DSI contre DAF : un nouvel équilibre des pouvoirs autour des projets IT

Les relations entre les directions financières et IT ont été décortiquées au cours d'une réunion du CPI-B2B (Club de la presse informatique B2B) le 16 décembre 2015. Le DAF et le DSI sont, plus que jamais, les meilleurs ennemis de l'entreprise.
PublicitéComment l'informatique fait-elle évoluer une fonction de l'entreprise ? Existe-t-il une guerre de chapelles autour des systèmes d'information ? Ces questions ont fait l'objet d'un débat organisé par le CPI-B2B (Club de la Presse Informatique B2B). Cette réunion a permis un échange entre Bruno Foucault, directeur des relations partenaires chez Unit4 France, Regis Castagné, directeur général chez Equinix France, Valerie Lourme, consultante Finance chez Teradata France et Jean Michel Herbet, directeur des ventes Europe du Sud RH chez Infor.
Pour eux, le DAF est bien souvent pris entre deux étaux : il n'a pas les compétences informatiques qui lui permettent d'accéder aux informations rapidement, alors que, dans le même temps, la pression des marchés et des régulateurs se fait de plus en plus pressante. « Quand les directions métiers demandaient des chiffres, ça prenait parfois six mois à remonter ! », lance Valérie Lourme. Mais depuis deux ou trois ans, la donne a changé pour Bruno Foucault, le DAF intègre des compétences IT, ce qui crée un nouvel équilibre des pouvoirs.
Régis Castagné observe que la DSI devient un centre de profit et moteur de l'entreprise. « Beaucoup d'entre eux sortent de la direction et sont de plus en plus indépendants ». Un avis qui n'est pas partagé par Jean-Michel Herbet : « on voit plutôt des DAF qui reprennent petit à petit la fonction du DSI en gérant les budgets IT ». Cette confusion des genres serait liée au fait que les applicatifs personnalisés dans le cloud deviennent des PGI.
Le DAF et le DSI s'associent face aux métiers
Si l'arrivée de l'informatique avait donnée le pouvoir aux informaticiens, sa démocratisation leur retire. Dès les années 90, les crises ont renforcé le pouvoir décisionnel des directions financières, pour Bruno Foucault. Une tendance qui s'est confirmée jusqu'à repositionner le DSI dans une position au service des métiers.
Une évolution insufflée par les détenteurs du code, ces nouveaux scribes que sont les éditeurs, à partir du moment où ils ont ajouté une composante collaborative aux progiciels. « Il y a encore pas si longtemps, chaque direction avait son Excel Army qui devait fouiller, trouver des liens, entre des milliers de feuilles quand il fallait faire remonter les informations », se remémore Valérie Lourme. En plus du besoin pour le DAF d'avoir la main sur l'information, elle rappelle que les régulateurs les soumettent à des exigences de plus en plus lourdes en termes de traçabilité.
Au delà du réglementaire, la valeur
Au delà cet aspect réglementaire, cette redistribution des cartes créé de nouvelles opportunités. Bruno Foucault prend l'exemple d'un assureur américain devenu analyste financier. L'information financière qui passe entre leur main est vendue en tant que service. Grâce à la BI (business intelligence), le DAF devient un fournisseur d'informations certifiées et un analyste pour l'ensemble du groupe, voire au-delà. Ces informations peuvent devenir utiles de manière opérationnelle pour les métiers, comme dans l'entreprise de logistique qu'évoque Bruno Foucault où le DAF a calculé le coût d'envoi de chaque colis.
Publicité Si les ententes entre le DSI et le DAF tâtonnent encore un peu, il y a bien un point où convergent leurs intérêts. Les métiers ont pris l'habitude de développer leur écosystème indépendamment. En effet, bon nombre d'employés utilisent des applications sans que le département informatique n'ait donné son accord. Ce phénomène de « Shadow IT » oblige certains DSI à prendre des mesures drastiques. L'exemple de Marionnaud est cité où la direction générale a tout simplement interdit à la direction opérationnelle d'aller faire son marché. « Fini les Dropbox ou Salesforce » entendait-on glousser. L'idée est développer des solutions en interne capable de fournir des informations contextualisées, tout en restant connectés à l'ensemble du groupe pour gagner du temps et améliorer la sécurité.
Vers une plus grande convergence
Dans une étude menée par Equinix sur « l'entreprise du futur », celle-ci apparaît de plus en plus « interconnectée et capable de lier les systèmes d'informations », explique Régis Castagné. Cette convergence permettra de ne plus désintermédier la fonction IT. Finalement, l'expert explique qu'en dialoguant et en acceptant le fait qu'ils ont besoin l'un de l'autre, le DSI et le DAF reprennent le pouvoir au métier. « L'un évangélise, l'autre signe les chèques », ironise Bruno Foucault. Pour contrer les Amazon ou Vmware, des entreprises clientes d'Equinix ont créé leur cloud privé, comme l'Oréal ou Engine. Une pratique qui se répand de plus en plus, selon le dirigeant de la filiale française d'Equinix.
Autre tendance : les objets sont normalisés et permettent une plus grande interopérabilité entre un « logiciel maison » et un progiciel. Ce qui aide, par ailleurs, à intégrer plus rapidement les entreprises acquises. Reste à savoir si les entreprises ont intérêt à adopter le même PGI dans toutes les filiales. C'est la grande question pour Jean Michel Herbet, « ce serait même le Nirvana des directions ». Mais tous les intervenants pensent qu'il n'y a pas de PGI capable de gérer tous les domaines avec efficacité, de la banque à la société de transport. Il est plus courant de voir un PGI dominant pour le midmarket et des progiciels synchronisés. Ainsi, les architectures restent « à la maison » mais s'inspirent des usages offerts par le cloud public.
Article rédigé par

Arnaud Pessey, Journaliste
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