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Après son rachat, Cash Converters remet à neuf son SI d'occasion

Après son rachat, Cash Converters remet à neuf son SI d'occasion
Cash Converters a migré son infrastructure centrale dans le cloud en moins d'un an, mais garde pour l'instant ses serveurs et systèmes installés directement en magasin. (Photo Cash Converters)

En rachetant Cash Converters fin 2024, le spécialiste du réemploi de l'électronique et de l'électroménager Ecogem a hérité d'un SI trentenaire. En un an, il en a refondu l'infrastructure et les logiciels centraux. Mais il n'a pas touché aux environnements en magasin. Pour son DSI, Benoît Epopi, un code historique cache souvent une expertise métier importante.

PublicitéEn octobre 2024, le spécialiste du réemploi de l'électronique et de l'électroménager Ecogem rachète le réseau de distribution de produits d'occasion Cash Converters et sa soixantaine de magasins en France. Ce faisant, il hérite d'un SI lui aussi d'occasion, aussi âgé que l'entreprise présente dans l'Hexagone depuis 1994. Pour Pureventures, la nouvelle structure réunissant les deux organisations, il n'était pas envisageable de le conserver en l'état. Elle souhaite en effet exploiter au mieux l'activité du réseau de magasins dans une stratégie d'économie circulaire de bout en bout, et dans un second temps, innover dans ce secteur.

Pour autant, pas question pour l'instant de fusionner les SI des deux structures, comme l'explique Benoît Epopi, DSI de PureVentures. Le premier « gère plutôt une chaîne de production et de la logistique, précise-t-il en effet. Les seules passerelles entre les deux concerneraient par exemple la mise en vente d'un appareil réparé par Ecogem sur le site web de Cash Converters. Du point de vue du métier IT, cela revient en quelques sortes à une simple sortie d'entrepôt d'un côté et à un traitement de commande de l'autre ». L'enjeu principal de la transformation du SI de Cash Converters est donc ailleurs. Il revient à migrer vers un SI plus moderne sans pour autant « jeter le bébé avec l'eau du bain », comme le résume le DSI. « Dans ce type de transformation, c'est même le plus gros risque, estime-t-il. On peut avoir l'impression qu'un SI ancien, basé sur des technologies anciennes, est archaïque, alors qu'en réalité, il représente 30 ans d'historique et de savoir-faire métier. Et le code contient des micro-décisions qui sont en réalité de l'expertise métier, très compliquée à reproduire ».

Un audit de 5 mois du SI de Cash Converters

L'entreprise a donc choisi d'abord de changer d'infrastructure, de centraliser les applicatifs de type RH ou finance et les bases de données, sans toucher pour l'instant aux environnements métier. Ces développements spécifiques sont en effet hébergés sur des serveurs directement installés dans chaque magasin. Benoît Epopi a commencé par mener à bien un important audit du SI historique de Cash Converters entre octobre 2024 et février 2025, y compris en reprenant contact avec les prestataires et infogéreurs. « Ce sont des sujets à la fois humains, contractuels et d'infrastructure », rappelle-t-il. L'audit a ainsi conduit, sur les éléments les plus critiques du SI, à la rupture avec certains prestataires et à la recontractualisation avec d'autres.

Mais le DSI n'a pas attendu la fin de la phase d'audit pour poser plusieurs grands principes pour le SI cible, avec des technologies récentes. « Nous avions par exemple une version 9 de PostgreSQL alors qu'on en est à la 17, sur une distribution Linux CentOS 5 , le tout sur des serveurs infogérés on premise, avec un VPN et de la fibre optique, raconte-t-il. Dès l'audit, nous avons voulu prendre plusieurs grandes directions : le cloud, avec davantage de puissance et l'outsourcing de la gestion du système de type AWS ou Scaleway par exemple, pour ne plus se reposer sur des procédures manuelles. Nous avions aussi besoin de beaucoup de ressources, avec une orchestration de type Terraform [infrastructure as code] et de containerisation Kubernetes ».

PublicitéDe gros volumes de données et besoins de puissance

De par la nature même de son métier, Cash Converters traite en effet de très importants volumes de données pour lesquels il est nécessaire de disposer de beaucoup de puissance. « Dans le monde de l'occasion, la description du produit est critique, insiste Benoît Epopi. Nous avons une fiche produit de base pour chaque article, mais nous faisons une distinction claire entre cette notion d'article au sens du e-commerce et la notion de produit ». En plus de la description générique de l'article, chaque fiche produit contient ainsi une photo et un descriptif du produit effectivement en vente, pour l'annonce en ligne et pour le magasin. Le volume de data est d'autant plus gros que l'historique de l'entreprise s'étend sur trois décennies et que Cash Converters a compté à certaines périodes jusqu'à 150 magasins. « Ce sont 30 ans d'historique, soit 2 bases centrales de 120 Go et 60Go dont nous finalisons la migration vers une nouvelle version ».


« On peut avoir l'impression qu'un SI ancien, basé sur des technologies anciennes, est archaïque, alors qu'en réalité, il représente 30 ans d'historique et de savoir-faire métier. Et le code contient des micro-décisions qui sont en réalité de l'expertise métier, très compliquée à reproduire ». Benoît Epopi, DSI de Pureventures (Photo Cash Converters)

À partir de février 2025, Cash Converters s'est attelé au design de son nouveau SI. Selon Benoît Epopi, après un long audit détaillé et avec certains grands principes déjà fixés, il a finalement été assez rapide de redessiner l'infrastructure. Une fois la relation avec les prestataires « détricotée », il n'est resté que quelques services critiques à migrer en central : la donnée client, l'argus de cotes des produits, les fiches articles et les données produits proprement. L'entreprise a finalement choisi de configurer sa nouvelle infrastructure autour d'un cluster Kubernetes et a opté pour Scaleway pour l'instant, plutôt qu'un AWS pour lequel il ne serait « qu'un client parmi d'autres ».

