Les assureurs tardent à se digitaliser

Les compagnies d'assurances sont sensibilisées aux technologies numériques, mais tardent à les mettre en place.
PublicitéLe monde de l'assurance aborde la transformation numérique avec plusieurs particularités. « Elles doivent avant tout s'interroger sur leurs leviers de rentabilité » note Gilles Guedj, managing partner assurance chez CSC south & west Europe. Première difficulté, la tension sur cette rentabilité. Les compagnies ont deux sources de revenus, les contrats venus des clients et les placements. Chacune d'elles est fortement pénalisée. Les clients sont moins fidèles, moins « engagés » en jargon marketing. Et les marchés financiers souffrent de taux historiquement bas, les contrats d'assurance vie basés sur des fonds obligataires en euros, ne sont guère rentables. C'est dans ce contexte dégradé que le monde de l'assurance aborde sa nécessaire transformation digitale.
« Ils ont pour nécessité d'évoluer, d'être en capacité de répondre aux attentes des clients, analyse Gilles Guedj. Tous les acteurs du marché, quels qu'ils soient, connaissent les impératifs de transformation. Le passage des intentions à l'action est moins évident. La première transformation est culturelle, dans des entreprises encore peu habituées au changement. La deuxième avec le digital dépend des moyens dont chacun dispose. Le tout avec des résultats financiers sous pression ». Le numérique est donc totalement intégré dans une évolution globale que le secteur doit entreprendre.
Toutes les compagnies n'ont pas la même maturité
Le constat est valable pour tout le monde, même si toutes les compagnies n'ont pas la même maturité, ni la même taille. Certaines sont globales comme Axa, Allianz ou Generali, d'autres de type mutualiste. Mais une entreprise aussi performante qu'Axa est en train de bouleverser ses structures, sous l'impulsion de son nouveau PDG.
Le monde de l'assurance est également soumis à des contraintes qui l'ont fortement impacté, comme la norme Solvancy 2 sur les fonds propres. Elle a favorisé en France des regroupements, en particulier dans le secteur mutualiste. Ainsi se sont créés Covea (rapprochement de MAAF, MMA et GMF, également membre du groupement européen Eurapco), Sferem (rapprochement entre MACIF et MATMUT). D'autres ont échoué, comme le rapprochement entre Malakoff Mederic et La Mutuelle Générale. Une est en projet entre Harmonie Mutuelle et la MGEN.
Certains héritages sont lourds à porter
A chaque fois, l'informatique est très sollicitée, mais l'assurance est encore un fief des mainframes et tout se fait dans un contexte de disette budgétaire. Les infrastructures notamment, sont priées de baisser leurs coûts. Les DSI dans ce contexte ont parfois du mal à dégager un budget pour la transformation digitale, en plus de la modernisation de leurs vieux systèmes et d'éventuelles fusions. Certains héritages sont lourds à porter, non seulement quand les parcs installés sont vieillissant mais quand les structures bloquent, la Macif par exemple est composée de systèmes d'information régionaux différents.
PublicitéN'oublions pas non plus les aspects règlementaires nationaux qui rajoutent des développements supplémentaires, comme le tiers payant, la facilité pour changer de compagnie ou GDPR. Autant de contraintes qui freinent les assureurs, pourtant volontiers enclins à opérer leur transformation numérique.
La DSI n'a plus le monopole des décisions
Une étude du cabinet PAC (sponsorisée notamment par CSC), détaille plusieurs points de cette transformation digitale dans l'assurance. La priorité est donnée à la digitalisation de la relation client. Avec de nouvelles compétences qui sont nécessaires, 43% des assureurs ont d'ailleurs nommé un directeur du digital. « La DSI n'ayant plus le monopole des décisions technologiques », note l'étude. L'innovation est un sujet abordé dans ce secteur, largement au-delà de la vente en ligne, avec la possibilité de conseillers virtuels, les robot-advisors ou des chatbots (conversations en ligne traitées par un programme). Les assureurs ont majoritairement mis en place la vente en ligne, celle sur mobile et s'activent sur les interfaces numériques en agence et les SAV via les réseaux sociaux.
Sur le deuxième sujet, celui des données, l'étude se montre plus critique. L'importance des données est bien perçue par les assureurs, mais très mal engagée. Si les directions digitales, marketing et relation client sont très demandeuses, l'investissement manque, ou alors il reste dispersé. Les assureurs veulent également revaloriser leurs services clients en se donnant la possibilité de proposer de nouveaux services, comme la télésurveillance. Ils le font avec des partenaires en créant des fonds d'investissement ou en entrant directement au capital de start-ups. Un seul exemple, celui de la Macif, qui a créé son propre fonds, Macif Innovation. Elle a investi dans GoMore, start-up danoise de co-voiturage et de location de véhicules, Drust, dans la télématique embarquée pour la conduite et TellMePlus pour l'analyse prédictive.
Article rédigé par

Didier Barathon, Journaliste
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