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Chez Siemens Mobility, la GenAI rapproche l'IT des métiers

Chez Siemens Mobility, la GenAI rapproche l'IT des métiers
A la faveur de l'arrivée de la GenAI, la DSI de Siemens Mobility redonne à l'IT un rôle central dans l'entreprise. (Photo : Siemens Mobility)

Chez le fabricant d'équipements de transport ferroviaire Siemens Mobility, l'IA générative modifie les rôles de la DSI et sa relation avec les métiers. Dilek Bocuk, DSI depuis 2022, explique comment elle prépare ses équipes à une réussite à long terme de cette transformation.

PublicitéLorsque Dilek Bocuk a pris ses fonctions de DSI chez Siemens Mobility en 2022, le service IT de la filiale spécialisée en solutions ferroviaires de Siemens fonctionnait comme un prestataire de services interne. « D'un côté, cela semble être une bonne chose, car l'informatique se positionne bien en fonction des coûts, explique-t-elle. Mais d'un autre côté, elle était bel et bien considérée comme ne faisant pas partie de l'entreprise ». Et les équipes IT se comportaient comme telles. Dilek Bocuk s'est donc donné pour mission de changer cette mentalité profondément ancrée dans l'ADN des employés de la DSI. « C'est important, car ce n'est que lorsque l'on a le sentiment de faire partie de l'entreprise que l'on a un sentiment de devoir et d'appartenance », insiste-t-elle.

Or, ChatGPT d'OpenAI est apparu sur le marché à peu près au moment où la DSI a pris ses fonctions. « La technologie a rapidement généré beaucoup d'intérêt dans l'entreprise, raconte-t-elle. Elle a surtout suscité la curiosité des départements spécialisés, ce qui m'a aidé à rapprocher l'informatique du business ». Comme les data sont essentielles à la GenAI, l'informatique a presque automatiquement gagné en importance pour les métiers. Auparavant, elle était vue comme le gestionnaire du matériel professionnel et l'opérateur de back-office qui s'occupait de l'infrastructure invisible pour les utilisateurs : les serveurs, les réseaux et les applications de base. « Avec la GenAI, tout le monde est soudain entré en contact avec l'informatique et elle est devenue tangible, raconte la DSI. Notre objectif est désormais de participer activement à cette évolution ». Mais, pour elle, l'IT doit guider et conseiller, et non tout contrôler. « Tous les défis ne devraient pas être résolus par l'IA, car cela n'a pas toujours un sens économique, précise-t-elle ainsi. À l'informatique, nous devons donc être en mesure de décider, avec les utilisateurs, des solutions d'IA qui ont le potentiel d'être utiles à long terme ».

Maintenir une vue d'ensemble de l'organisation

En dehors de leur savoir-faire technique, les responsables informatiques doivent également être en mesure d'avoir une vision commune avec l'ensemble de l'entreprise. Et cela commence au plus haut niveau de management. « C'est important si nous voulons être sollicités et entendus, explique Dilek Bocuk. Pour ce faire, nous devons parler un langage plus accessible et moins technique. Nous devons apprendre à inspirer, à engager les gens et à les informer sur les avantages et les inconvénients de la GenAI, autant pour ceux qui s'y intéressent déjà que pour ceux qui s'en méfieraient ».

La GenAI offre aux informaticiens l'occasion de se positionner comme des experts et des facilitateurs. « En tant que service IT d'envergure mondiale, nous pouvons évoluer rapidement et ainsi mettre des cas d'utilisation intéressants faciles à maintenir et abordables, à la disposition de tous, ajoute la DSI. De cette façon, les services ou les sites n'ont pas besoin de réinventer la roue. Au lieu de cela, nous pouvons, par exemple, déployer aux États-Unis ou en Allemagne une solution prometteuse développée à Singapour ou en Espagne ».

PublicitéUne solution encore incomplète

Selon Dilek Bocuk, en dépit de toutes les possibilités offertes, il est également important de gérer les attentes de la direction générale. « L'IA ne peut pas résoudre tous les problèmes, mais il existe de nombreux domaines dans lesquels elle peut accompagner le travail humain de manière significative, explique-t-elle. Et l'IT doit aider la direction à comprendre où les connaissances et les compétences humaines sont encore nécessaires, ce qui n'est pas encore possible avec l'IA et ce qui le sera à l'avenir. Nous devons être flexibles. »


Dilek Bocuk, DSI de Siemens Mobility depuis 2022. (Photo : Fotostudio Sauter)

La proximité avec les utilisateurs et une communication constante sont donc essentielles. Il est également important d'organiser des ateliers, des webcasts et des formations pour transmettre les connaissances et faire connaître les nouveaux outils. « Nous devons déterminer le niveau de connaissance des utilisateurs et partir de là », ajoute-t-elle. En montrant des exemples pratiques et simples de la manière dont l'IA peut faciliter le travail quotidien, l'informatique peut faire tomber les inhibitions. Par exemple, le service informatique de Siemens Mobility a organisé des "learning weeks", en collaboration avec la direction de la stratégie, au cours desquelles Dilek Bocuk et son équipe ont proposé des sessions sur l'analyse des données et l'IA. « Nous avons expliqué aux employés et aux cadres comment utiliser les technologies, puis nous avons mis en place un programme de formation générale accessible à tous, que nous déployons à l'échelle mondiale », explique-t-elle.

