Claude Molly-Mitton (USF) : « Nous sommes dans une société numérique qui évolue à vitesse grand V et dans laquelle l'agilité et la réactivité sont les principaux défis des DSI »


La vision des DSI
CIO.Focus (ex-CIO.PDF) fête donc ici son centième numéro. Pour célébrer dignement cet anniversaire, nous avons demandé aux grands acteurs de notre écosystème ce qu'ils retenaient des transformations numériques, celles qu'ils ont vécues ou celles qu'ils anticipent. De Jacques Marzin, DSI groupe de...
DécouvrirA l'occasion de la prochaine sortie de CIO.Focus n°100 (anciennement nommé CIO.PDF), nous avons interrogé des acteurs emblématiques de notre secteur. Claude Molly-Mitton est le président d'un important club d'utilisateurs, l'USF (Utilisateurs de SAP Francophones).
PublicitéCIO : Comment justifie-t-on le coût de l'adhésion de son entreprise à un club tel que l'USF ? Quel est ce coût ? Quels bénéfices peut-on mettre en avant ?
Claude Molly-Mitton : Avant de donner les éléments qui justifieraient une adhésion à l'USF, la meilleure chose à dire, c'est que, en 2014, 100% des adhérents ont re-signé malgré une année compliquée. En outre, nous avons enregistré une croissance de 3,5% des sociétés membres. Même si nous pouvons leur faire dire ce que nous voulons, ces chiffres-là démontrent à eux seuls le retour sur investissement. Le taux de participation aux commissions, qui se réunissent 110 à 120 fois par an, a progressé de 58% entre 2011 et 2014.
C'est très révélateur car il ne suffit pas d'avoir des adhésions, il faut que les gens participent et, malgré la crise, ils continuent donc de venir vers le club. L'un des premiers éléments qui explique cette tendance, c'est l'échange et le partage. Les adhérents gagnent du temps en échangeant sur les bonnes pratiques. Ils apprécient notamment l'absence de discours commercial et marketing.
L'USF est en outre un contre-pouvoir. Le travail d'influence que nous exerçons sur SAP n'est pas à minimiser d'autant plus que nous travaillons à un niveau international. Les clubs d'utilisateurs SAP sont structurés à un niveau mondial. Le gel des taux de maintenance a été obtenu en grande partie grâce à l'USF.
Une des choses dont je suis aussi très fier, ce sont les livrables que nous mettons en place à l'USF comme le dernier livre blanc publié sur l'audit des systèmes SAP. Nous publions maintenant plus d'un livre blanc ou d'une note de perspective tous les deux mois. Ils servent principalement à ceux qui ne peuvent pas venir aux commissions.
CIO : De quelles transformations très concrètes, vécues dans les entreprises ces dernières années, les DSI peuvent-ils être les plus fiers ?
Claude Molly-Mitton : Je pense que la DSI d'aujourd'hui n'a plus rien a voir avec la DSI d'il y a quelques années. La relation avec les métiers n'a plus rien à voir, ce n'est plus une boite noire séparée du reste de l'entreprise. Nous sommes dans une véritable co-création. Il y a d'ailleurs de plus en plus de compétences métiers au sein des DSI. La plus grande transformation est là.
Mais une chose est sûre : elle est bien là. C'est encore plus vrai avec les projets PGI. La DSI ne peut pas lancer seule une refonte totale du système sans impliquer fortement les métiers.
Il faut en outre justifier la valeur des projets et c'est avec ces derniers qu'elle peut y arriver.
CIO : A l'inverse, quels ont été les rendez-vous manqués ?
Claude Molly-Mitton : Pour moi, le rendez-vous manqué, il est du côté de l'éducation. Il n'y a pas assez d'informaticiens et plus encore sur les nouveaux métiers comme les data analystes. Les dirigeants ne sont pas formés à la gouvernance des SI quelles que soient les écoles, aussi prestigieuses soient-elles, qu'ils ont fréquentées.
Le rapport Jules Ferry 3.0 sortie en 2014 donnait des pistes très concluantes mais rien n'a été repris dans les réformes récentes. Cela va peser dans la formation future des cadres de demain et la capacité des futurs dirigeants à comprendre les enjeux des systèmes d'information ».
Nous sommes dans une société numériques qui évolue à vitesse grand V mais mais il subsiste une grande ignorance, voire le mépris, de beaucoup de nos dirigeants, notamment politiques, de la réalité des projets de systèmes d'information et des enjeux pourtant majeurs qu'ils portent.
