Stratégie

Sept étapes pour améliorer la collaboration entre IT et métiers

Sept étapes pour améliorer la collaboration entre IT et métiers
Ryan Smith, vice-président et CIO chez Intermountain Healthcare : « si nous demandons aux métiers quels sont leurs problèmes, c'est assez surprenant de voir tout ce que nous pouvons proposer pour les aider. »

Faire tomber les barrières et établir des partenariats entre l'IT et les métiers nécessite du temps et des efforts. Mais les résultats en valent la peine. Cet article adapté de CIO États-Unis propose sept étapes pour mettre en place une telle collaboration.

Publicité« Brisez les silos, constituez des équipes interfonctionnelles, embarquez des partenaires métiers... » Les DSI entendent ces impératifs depuis des années, chacun d'entre eux rappelant la nécessité pour l'IT de travailler main dans la main avec les métiers. Malgré ces conseils qui font quasiment l'unanimité, de nombreux DSI ont encore du mal à faire collaborer efficacement leurs équipes avec les acteurs métiers. Dans un rapport de 2021 publié par l'éditeur Dynatrace, 49% des 700 DSI interrogés ont déclaré que leurs équipes IT et métiers continuaient de travailler en silos. De tels chiffres soulignent une dure vérité : faire tomber les barrières et bâtir des partenariats demande du temps et des efforts. « Ces choses ne se produisent pas par osmose. C'est vraiment un travail difficile, et plus l'organisation et le département IT sont grands, plus cela nécessite d'efforts », affirme Ryan Smith, vice-président et CIO du groupement médical Intermountain Healthcare. Néanmoins, la tâche est loin d'être impossible. Les sept étapes qui suivent peuvent aider les DSI à établir une meilleure collaboration entre métiers et IT.

1. Traquer les problèmes

« Commencez par acquérir une compréhension parfaite de ce qui ne fonctionne pas en vous mettant à la place de vos partenaires métiers », conseille Ryan Smith. « À mon niveau et à tous les niveaux de mon organisation, lorsque nous interagissons avec les métiers, je demande comment ça se passe et s'il y a besoin de quoi que ce soit d'autre tant que je suis là ». Pour Ryan Smith, cette approche directe est nécessaire pour déceler des sujets qui ne sont peut-être pas des priorités absolues, mais qui nécessitent tout de même l'attention du département IT.

« Nous portons toute notre attention sur le sujet en cours, mais les métiers omettent souvent de nous parler du reste. Ils rencontrent d'autres problèmes, et si nous nous arrêtons et prenons un moment pour leur demander, c'est assez surprenant de voir tout ce que nous, à l'IT, pouvons leur proposer pour les aider », dit-il. De plus, prêter ainsi attention aux besoins des métiers, en leur demandant directement leur avis, crée un climat propice à la collaboration avec l'IT pour trouver des solutions, ajoute Ryan Smith. Lui-même utilise cette approche, expliquant qu'il fait des tournées tous les mois, parcourant les différents sites de son organisation pour rendre visite à chacun de leurs dirigeants. Lors de ces rencontres, il leur demande ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Il constate que ces échanges débouchent sur des initiatives où les métiers sont particulièrement réceptifs au fait de travailler avec l'IT pour résoudre un problème. « Cela montre que nous sommes dans la même équipe, que nous nous soucions de leurs problèmes, de leurs objectifs, de leurs stratégies et que nous les traitons comme nos propres stratégies et objectifs. Nous sommes ainsi considérés comme des partenaires et pour eux, cela vaut alors la peine de nous inviter à leurs réunions », dit-il.

Publicité2. Toujours se concentrer sur les résultats métiers

Une fois, Edward Wagoner, CIO chargé du digital chez le fournisseur de solutions pour l'immobilier JLL Technologies, a été approché par un de ses collègues côté métier, qui insistait pour que l'entreprise adopte la blockchain. Le DSI confie qu'il aurait pu se lancer dans la mise en application de cette technologie émergente, étudiant ses avantages, ses défis et les coûts associés à son déploiement. Ce sont, après tout, des points tout à fait valides, qui entreraient en jeu dans des décisions d'entreprise sur une stratégie de blockchain. Mais Edward Waggoner a adopté une approche différente, orientant plutôt la conversation vers ce que son collègue cherchait à accomplir. « Je lui ai demandé de quelle manière il voulait utiliser la technologie », relate-t-il. Empruntant un enseignement courant dans les formations à la vente, Edward Waggoner souligne qu'il est préférable de « toujours parler du problème, le problème du client, pas le produit ». Bien sûr, les questions technologiques feront partie de ces discussions. Mais tout discours sur la technologie devrait éviter les termes à la mode, pour se concentrer plutôt sur « la signification sous-jacente et les opportunités concurrentielles que ces technologies permettent ».