Un test et une formation à Microsoft Copilot

De cette manière, les services informatiques à tous les niveaux peuvent s'adresser à leurs homologues business dans toute l'entreprise. Fin 2024, par exemple, une session de formation au leadership a eu lieu au cours de laquelle les cadres supérieurs ont appris différents outils d'IA pour créer des podcasts ou des posts sur les médias sociaux basés sur l'IA. Dilek Bocuk peut ainsi demander à certains employés formés de s'occuper de l'adoption de l'IA par d'autres utilisateurs sur différents sites et de les accompagner lors de l'introduction de nouvelles technologies et de nouveaux outils.

En septembre 2024, l'industriel a commencé à déployer Microsoft Copilot pour certains employés qui ont aussi bénéficié d'une formation. « Nous leur avons d'abord enseigné les bases, explique-t-elle. Une fois qu'ils ont eu acquis une certaine expérience, nous les avons formés pour qu'ils puissent progressivement adapter ce qu'ils ont appris et expérimenter. » Quelques mois après ce déploiement, l'équipe de Dilek Bocuk souhaite désormais mener une enquête de satisfaction auprès de ces utilisateurs. Les questions porteront sur l'utilité de l'outil et sur les sujets abordés avec lui. « Nous voulons entre autres savoir si nous avons obtenu la productivité attendue ou si cela a plutôt été vu comme un jeu », précise-t-elle. Son équipe continue de travailler sur la manière dont la valeur ajoutée de ces projets peut être mesurée à long terme.

Une meilleure visibilité de l'IT par le business

En deux ans et demi, l'IT de Siemens Mobility est devenue plus visible par le business, selon la DSI, ce qui a donné à l'IT une image plus forte auprès des employés. « Auparavant, l'IT rimait principalement avec infrastructure et SAP et n'était remarquée qu'en cas d'incident », poursuit-elle. Mais cette plus grande proximité avec les métiers exige également que l'informatique s'adapte. « Dans le domaine de l'informatique, il est particulièrement important pour les équipes IT de comprendre comment les technologies telles que l'IA peuvent être utilisées dans les processus métiers lorsqu'elles conseillent les employés, explique-t-elle. Mais l'IA est une technologie en constante évolution, ce qui exige de la flexibilité de la part des utilisateurs ».

Par ailleurs, la gestion des incidents par tickets, basée sur les accords de niveau de service (SLA), a donné un certain anonymat à l'IT, une forme de protection. « Or, cela n'aide pas du tout avec la GenAI, estime Dilek Bocuk. Il faut interagir humainement. Vous êtes le contact et non plus l'employé derrière l'écran. Et nous formons nos équipes à assumer ce rôle de cette façon. »

Des paroles et des actes

Selon la DSI, pour éliminer les obstacles, il est important de construire et de partager des récits de réussite avec les employés IT et métiers. Cela permet, là encore, de lever les inhibitions et de stimuler l'enthousiasme. « Mais encore une fois, nous devons également gérer les attentes, ajoute-t-elle. La GenAI est si nouvelle et se développe si rapidement que ni les services IT ni les directions métiers n'ont les réponses toutes prêtes ». Les employés et le management doivent être impliqués à parts égales. Les tests menés par l'IT ouvrent la voie à de nouveaux cas d'usage qui démontrent les possibilités de la GenAI pour le business. « Et c'est mon travail de créer ces opportunités de réduire les craintes », poursuit Dilek Bocuk.

Dans ce contexte, la DSI place la gestion du changement en tête de ses priorités. « C'est une question qui se pose depuis des années avec la transformation numérique, mais l'IA accélère la cadence, explique-t-elle. Il est donc de plus en plus important de suivre les évolutions et d'accompagner activement le personnel IT et métier dans ce changement. « L'époque où l'on considérait l'informatique et les métiers séparément est révolue depuis longtemps, ajoute-t-elle. Je fais partie intégrante de l'entreprise et je dois donc assumer une partie de la responsabilité ».

Comprendre les résistances

Et il est important de comprendre d'où vient une possible résistance au changement. « Elle est souvent due à l'expérience passée avec l'informatique, estime Dilek Bocuk. Nous devons aborder ouvertement cette question afin de nous débarrasser de vieux ressentiments qui n'ont plus lieu d'être ». Bien entendu, il est utile de convaincre avec des résultats, de sorte que la coopération avec l'IT fonctionne de manière cohérente. « Je ne peux pas parler d'agilité dans l'IT, par exemple, et devoir attendre quatre semaines pour obtenir un retour d'information de mon équipe, ajoute-t-elle. Nous devons faire ce que nous disons ».

En conséquence, l'équipe dirigeante de Dilek Bocuk sert également de modèle collectif. Elle a pour tâche d'aider à façonner la transformation et de ne pas cacher sa vulnérabilité. « Il est important d'admettre que l'on ne connaît pas la réponse à une question, mais d'indiquer l'on est en train de la chercher ». Une partie de la transformation consiste à se concentrer sur la manière dont les technologies de l'information peuvent contribuer aux évolutions à venir plutôt que de s'attarder sur le passé. « Nous avons affaire à de nouveaux acteurs, les circonstances ont changé et la pression sur l'entreprise s'est accrue, conclut Dilek Bocuk. Nous devrions nous concentrer sur l'avenir et l'IA nous donne cette possibilité ».

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