Auchan écoute ses clients grâce à l'analyse sémantique en SaaS

Le grand distributeur a eu recours à un SaaS d'analyse sémantique pour analyser en détail les verbatims des clients issus des bornes, des contacts directs et des interactions électroniques.
Publicité« La différence entre des commerçants qui vendent à peu près la même chose va notamment reposer sur l'écoute clients » a asséné Jérôme Desreumaux, directeur de la relation clients d'Auchan France. Il présentait l'analyse sémantique des verbatims clients qu'il a mis en oeuvre au sein de ce grand distributeur au cours d'une manifestation organisée par l'éditeur Proxem, le 27 mai 2015 à Paris. Le projet a débuté il y a maintenant près de quatre ans.
Les clients adressent des messages souvent en apparence anodins. Mais, mis bout-à-bout, il peut émerger des signaux faibles ou même des tendances intéressants. Ces messages sont issus en grande partie, chez Auchan, d'un contact direct : à l'accueil du magasin (où le compte-rendu de contact est saisi), via un membre du personnel dans les rayons (avec retranscription sur le « carnet collaborateur »), via des bornes interactives ou via des sources diverses. Chacune de ces sources représente environ le quart du volume. Parmi les « sources diverses », on peut citer les messages sur le site web, les e-mails, les remontées collectées manuellement sur les médias sociaux par les community managers, etc. L'éditeur a précisé : « Proxem peut intégrer automatiquement des sources comme Twitter, des flux RSS, etc. mais cela n'a pas été le choix d'Auchan. » « J'ai voulu limiter les sources automatiques » a confirmé Jérôme Desreumaux. L'objectif d'Auchan est en effet de comprendre les attentes clients dans une perspective plutôt d'avant-vente, pour mieux calibrer son offre.
La rentabilité directe de l'écoute client est avérée
Cependant, certains signaux faibles ont permis d'agir en après-incident pour en limiter la portée. Jérôme Desreumaux a ainsi mentionné le cas d'une amertume anormale de pignons de pin, d'une acidité de feuilles de brick, d'une perte substantielle de qualité de certains yaourts avant la date limite de consommation... A chaque fois, Auchan a pu de ce fait retirer rapidement les produits en cause de ses rayons avant de remonter l'incident au fournisseur et d'enquêter sur la nature exacte du problème.
A l'inverse, un responsable papeterie a accru ses ventes d'agendas de 10% en laissant ceux-ci en rayons jusqu'en février alors que la tendance antérieure était plutôt de les faire disparaître début janvier. L'écoute des demandes ou des réclamations des clients a bien un effet direct sur le chiffre d'affaires !
La Voix des Clients analysée via les récurrences
Tous les messages des clients sont collectés dans le système de relation clients. Toutes les nuits, les verbatims sont extraits et injectés dans la base de données baptisée La Voix des Clients. Le lancement de l'analyse sémantique a lieu sur celle-ci via le SaaS de Proxem. Le résultat est constitué essentiellement d'études de récurrences des concepts (plusieurs clients exprimant des choses proches dans des magasins différents par exemple) avec une catégorisation pour que chaque responsable puisse étudier ce qui le concerne. L'outil permet alors une exploration de la base de verbatims pour remonter à la source des données interpellant le responsable.
Comme il y a à peu près 20 000 messages par mois, une analyse totalement manuelle est impossible. Jérôme Desreumaux s'est souvenu : « quand j'ai exprimé mon besoin auprès des informaticiens, ceux-ci m'ont expliqué qu'il s'agissait d'analyse sémantique. » Un appel d'offres avait été alors lancé auprès des éditeurs. Trois phases doivent être couvertes : le texte mining (passer des textes aux concepts), le datamining (corrélations, récurrences...) et la restitution-visualisation. Or la phase du texte mining supposait chez beaucoup d'éditeurs la création d'un lexique. « Avec 30 000 références en magasin, c'est tout à fait impossible » s'est ému Jérôme Desreumaux. A cela s'ajoute la difficulté des termes polysémiques. Jérôme Desreumaux a pris un exemple : « quand un client dit orange, doit-on comprendre la couleur, le fruit, la ville, l'opérateur télécom dont nous vendons des forfaits... ? »
Lorsque Proxem a fait un démonstrateur de sa technologie sans lexique, il a rapidement convaincu, notamment par sa capacité à distinguer les différents sens d'un vocable. Il était en effet nécessaire que l'analyse soit essentiellement automatique car il ne pouvait être question d'embaucher d'innombrables collaborateurs pour analyser les verbatims.
PublicitéLa gestion de l'ironie perfectible mais possible
Jérôme Desreumaux est très sceptique sur la pertinence -au moins dans le cas d'Auchan- d'une analyse des opinions. Reconnaître si une opinion est bonne ou mauvaise suppose une analyse du sens réel et profond d'une expression. Or l'ironie est complexe à analyser. « Même un être humain a parfois du mal à saisir ce genre de nuances mais c'est tout à fait possible théoriquement de le faire informatiquement » a affirmé François-Régis Chaumartin, DG et fondateur de Proxem. Il revendique un taux de compréhension de l'ordre de 60% à l'heure actuelle et de 80% de compréhension intégrale des verbatims.
Mais une bonne compréhension des verbatims suppose un travail d'analyse statistique préalable d'une grosse masse documentaire du secteur concerné avant de pouvoir passer du projet à la production. L'éditeur a revendiqué une mise en production en quelques jours sur un secteur déjà connu suite à des projets antérieurs et d'environ un mois dans le cas contraire.
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
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