Stratégie

Data Asset : comment adopter le Data Driven Business

Data Asset : comment adopter le Data Driven Business
Lors de la conférence CIO « Data Asset » du 14 avril 2016, Thomas Duhard (IFOP), Vincent Godinot (PMU) et Simon Chignard (DINSIC) ont apporté leur témoignage (de gauche à droite sur la photo).
Retrouvez cet article dans le CIO FOCUS n°117 !
Data Asset : maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise

Data Asset : maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise

La maîtrise de la donnée pour générer un maximum de valeur métier : cet enjeu est aujourd'hui essentiel, fondamental, stratégique. Et le DSI se doit de fournir les outils adaptés pour atteindre cet objectif. Les entreprises les plus performantes atteignent même une activité reposant et pilotée par...

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Thomas Duhard (IFOP), Vincent Godinot (PMU) et Simon Chignard (DINSIC) ont témoigné sur le Data Driven Business lors de la Matinée Stratégique CIO Data Asset : Maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise du 14 avril 2016.

PublicitéTransformer son modèle économique ou simplement optimiser sa performance en se basant sur la puissance apportée par les données disponibles : c'est là le principe du Data Driven Business [Activité Conduite par les Données]. Lors de la Matinée Stratégique CIO Data Asset : Maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise, le 14 avril 2016, le sujet a été débattu au cours d'une table ronde réunissant Simon Chignard, Data Editor de la Mission Etalab au sein de la DINSIC (Direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication) et auteur de l'ouvrage Datanomics, Vincent Godinot, responsable BI campagne à la direction marketing du PMU, et Thomas Duhard, Directeur Production et Innovation de l'IFOP.
Le sondage réalisé auprès de la salle grâce à Evals.fr durant la table ronde a montré que la plupart des participants ne s'estimaient pas prêts à adopter une démarche Data Driven Business. Pour un quart, c'était même un concept un peu fumeux. Seul un petit quart était véritablement engagé dans une telle démarche.
Or le Data Driven Business concerne toutes les organisations et pas seulement le secteur privé. Il peut aussi avoir du sens pour le secteur public où les services sont censés apportés de la valeur à la population. C'est pourquoi la DINSIC devait apporter son témoignage sur cette table ronde. Avec 120 agents, cette « DOSI groupe » de l'Etat a un rôle essentiel dans l'optimisation autant des infrastructures que des usages, avec un point particulier sur l'innovation. A côté de services très techniques comme le RIE (Réseau Interministériel de l'Etat), la DINSIC comprend d'autres services tournés vers les usages. C'est notamment le cas d'un incubateur de start-up publiques ou de la mission Etalab. Cette dernière avait initialement en charge la promotion de l'Open Data au sein des administrations. Au delà, il s'agit aujourd'hui de valoriser les données en termes d'usages.

La donnée, actif immémorial de l'Etat

« La donnée a toujours joué un rôle essentiel au sein de l'Etat, depuis bien avant l'invention de l'informatique » a relevé Simon Chignard. Recensement de la population, cartographie à but militaire, collecte des impôts... Tous ces usages immémoriaux reposent sur les données. Mais, comme l'a observé Simon Chignard, « au début, l'Etat cherchait à tirer de la valeur des données pour lui-même seulement. Les plus forts ont toujours été ceux qui levaient l'impôt ! » Plusieurs évolutions majeures ont eu lieu au cours de l'histoire, certaines passant aujourd'hui inaperçues. Ainsi, par exemple, comme Simon Chignard l'a noté, le simple passage, il y a peut-être deux siècles, du registre aux fiches cartonnées a constitué un grand pas en avant vers le traitement des données car celles-ci devenaient plus aisées à consulter, trier, classer, traiter... selon une multitude de critères. Finalement, l'approche actuelle n'est qu'une évolution de cette recherche dans une plus grande valorisation des données.
Or les données de l'Etat ont une vraie valeur pour l'ensemble de la société. Simon Chignard a mentionné un exemple basique : « le numéro d'identification des entreprises, le SIREN, est une vraie donnée de référence qui a une grande valeur pour une grande partie de la société, bien au delà des seules administrations. » Pour que la valeur puisse apparaître, il faut que les données soient disponibles et circulent. La stratégie de l'Etat au travers de la Mission Etalab est donc d'encourager la circulation des données.

PublicitéOuvrir les données stratégiques

En écrivant Datanomics avec Louis-David Benyayer, Simon Chignard avait d'ailleurs voulu expliquer l'importance de cette circulation en brisant tous les silos non seulement techniques mais aussi mentaux. « Quand on parle de datas, on y ajoute souvent un qualificatif comme smart, big ou autre, comme si notre mental était lui-même cloisonné entre les différentes formes de datas » a dénoncé Simon Chignard. L'axe majeur de Datanomics était d'ailleurs celui de la valeur, donc des usages. La données peut être une matière première (qui se vend et s'achète), un levier (qui permet de mieux décider) ou un actif stratégique (qui donne une place particulière à son détenteur dans son écosystème). Simon Chignard a relevé : « l'Etat possède énormément de données qu'il faut classer comme actifs straégiques. »
La future loi sur le numérique, la notion de données stratégiques sera explicitée avec un objectif clair d'ouverture maximale. Cette ouverture peut d'ailleurs permettre à ces données d'acquérir ou de perdre leur caractère stratégique. « Si les données SIRET ne sont pas ouvertes, par exemple, peut-être que, demain, l'identification des entreprises empruntera un autre registre, par exemple les identifiants fournis par Bloomberg » a averti Simon Chignard. La base SIRET, celle des établissements, sera ainsi ouverte gratuitement au 1er janvier 2017, son accès étant jusqu'alors payant.

