le cloud et un data lake d'entreprise, et non pas d'une technologie en particulier.
Ce constat est également valable pour des applications plus spécialisées. Uniper, comme beaucoup d'entreprises allemandes, s'appuie sur SAP pour ses processus Finance, RH et même pour la planification des maintenances sur ses centrales électriques. « Nous aurions pu migrer toutes nos applications SAP dans le cloud SAP », estime Damian Bunyan. « Mais pourquoi faire cela si mon data lake est sur Azure ? »
Mi-2019, Uniper disposait de près de 130 sources alimentant son data lake, incluant son propre système SAP, l'outil de gestion des risques Endur, des données produit provenant de Morningstar et d'autres sources commerciales, qui combinées représentaient des centaines de giga-octets par jour.
Choisir de n'avoir qu'un seul fournisseur de cloud s'est avéré payant pour Damian Bunyan. « Microsoft m'accorde bien davantage d'aide en tant que DSI que quand j'avais la responsabilité de l'infrastructure d'E.ON, même si mon entreprise était alors quatre à cinq fois plus grande qu'aujourd'hui. »
Avec le recul, il considère que les bénéfices de son choix d'aller sur le cloud ont excédé de loin ce à quoi il s'attendait, même s'ils sont difficiles à formaliser. Parmi les bénéfices cachés associés à l'abandon par Uniper du data center d'E.ON figure le fait d'avoir réalisé un inventaire de toutes les applications hébergées dans ce dernier. Informés du coût représenté par leur migration, les utilisateurs ont dans près d'un tiers des cas dit à Damian Bunyan qu'elles n'étaient pas importantes et qu'il pouvait s'en défaire.
Simplifier les postes de travail
Quitter les postes de travail hérités d'E.ON faisait également partie des priorités, ce qui a permis à Uniper de passer à Windows 10 et d'accéder à des outils de collaboration comme Microsoft Teams.
Damian Bunyan se souvient en particulier d'un cas particulier rencontré durant ses premiers jours en tant que DSI, quand il est allé à la rencontre de ses clients internes pour savoir ce qu'ils attendaient de lui.
L'ingénieur en chef d'une centrale électrique dans le sud-est de l'Angleterre disposait de trois PC empilés sur son bureau, les CPU mis l'un sur l'autre, connectés à un écran unique et à un clavier. C'était sa façon à lui de disposer de suffisamment de puissance de calcul pour analyser les données du réseau électrique local durant la nuit, afin de produire un rapport pour la réunion du matin.
Lors de la visite suivante de Damian Bunyan, ces PC avaient été remplacés par un seul ordinateur sous Windows 10, qui affichait en temps réel la production des centrales électriques du Royaume-Uni, en utilisant les données publiques disponibles sur le marché d'échange d'énergie local. « L'information provenait de trois sources sur Internet via l'outil d'intégration de données cloud Talend » explique le DSI. « En bout de chaîne, nous utilisons Tableau pour produire une représentation visuelle de ces données. »
Avec cette visibilité améliorée sur les tendances du marché de l'électricité, les directeurs des centrales ont pu générer un revenu supplémentaire d'un million de livres en quelques semaines, simplement en changeant la façon dont ils mettaient aux enchères leur capacité de production.
De tels exemples contribuent à l'attitude détendue de Damian Bunyan par rapport à son choix d'un fournisseur de cloud. « Les bénéfices obtenus rien que sur ce cas couvrent amplement une hausse éventuelle de 5% des coûts de mon data lake », observe-t-il.
D'autres opportunités prometteuses
La branche de trading de Uniper stocke déjà des données sur les opérations qu'elle a conclues, mais il devient désormais envisageable de stocker et d'analyser de l'information sur les propositions qui ne sont pas acceptées, un volume dix fois supérieur, mais qui peut fournir la clef pour améliorer la profitabilité.
Les usines électriques, tout comme les voitures, nécessitent de la maintenance. Néanmoins, « si vous envoyez une usine au garage pour ce type de service, c'est terriblement coûteux », souligne le DSI. Reculer cette maintenance jusqu'à la prochaine année comptable peut amener un sourire sur le visage du DAF, « mais vous devez être suffisamment certains que vous n'allez pas tomber en panne entretemps », prévient Damian Bunyan.
Scruter les données des capteurs installés dans les usines d'énergie pour effectuer de la maintenance prédictive fait partie des possibilités. Une centrale moderne aura des milliers de capteurs qui remontent des données en temps réel, mais il n'est pas si simple d'équiper des installations plus anciennes construites sans cette technologie. « On pense parfois qu'il suffit d'aller sur Amazon et d'acheter pour 35$ un objet connecté pour la géolocalisation, la mesure des températures, etc., mais quand vous exploitez une centrale électrique où les températures vont jusqu'à 800 degrés et qui est entourée de cinq mètres de béton, obtenir les données peut s'avérer un véritable challenge. »
Damian Bunyan estime être un DSI chanceux, mais il a indéniablement su mettre à profit l'opportunité offerte par la séparation d'Uniper et d'E.ON. D'autres DSI devront créer leur propre chance, en s'emparant des occasions qui surgissent pour transformer ou renouveler l'infrastructure, ou bien en liant plus étroitement leur destin à celui de leur entreprise en tant que telle.
Article de Peter Sayer / CIO Etats-Unis (Adaptation et traduction par Aurélie Chandèze)
Article rédigé par

La rédaction de CIO Etats-Unis,
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