PublicitéCIO : Quels grands défis les DSI vont-ils affronter dans les prochaines années ?
Claude Molly-Mitton : Les défis pour moi sont l'agilité et la réactivité. Dans la mesure où c'est le business qui sert de locomotive à l'innovation, la DSI doit être capable de répondre le plus rapidement à ces besoins. Nous avons une accélération flagrante des technologies. Si vous regardez les prévisions du Gartner il y a dix ans, le cloud, le big data, l'iPhone, les bases de données en mémoire, tout cela n'existait pas.
Les technologies qui sont aujourd'hui sur le devant de la scène ne figuraient même pas dans les rapports d'un des principaux cabinets d'études il y a peu. Ainsi, il est sûr que plein de choses dont nous n'avons aucune idée vont arriver et qu'il faudra être réactif et agile pour s'y adapter.
La sécurité est également un des grands défis à venir même si ce n'est pas franchement nouveau. Elle va toutefois devenir plus prégnante que jamais, notamment avec les objets connectés. Elle revient dans les top des priorités des DSI.
Si vous prenez deux sujets comme l'internet des objets et l'impression 3D, la sécurité est une préoccupation majeure.
Quels que soient les sujets à traiter, il va falloir être agile, réactif et capable d'apporter la sécurité, même si ces trois objectifs peuvent paraitre complètement antagonistes.
CIO : Quel rôle les médias jouent-ils dans l'information professionnelle des DSI ?
Claude Molly-Mitton : C'est un rôle de veille. Avec internet, toute l'information est accessible mais il nous manque le temps de la trouver et de l'analyser. Aujourd'hui, la presse doit plus s'orienter vers des formats magazine et des dossiers de fond, ce qu'elle fait déjà. L'actualité chaude n'a plus grand sens à l'heure d'internet. L'analyse et la sélection sont primordiales.
CIO : Quel rôle les médias jouent-ils dans la carrière des DSI ? Peuvent-ils progresser en y assurant une certaine présence ?
Claude Molly-Mitton : Évidemment, il est loin le temps où les pages de 01Informatique et du Monde Informatique regorgeaient de petites annonces pour les DSI. En revanche, les médias jouent aujourd'hui beaucoup sur la e-reputation. Les recruteurs regardent ce que vous avez pu écrire ou raconter sur Internet, quels sont les projets que vous avez menés à bien, etc. Ils jouent donc un rôle important dans le recrutement. En revanche, ils ont moins d'importance pour l'évolution en interne.
CIO : Quel rôle les médias jouent-ils dans la promotion et la reconnaissance de la direction des systèmes d'information au sein des entreprises ?
Claude Molly-Mitton : Ce qui est intéressant, c'est que l'on a un rôle d'évangélisation à travers les retours d'expérience et la diffusion de notre parole. Dans une logique de réseau, ils permettent également de partager notre expérience avec nos confrères.
CIO : Quel rôle les médias jouent-ils dans la promotion et la reconnaissance d'un club tel que l'USF ?
Claude Molly-Mitton : Là pour le coup, il est très important. Dans la mission d'influence, même si beaucoup de choses se passent en dehors des médias traditionnels, ils restent un vecteur d'influence majeure et nous aurions tort de les oublier face aux médias sociaux.
Quand j'ai une prise de parole dans les médias, je suis sûr que SAP a des alertes et lit ce que je dis. Les médias permettent de renforcer notre rôle d'influence. La prise de parole publique de l'USF a donc un rôle important, c'est pourquoi elle est complètement maîtrisée.
CIO : Quel serait le "média rêvé" des DSI ? Quelles attentes les DSI ne voient-ils pas satisfaites avec les médias actuels ?
Claude Molly-Mitton : J'utilisais à une certaine époque des agrégateurs de contenus mais moins aujourd'hui. Ce qu'il faut aujourd'hui, c'est de la personnalisation. J'aimerais que les médias soient capables de me proposer ce qui m'intéresse.
Quand je lis CIO, le site devrait savoir ce que j'ai le plus lu et être capable de me proposer des articles en relation avec mes précédentes lectures. Mais il y a le risque d'enfermer le lecteur dans une consommation unique et, donc, de lui fermer la porte à d'autres sujets. Un tel mécanisme doit donc être correctement dosé.
Article rédigé par

Oscar Barthe, Journaliste
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