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La Géoplateforme veut transformer la façon de produire et de diffuser l'information géographique

La Géoplateforme veut transformer la façon de produire et de diffuser l'information géographique
Magali Stoll (IGN) : « l’IGN peut être un acteur fédérateur de la donnée géographique de référence, au service des politiques publiques. »

Lancé début 2019, le programme Géoplateforme porté par l'IGN a vocation à mettre en place les briques pour produire, gérer et partager des données géographiques de façon collaborative et ouverte. Il s'inscrit dans un nouveau projet d'établissement, visant à faire de l'IGN un acteur de la donnée au service des politiques publiques.

PublicitéActeur public de référence sur l'information géographique et forestière, l'IGN a pour mission de décrire les territoires français et d'inventorier les ressources forestières nationales. Il élabore et met à jour différents référentiels d'informations géographiques, ainsi que des services associés, comme le site Géoportail. En 2018, l'IGN a dévoilé un nouveau projet d'établissement, à la suite d'une réflexion initiée par la députée Valéria Faure-Muntian (Loire) pour renforcer la maîtrise des données géographiques face aux GAFAM. « Il ne s'agissait pas d'une question de concurrence, mais de la maîtrise de cette information dans un monde très numérique. En effet, la donnée géographique est le socle des politiques publiques », souligne Magali Stoll, Directrice des programmes et de l'appui aux politiques publiques à l'IGN. À cet égard, la manière dont sont définies, produites et mises à jour les données est éminemment stratégique. « Par exemple, sur quels critères définit-on un cours d'eau ? », illustre Magali Stoll.

Le projet d'établissement de l'IGN a pour objectif de le repositionner comme un acteur fédérateur majeur de la donnée géographique de référence, au service des politiques publiques. En effet, de nombreux acteurs produisent des données géographiques en France. « Dans ce contexte l'IGN n'a pas seulement un rôle de producteur d'information à jouer, il peut aussi être un acteur fédérateur. Notre objectif est de mettre en place des outils pour co-produire de l'information géographique. Il s'agit aussi d'établir une gouvernance des données géographiques souveraines, d'aller vers une production collaborative des données géographiques, de faciliter leur diffusion et enfin de donner de l'autonomie aux différents acteurs », explique Magali Stoll.

Un programme inscrit dans la logique d'État-plateforme

Cette évolution répond aussi à la modernisation de l'action publique, en phase avec la démarche d'État-plateforme. « Jusqu'à présent, l'IGN produisait le référentiel à grande échelle (RGE) le plus précis et le plus complet, mais cela nécessitait du temps. En parallèle, les besoins évoluaient plus vite que le référentiel », constate Magali Stoll. Il s'agit désormais d'inverser cette logique. Par exemple, le zonage réglementaire, qui n'est pas forcément produit par l'IGN, peut être mis à disposition plus vite et de façon collaborative. Ces données géographiques ont vocation à être en Open Data dès 2022. « Ainsi, nos partenaires publics comme privés pourront s'appuyer sur ces données pour développer des services, sans nécessité de dupliquer les infrastructures », précise la directrice des programmes.

Le programme Géoplateforme, lancé le 1er janvier 2019, répond à ces nouvelles orientations, pas seulement à travers des outils, mais de façon globale. Soumis par l'IGN au fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP) en 2018, avec le soutien des partenaires potentiellement intéressés, il a été retenu et permettra d'en en cofinancer une partie.

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Jonathan Renault (Pilote du programme Géoplateforme à l'IGN) : « la Géoplateforme a pour but de créer un large écosystème de données et services autour de la donnée géographique. »

Une gouvernance au service de la co-construction

Le programme comporte trois grands axes : le premier est la co-construction et la mise en place d'une gouvernance ouverte. « Nous travaillons avec nos partenaires, sur le court et le long terme. L'IGN porte le dossier, mais à moyen terme, notre cible est d'ouvrir celui-ci à d'autres acteurs, et que ceux-ci puissent être porteurs d'évolutions », indique Jonathan Renault, Pilote du programme Géoplateforme à l'IGN. « Nous travaillons principalement sur deux actions : tout d'abord, il s'agit d'associer les partenaires à la démarche, en ne se contentant pas de les interroger sur leurs besoins, mais en les amenant à porter des projets. Dès l'été 2019, nous avons lancé des ateliers de co-construction de deux journées pleines à chaque fois, avec une trentaine d'acteurs au total. L'objectif était de définir une trajectoire cible. » L'autre volet concerne la mise en place d'une organisation permettant à des acteurs différents de travailler ensemble. « Nos partenaires sont aussi bien des ministères que des régions, voire des communes », précise Jonathan Renault. Il faut aussi déterminer comment répondre aux besoins éventuels qui peuvent apparaître, de quelle façon arbitrer et prioriser certaines briques par rapport à d'autres. « Notre but, c'est d'apprendre et de mettre en place une organisation permettant aux différents acteurs de devenir des parties prenantes fortes de la Géoplateforme. »

Le deuxième axe du programme est le partage d'expérience et la création de communautés. « C'est une manière d'aborder le projet en avançant par petits pas, dans une dynamique d'expérimentation, sur toute une série de sujets fonctionnels et organisationnels. L'idée est de matérialiser le travail ensemble », estime le pilote du programme. « Début 2020, nous avons mis en place un dispositif d'expérimentation, afin de préfigurer différentes fonctionnalités : cinq projets sont en cours dans ce cadre, d'autres en gestation. » Les pilotes sont parfois portés par l'IGN, parfois par des partenaires ou bien par les deux types d'acteurs. « Nous avons par exemple un projet autour du transport à la demande avec la DGITM (Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer) et deux régions, pour définir la meilleure manière de construire une offre de données sur les transports à la demande, avec les acteurs locaux et de favoriser la réutilisation de ses données au travers de services adaptés », illustre Jonathan Renault.

