Comment le Big Data révolutionne les entreprises

Lors du Congrès Big Data, les 7 et 8 mars 2016 au Palais des Congrès de Paris, le rôle du Big Data dans la transformation des modèles économiques a été détaillé au travers de nombreux témoignages et interventions.
PublicitéSelon les secteurs et les pays, la maturité des entreprises vis-à-vis du Big Data est plus ou moins élevée et homogène. C'est le premier constat tiré par Elias Baltassis, Directeur Big Data et Analytique du BCG (Boston Consulting Group), en présentant en avant-première une étude sur le sujet au Congrès Big Data qui se déroulait les 7 et 8 mars 2016 au Palais des Congrès de Paris. Le modèle de maturité présenté repose sur 55 critères. Globalement, « la maturité générale est faible et la France est en retard aussi bien sur l'Europe que sur les Etats-Unis » s'est désolé Elias Baltassis.
Mais, malgré sa mauvaise moyenne, la France est très hétérogène, avec quelques entreprises parmi les meilleures mondiales de leurs secteurs. Mondialement, la maturité est plutôt meilleure dans les entreprises moyennes, c'est à dire assez grandes pour disposer de moyens mais assez petites pour rester souples et s'adapter rapidement. Mais les tendances moyennes ne sont pas toujours significatives : si le secteur de la banque de détail est assez homogène avec une bonne maturité, celui des assurances est au contraire très hétérogène avec des entreprises excellentes et d'autres tout à fait médiocres.
L'usage des données personnelles continue de déchaîner les passions. Elias Baltassis a soupiré : « les consommateurs craignent des usages de leurs données qui, en réalité, sont en dessous de leurs perceptions. » Les entreprises, en fait, communiquent fort mal (quand elles communiquent) sur les données dont elles disposent et sur ce qu'elles en font. La confiance est donc très basse alors que c'est un pilier de la relation client.
Le Big Data n'utilise pas que des données personnelles
Mais le Big Data peut révolutionner les stratégies d'entreprises sans pour autant se focaliser sur de réelles données personnelles même si ces données peuvent concerner des personnes. Les témoignages d'entreprises au cours du Congrès Big Data ont été là pour le montrer.
Un excellent exemple a été donné par la SNCF Gares et Connexions. Cette filiale de la SNCF créée en 2009 gère 3000 gares avec trois rôles : patrimonial (2 millions de mètres-carrés dont 180 000 de commerces), d'exploitation (10 millions de visiteurs dont 20% ne prennent pas de train) et de développement de services pour les clients de la SNCF. Si le numérique consiste d'abord à offrir des services comme le wi-fi, le Big Data peut aussi transformer la relation avec les visiteurs comme avec les commerçants louant des boutiques.
Valoriser les espaces commerciaux
La modélisation des flux de personnes dans les bâtiments permet ainsi de valoriser au mieux les espaces commerciaux comme les affichages (comme les horaires et quais de trains au départ au bon endroit et au bon moment). Les données traitées proviennent pour l'instant essentiellement de mesures directes de densité de foule par capteurs mais, à terme, utiliseront également les intensités d'échanges wi-fi.
Le traitement se fait au travers d'outils tels qu'Hortonworks et SAS. « Notre démarche est très pragmatique et progressive » a souligné Arnaud Krekougnan, DSI de SNCF Gares et Connexions. La modélisation a donc suivi un mode test and learn.
De la même façon, Georges Sawaya, DOSI de l'Argus de la Presse, a expliqué comment 27000 médias étaient analysés. Les résultats, y compris des analyses de sentiments, sont ensuite mis à disposition des marques clientes.
PublicitéSe centrer sur le client peut transformer l'organisation
L'exploitation des données en mode Big Data peut aussi permettre de bouleverser la philosophie de l'entreprise, par exemple pour la « centrer sur le client ». C'est ce qu'a fait Rexel, l'un des principaux distributeurs B2B de matériels du secteur de l'énergie dans le monde avec un million de références produits, une présence dans 35 pays et 13,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
L'entreprise a ainsi utilisé le Big data pour sa double transition. La première transition a concerné la diversification de l'activité : passer de l'électricité à tous types d'énergies. La deuxième a été de basculer d'un mode linéaire où le fournisseur pousse ses produits vers des clients finaux via Rexel à un mode centré sur le client où Rexel analyse les besoins de celui-ci afin de lui fournir des réponses appropriées.
