Frédéric Pichard (TNP) : « la direction générale doit s'emparer du sujet du digital »

La transformation digitale des entreprises implique de prendre acte d'évolutions du contexte mais aussi d'adopter de nouvelles pratiques dont cinq priorités mises en avant par TNP.
PublicitéLe cabinet de conseil TNP a présenté le 4 novembre à Paris les résultats de son étude sur la transformation numérique des entreprises. Cela a surtout été l'occasion de rappeler certaines évolutions importantes du contexte économique devant entraîner de nouvelles pratiques dans les entreprises. « La direction générale doit s'emparer du sujet du digital » a rappelé Frédéric Pichard, consultant pour TNP, qui a présenté l'étude.
Dans la grande majorité des cas, une petite part des projets informatiques peut être considérée comme « digitale ». Moins d'un cinquième des entreprises, selon TNP, aurait vraiment démarré leur révolution numérique. Parmi les évolutions encore en cours, TNP en a isolé trois principales.
Tout d'abord, il y a le détachement des consommateurs vis-à-vis de la possession des biens. Pas de volonté monacale chez les consommateurs : il s'agit juste de privilégier le service rendu sur la propriété en elle-même, d'où un intérêt de plus en plus prononcé pour la location enrichie de services complémentaires. Plus de deux tiers des répondants de l'enquête menée par TNP sont d'ailleurs en train d'adopter des offres davantage orientées services.
To be uberised or not to be uberised ?
La deuxième évolution forte est le danger permanent de l'uberisation, c'est à dire de la possibilité qu'un acteur intervienne brutalement sur son marché avec une vision disruptive. Logiquement, la troisième tendance est la transformation, potentiellement brutale, des chaînes de valeur. Des acteurs historiques peuvent se retrouver fournisseurs banalisés de nouveaux acteurs captant la valeur ajoutée (typiquement : booking.com).
Malgré tout, dans l'étude de TNP, les deux tiers des répondants jugent que la transformation digitale est bien un levier de croissance pour accroître parts de marché ou chiffre d'affaires. Mais une petite majorité estime aussi que la numérisation constitue une contrainte vitale pour garder les parts de marché existantes. On peut donc résumer par : soit je me transforme et je crois, soit j'y renonce et j'entre en déclin. Les répondants estiment dans leur quasi-totalité avoir démarré la transformation digitale de leur entreprise mais celle-ci reste presque toujours embryonnaire ou débutante. La majorité des répondants déclarent avoir commencé la transformation numérique de la relation client, un peu moins l'intégration dans la stratégie. L'implication du management ne concerne au départ qu'un petit tiers des répondants et l'approche collaborative un cinquième.
Cinq priorités
Pour TNP, les entreprises doivent répondre aux défis du numérique en adoptant cinq priorités qui sont autant de changements d'attitudes.
Tout d'abord, il s'agit de renoncer au management pyramidal hiérarchisé qui est par nature incompatible avec le digital. La faible appétence des entreprises pour l'approche collaborative est donc clairement vue comme un handicap.
Les bons talents sont un sujet de rivalité entre entreprises. Pour les attirer, les retenir et en tirer toute la richesse, dans la foulée du point précédent, il faut valoriser les initiatives et partager l'information. Quatre cinquième des répondants jugent nécessaire de mettre ne place de nouvelles méthodes de travail.
Logiquement, cela passe par la simplification des organisations. « La complexité est un frein à l'agilité et à la créativité » a observé Frédéric Pichard. Mais l'évolution vers des outils de management horizontal comme le collaboratif est encore loin d'être universelle.
Face à la menace de l'uberisation, il faut surtout renouveler l'expérience client. Celle-ci doit être fluide, efficace et personnalisée. Pour Frédéric pichard, « toute irritation est une faille où peut s'engouffrer un acteur disruptif ».
Enfin, la meilleure manière d'éviter l'uberisation reste de se l'approprier. Les grands groupes doivent donc adopter des démarches d'innovation ouverte. Ils doivent surtout se rapprocher des start-up voire en créer. Si CIO a souvent parlé de la « start-up interne » de la SNCF, IDTGV/Ouïgo, TNP a préféré mettre en avant Hello Bank, la banque mobile du groupe BNP Paribas. Une telle start-up interne s'appuie sur les actifs existants tout en apportant la démarche disruptive sans pour autant menacer le groupe entier comme si la disruption était venue d'un acteur tiers. Mais moins d'un cinquième des répondants ont une démarche d'innovation ouverte avec une veille tournée vers l'extérieur. Même si près des deux tiers considèrent naturel de collaborer avec les start-up pour accélérer l'innovation...
PublicitéUne révolution numérique limitée à des réformettes
Dans la réalité courante, la plupart des grands groupes ajoutent juste des idées comme le Big Data ou l'omnicanal à leur activité traditionnelle. En particulier, la complémentarité canaux physique et électronique est désirée par les deux tiers des répondants. Certes, ils savent générer de la valeur de ces technologies. Mais ils ne se remettent pas en cause et demeurent par conséquent fragiles face à une possible uberisation.
Pour Jean-Marc Pailhol, de la direction d'Allianz France, le principal problème est de savoir si des acteurs purement digitaux -start-up ou non- peuvent être des partenaires ou bien sont plutôt des concurrents. Typiquement, la question se pose pour Apple ou Google. Pour lui, la réponse est liée à celle apportée à cette autre question : « qui maîtrise la data ? ».
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
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