Une fois la donnée acquise, il faut la valoriser

Une fois la donnée acquise, ouverte, circulante, encore faut-il réellement l'exploiter et en tirer de la valeur forcément liée à l'usage effectué. Depuis 80 ans, l'IFOP collecte de la donnée, c'est là son coeur de métier. L'institut s'intéresse ainsi à la popularité des hommes politiques comme des produits de grande consommation. Mais Thomas Duhard a relevé : « aujourd'hui, le données sont à la fois plus faciles à collecter et plus complexes. » Il est ainsi possible de croiser des données avec des informations exogènes, par exemple issues de l'open-data d'Etat. La popularité d'un produit sera ainsi croisée avec diverses informations géographiques ou démographiques. La satisfaction vis-à-vis d'un produit pourra également être rapprochée de données issues de la GRC du producteur. Dans le cas des opérateurs télécoms, cela permet notamment de prédire de manière plus fiable la tentation d'un changement de prestataire.
Mais cette donnée beaucoup plus riche et complexe ne peut plus être exploitée au travers d'un banal camembert (graphique en secteurs). « Il faut désormais davantage raconter les données, faire ce que l'on appelle du data storytelling » a expliqué Thomas Duhard. Pour l'IFOP, il ne s'agit pas seulement de mieux satisfaire ses clients : c'est une condition de survie, pour garder la main sur son coeur de métier, expliquer les données, bouleversé par la révolution numérique. Pour l'IFOP, cela passe par la création de diagrammes qui n'ont aucun sens une fois imprimés mais qui sont exploitables à la souris, sur écran : ils comportent en effet plus de deux dimensions et naviguer dedans suppose un terminal interactif.

La facilité du Data Storytelling comme avantage business

Ces outils ont été créés initialement pour le secteur bancaire et ont comme particularité d'être très simples à manipuler. « Nos collaborateurs sont pour la plupart des chargés d'études formés à exploiter la donnée, pas des informaticiens » a rappelé Thomas Duhard. Pour les clients de l'IFOP, c'est encore plus important puisque les utilisateurs appartiennent aux directions. Thomas Duhard a exposé : « nous ne mettons pas entre les mains de nos clients les jeux complets de données mais l'essentiel, ce qui peut avoir du sens et de la valeur pour eux. » Cela peut même être également vrai pour le grand public ou pour les médias. « Nos chargés d'études sont très friands de cartographie » a observé Thomas Duhard. L'IFOP a ainsi pu montrer une corrélation entre l'éloignement des services publics (avec un certain isolement induit, et des niveaux de revenus plus faibles) et le vote extrémiste. Cela dit, une simple corrélation mathématique n'est jamais analysée comme un lien de cause à effet sans une étude précise.
Le département Opinion a beau être dirigé par un sociologue sans aucune formation informatique, il est désormais aisé à ce service de faire des analyses et d'émettre des hypothèses explicatives. De même, la communication vers le grand public est un facteur d'image important. La facilitation de l'usage des données est donc clairement une voie d'optimisation de la performance pour l'IFOP. Des éléments tels que l'altitude d'un lieu, la distance d'un service public, etc. sont aujourd'hui disponibles en open-data. Pour l'institut, adopter une visualisation facilitant l'accès aux données était une question de vie ou de mort. Le ROI n'était donc pas vraiment une question.

Toujours justifier par une action métier

Au PMU, qui existe depuis 1930 à partir des efforts de Napoléon 1er pour améliorer la race chevaline (et donc la performance de la cavalerie), le pari mutuel urbain sur les courses hippiques n'est plus le seul business. L'entreprise s'est beaucoup diversifiée, jusqu'au poker en ligne. Vente par téléphone, Minitel, Internet : le PME fait de la vente à distance depuis longtemps. Depuis 2010, le marché du jeu a été grandement ouvert par l'Etat pour le contrôler. Connaître le parieur est évidemment fondamental pour le PMU qui n'est plus en monopole.
« L'observation de la donnée pour observer de la donnée, cela n'apporte rien : il faut avoir un objectif de valeur métier » a jugé Vincent Godinot. Le suivi du chiffre d'affaires, par exemple, est intéressant pour connaître la performance économique de l'entreprise mais, en soi, cela ne sert pas à grand chose. Il faut avoir un objectif métier, un levier d'action, pour justifier et rentabiliser les outils de mesure mis en place. Vincent Godinot a développé : « si vous prenez la température sans avoir accès à des médicaments, cela ne sert à rien. » En l'occurrence, la finalité va être de modifier les comportements de jeux des joueurs.

Veiller à maîtriser ses données

Une méthode classique est de valider une opération marketing auprès d'un échantillon-test par rapport à une population de contrôle. Mais il peut aussi s'agir de corréler des actions avec des règles métier. « Cela ne sert à rien d'inciter des gens à miser davantage s'ils ont déjà atteint un plafond fixé en amont » a pointé Vincent Godinot.
Pour tirer de la valeur de la donnée, il faut maîtriser celle-ci. L'un des risques est d'envoyer des données dans un service externalisé (cloud ou non) ou reposant sur un logiciel et, au final, de ne plus posséder la donnée elle-même ou bien ses modèles d'organisation. « Nous avons été confrontés à de tels cas avec certains ministères qui n'avaient plus la propriété des modèles de leurs données, revendiquée par des éditeurs, rendant ces données inexploitables » a ainsi déploré Simon Chignard.

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