Cette deuxième transformation a notamment reposé sur de l'analyse prédictive avec les outils décisionnels de Qlik. « La gouvernance des données est essentielle dans un projet comme celui-ci, réalisé en méthodes agiles avec des cycles de 8 semaines » a insisté Claudio Borlo, DSI de Rexel. Mais aussi sur l'exploitation d'un datalake dans le cloud pour intégrer des données externes (comme la météorologie). Ces analyses ont aussi permis d'optimiser les stocks pour éviter les ruptures comme les sur-stocks.
Big Data et objets connectés
La structuration des données peut être une problématique à part entière. C'est le cas chez Seb. Le spécialiste du petit électro-ménager, présent dans 150 pays et vendant 200 millions de produits par an, s'est lancé dans un consortium visant à structurer les échanges de données sur les recettes de cuisine. L'enjeu peut faire sourire mais les recettes sont à la base des courses alimentaires qui vont être faites comme des modalités de cuisson. Cette structuration intéresse donc autant les distributeurs (avec une logique de courses commandées en ligne et livrées ou récupérées en drive) que les fabriquant d'appareils de cuisson comme Seb.
« La première cocotte-minute, en 1953, a connu le succès parce qu'elle était fournie avec un livre de recettes ; le multicuiseur connecté Cookeo intègre les recettes en son sein » a expliqué Nicolas Valance, pilote innovation de l'atelier digital, au sein de l'activité électrique culinaire du groupe Seb. Si les Cookeo actuels intègrent jusqu'à 300 recettes, c'est évidemment bien peu dans la masse possible, surtout si on inclut les recettes familiales ou individuelles. A terme, l'objectif est donc de construire un format de recettes intelligent qui permette l'échange de données, y compris en ligne au sein de communautés. Intégré avec Sword, l'outil actuel de Seb pour animer ses communautés repose sur le traitement sémantique de Témis et le moteur de recommandation de Coheris. Les outils devraient normalement parvenir rapidement à recommander des recettes en fonction des goûts et des allergies, voire mener du coaching nutritionnel.
Le Big Data au service de la publicité
Une manifestation sur le Big Data ne serait pas complète sans un témoignage dans le secteur de la publicité. La donnée y a acquis une importance croissante ces dernières années et de nombreux acteurs transforment leurs modèles en se basant sur les données.
Fabrice Mollier, DGA Stratégie et Marketing de TF1 Publicité, a ainsi présenté OneData, un outil d'analyse d'audience qui dépasse le classique ciblage socio-démographique (homme/femme, 25-49 ans, CSP+, etc.) pour adopter le ciblage comportemental. L'objectif est donc, dans un premier temps, de cibler, par exemple, les acheteurs de chocolat, voire de vendre le ciblage auprès d'un groupe achetant chaque année une certaine masse de chocolat. « Il ne s'agit plus de s'adresser à des femmes ou des hommes de tel âge mais bien à des acheteurs de telle quantité de chocolat, ce qui représenté x% du marché du chocolat » a souligné Fabrice Mollier.
Pour y parvenir, TF1 Publicité croise des données de panels de consommateurs et de panels d'audience. Parfois, des données d'annonceurs sont également croisées avec d'infinies précautions de la part de ceux-ci (agrégations, anonymisation, intégration chez un tiers, etc.). Il en résulte des profils d'audiences directement intégrés dans le média-planning. Fabrice Mollier a donné comme exemple : « je peux vous dire que 11% des spectateurs du dernier The Voice possèdent une Clio ou que les spectateurs de Koh-Lanta surconsomment des biscuits. » Les données intégrées le sont pour toutes les chaînes de la TNT : comme OneData reste à ce jour unique en France, il faut que les média-planneurs puissent comparer les prix des espaces publicitaires sur la cible visée.
Un deuxième axe a été de renforcer la preuve de l'efficacité de la publicité en associant des données Nielsen sur les sorties de caisse de la grande distribution et les investissements média. Faisant parler les données pour convaincre son auditoire d'investir sur TF1, Fabrice Mollier a ainsi montré que la publicité télévisée accroissait la fidélité et la durée de fidélité mais diminuait l'élasticité-prix (perte de clientèle en cas d'augmentation du prix) et améliorait la résistance à la concurrence.
Le 14 avril 2016, CIO organise sur le même sujet la Matinée Stratégique CIO Data Asset : Maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise.
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
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