Des APIs pour un socle technique ouvert

Enfin, le dernier volet concerne la construction du socle technique, afin de commencer à mener des projets. « Pour construire ce socle, nous repartons du Géoportail, qui est administré par l'IGN, dans le but de bâtir une infrastructure de stockage et de diffusion des données ouverte », explique Jonathan Renault. C'est un aspect clef pour apporter de l'autonomie et permettre les usages collaboratifs. En effet, pour l'instant, il n'existe pas de pont avec le Géoportail permettant d'assurer la diffusion de données co-construites. « Il faut systématiquement passer par l'IGN pour charger des données dans le Géoportail », précise Jonathan Renault. Dans cette optique, l'IGN a entrepris de renouveler le Géoportail, avec la refonte de la brique servant d'entrepôt de données (un projet qui doit s'achever fin 2021- début 2022), ainsi que la mise en oeuvre d'une plateforme d'APIs au-dessus du système. Ces APIs permettront d'offrir cette autonomie et de faciliter la réutilisation des données. « Les partenaires seront ainsi plus autonomes sur leurs interfaces », pointe le pilote du programme.

En appui sur les briques du socle, il s'agit de favoriser l'émergence de services cartographiques portés par les différents acteurs, comme des portails thématiques sur l'énergie, les bâtiments, l'environnement, ou encore des solutions plus frontales, en fournissant un appui pour le stockage et la diffusion, à travers un système d'APIs. « Le but est de créer un large écosystème de données et services, avec des sites Web intégrant une cartographie très simple et des données aussi homogènes que possible », indique Jonathan Renault. L'IGN envisage ensuite d'ouvrir la possibilité d'effectuer des traitements sur l'infrastructure, voire de développer et proposer des services géolocalisés. « Sur ce point, nous sommes encore au début de la réflexion », précise le pilote du programme.


Le Géoportail fournit l'infrastructure de départ pour construire le socle technique de la Géoplateforme.

Une diversité de partenaires

Dans le contrat avec le FTAP, l'IGN est mandaté pour positionner les premières briques et définir la gouvernance de la plateforme, mais il n'a pas forcément vocation à répondre à tous les besoins. « L'une des finalités de la Géoplateforme est la mutualisation, nous privilégions les fonctionnalités qui ont un sens pour le plus grand nombre d'acteurs possibles. Certains sujets très spécifiques ne sont pas forcément mutualisables », prévient Jonathan Renault.

Si le programme s'oriente en premier lieu vers la sphère publique, des partenariats avec le secteur privé sont également envisageables. « Tout un écosystème d'acteurs privés est susceptible d'intervenir sur le programme », précise Magali Stoll. Certains travaillent comme sous-traitants (actuellement, l'IGN travaille avec Thales), d'autres peuvent fournir des données, comme Enedis qui contribue à la production des plans de corps de rue simplifiés (PCRS) ou Airbus qui orchestre une plateforme assurant la diffusion des données spatiales. Enfin, d'autres peuvent intervenir sur l'exploitation et la valorisation des données, même si la question des modèles économiques associés à la Géoplateforme reste à étudier selon Jonathan Renault.

Accompagner le changement des pratiques

Il faut également prévoir l'interopérabilité avec les autres systèmes, voire des passerelles avec les services d'accès aux données et informations existants, comme le service Sobloo (DIAS) d'Airbus et de ses partenaires pour l'imagerie satellitaire. « Cette question d'interopérabilité se pose aussi avec les acteurs régionaux, qui disposent souvent de leurs propres plateformes pour gérer les données produites localement. Il faut trouver un équilibre, pour déterminer quelles données sont intéressantes à héberger sur la Géoplateforme et quelles données restent au niveau régional », estime le pilote du programme.

Le programme Géoplateforme possède une importante dimension projets, mais il porte également toute une dynamique de transformation. À ce titre, il est particulièrement structurant pour l'IGN. « Ce programme marque l'entrée dans une nouvelle époque, avec un changement de pratiques. Il faut passer au travail ensemble, c'est un état d'esprit à construire. C'est un enjeu difficile, car nous visons différents niveaux d'interlocuteurs, et les freins ne se situent pas toujours au même niveau selon que l'on s'adresse aux directions ou à l'IT par exemple. L'IGN doit faire évoluer son image, pour développer sa crédibilité et obtenir la confiance de ses partenaires », conclut Jonathan Renault.

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