Pas de migration du système en magasin

« Dans notre malheur, nous avons eu de la chance, estime le DSI, puisqu'un des services les plus utilisés est celui des magasins, et il est physiquement installé directement dans ces derniers. Et il a été facile à faire évoluer ». Chaque magasin dispose en effet de son propre serveur avec un client lourd, une base de données et une API locale développée en C++. Il a suffi à l'équipe IT de réinstancier Linux et de connecter et synchroniser ces systèmes et bases de données des magasins avec le SI central. « Nous avons aussi vocation à migrer les solutions des magasins dans le cloud, mais plus tard », explique Benoît Epopi.

Autre étape importante pour atteindre ses objectifs, l'équipe IT a créé un environnement de test, réalisé une photo de la cible qu'il voulait atteindre et testé différentes configurations jusqu'à l'été dernier, puis a lancé la migration effective. Jusque-là, Cash Converters testait ses développements directement sur l'environnement de production. Dès janvier 2025, le DSI a migré toute la gestion des DNS sur Cloudflare, pour des raisons de sécurité, de performance, mais aussi pour des capacités de load balancing qui permettent de router une API d'un serveur à l'autre. Les services associés aux sites web, dont les market places ont été migrés cet été, puis la base de données des serveurs centraux qui agrège les informations d'achat et de vente, les données clients, et un ensemble de reportings et de statistiques. « C'est de cette façon que nous avons migré le coeur du réacteur, raconte Benoît Epopi. Et il ne faut pas oublier que durant toute cette année dernière, nous n'avons pas seulement réalisé une migration technique, nous avons aussi dû apprendre le métier de la vente d'occasion ».

Synchroniser les systèmes aussi pour l'omnicanal

Désormais dotée de serveurs centraux dont elle a récupéré la maîtrise, l'équipe DSI migre progressivement les lignes de code principalement vers du Javascript. « L'idée cible, c'est de migrer vers une architecture de microservices spécialisés métier mis à disposition des employés à la fois en central et en magasin. Aujourd'hui, il reste encore beaucoup de duplication entre les magasins et le système central ». Cette synchronisation des systèmes vise aussi à donner à l'entreprise une meilleure capacité de gestion de l'omnicanalité. « Aujourd'hui, certains produits vendus en magasins restent affichés en vente sur le site, car la désactivation en ligne est effectuée manuellement », explique le DSI.

La transformation du SI a également abouti à la création d'une nouvelle équipe DSI. Depuis le rachat de Cash Converters, elle est passée de 4 à 14 personnes dont 2 product owners, 2 product managers, 8 développeurs qui ont tous au minimum 3 à 4 ans d'expérience . « Nous avons un environnement trop critique, avec trop de stress pour des juniors », précise Benoît Epopi. Deux autres personnes s'occupent du support IT, une fonction essentielle avec une partie essentielle de l'infrastructure qui demeure en magasin. « Nous devions changer l'état d'esprit de la DSI existante », ajoute Benoît Epopi. Après avoir collaboré avec l'ancien DSI, ce dernier a quitté l'organisation, tout comme le reste de l'équipe d'origine qui soit, n'adhérait pas à la nouvelle vision soit ne correspondait pas aux expertises requises.

En attendant l'IA

Un peu moins d'un an après le rachat, Cash Converters dispose donc déjà de sa nouvelle infrastructure centrale, avec une base de données et des services finalisés. L'équipe IT continue de travailler sur les API et la recréation des services métier. La migration devrait s'étendre encore jusqu'à mi-2026, selon le DSI, pour arriver à un SI véritablement proche des standards actuels. Mais l'entreprise a déjà constaté certains bénéfices. Après avoir complètement migré sa market place cet été sur le nouvel environnement, elle a par exemple procédé dès septembre à une refonte graphique très attendue. Elle pilote aussi désormais plus finement son activité avec de nouveaux tableaux de bord et indicateurs grâce à un accès plus complet à la data. Et selon le DSI, certains magasins constatent même une amélioration de la performance sur leurs systèmes depuis le déploiement de Cloudflare en janvier. Et rançon du succès auprès des métiers, ceux-ci réclament de plus en plus de nouvelles fonctions. « En parallèle du sujet purement technologique, nous faisons en sorte d'injecter aussi des quick wins métier quand nous le pouvons », insiste le DSI.

Enfin, Cash Converters s'est lancé dans la refonte à partir d'une feuille blanche de son logiciel de caisse. « Avec notre environnement de test, nous avons facilement recréé le fonctionnement d'un magasin de A à Z, avec les accès réseau, les informations échangées, etc. Et dès juillet, nous avions déjà 80% du logiciel cible, en 4 mois de développement à 4 personnes, raconte Benoît Epopi. Mais une fois que la migration technologique sera complètement terminée, stabilisée, d'ici un à deux ans, nous pourrons commencer à innover ». Avec de l'IA, entre autres, bien entendu. Cash Converters se sert déjà de genAI, pour créer des fiches articles, faire de la modération, retoucher ou générer des photos. Mais l'entreprise a déjà en tête un chantier plus important, à plus long terme. « Nous voudrions exploiter de l'IA pour créer un argus plus fin de nos prix produits, explique ainsi le DSI. C'est le prochain gros sujet, à la fois business et technique, chez Cash Converters ».

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