Edward Waggoner explique par exemple comment lui et ses collègues métier collaborent sur des initiatives d'intelligence artificielle. « Il s'agit de les aider à comprendre le volume de données que nous générons via nos systèmes, auquel vont s'ajouter les données provenant d'une nouvelle application d'expérience client que nous avons déployée, ainsi que toujours plus de données marché. Le but est de voir comment nous pouvons tirer parti de toutes ces données pour prendre des décisions », décrit Edward Waggoner. « Quand j'en parle de cette façon, au lieu d'utiliser le terme IA, les interlocuteurs côté métier peuvent vraiment saisir les enjeux. C'est comme cela qu'ils comprennent le potentiel de rupture sur le marché, et qu'ils peuvent ensuite parler de leur domaine aujourd'hui, de vers quoi celui-ci se dirige et des opportunités. »

3. Connecter les employés IT à la valeur métier

Les DSI savent désormais aligner l'IT avec les métiers. Cela fonctionne sans doute au niveau exécutif, même au niveau des managers, mais Kathy Kay, CIO de Principal Financial Group, a constaté que les collaborateurs IT partagent rarement la même perspective et, par conséquent, ne comprennent pas comment leurs contributions ont un impact sur le succès de l'organisation. « Ce dont je parle, c'est le fait de savoir où nous allons en tant qu'entreprise et aussi de la façon dont chacun s'aligne personnellement sur cela. Nous devons nous assurer que tous les membres de l'organisation IT comprennent où va l'entreprise et le rôle qu'ils jouent dans cela », explique Kathy Kay. « Il faut vraiment s'assurer que chacun sait comment il s'intègre dans cette vision. »

Pour la DSI, ce défi est plus difficile qu'il n'y paraît, en particulier pour ceux qui travaillent dans les services partagés et fournissent des briques technologiques de base. « Il est plus difficile pour eux de percevoir ou de connaître l'impact qu'ils ont sur l'entreprise ou les clients. » Kathy Kay se sert d'un événement hebdomadaire le vendredi (« Café avec Kathy »), qui peut attirer plus de 300 participants par session, pour présenter le travail réalisé dans la semaine, détailler les contributions de l'IT aux programmes métiers et mettre en évidence la manière dont l'IT aide l'organisation à attendre ses objectifs. De plus, elle travaille avec ses directeurs et managers sur des façons d'aider leurs propres équipes à comprendre plus en détail comment celles-ci contribuent individuellement à faire avancer l'entreprise.

Cet effort a eu un réel impact sur la performance IT, explique Kathy Kay, ajoutant qu'elle entend moins « je ne comprends pas quelle est la finalité de ceci » chez ses collaborateurs et davantage de conversations sur la façon dont leur travail contribue à des objectifs métiers spécifiques. « Quand les gens comprennent à quel point leurs contributions sont importantes, ils commencent à travailler avec le métier de manière plus collaborative », dit-elle. « Cela ouvre la voie à des échanges qui n'auraient peut-être pas eu lieu dans le passé. Et les équipes IT qui sont plus proches des métiers entraînent ensuite certaines équipes qui étaient auparavant considérées comme de simples équipes de support. Ensuite, celles-ci aussi deviennent des partenaires.

4. Faire équipe avec les métiers

La collaboration au niveau exécutif ne suffit pas, avec des DSI qui indiquent qu'ils doivent renforcer les efforts de collaboration dans l'ensemble de leur organisation. L'enquête Dynatrace pointe des défis dans ce domaine : 40 % des DSI ont déclaré qu'une collaboration limitée entre les équipes BizDevOps perturbe la capacité de l'IT à répondre rapidement aux changements soudains dans les besoins métiers et 40 % pensent qu'une collaboration interéquipes limitée rend plus difficile l'identification de problèmes graves et complique les actions pour réduire son impact métier global. Pour adresser ces enjeux, certains DSI préconisent d'intégrer les employés IT dans les départements métiers afin de créer plus de coopération entre les deux.

Edward Waggoner a vu cette approche fonctionner. Il raconte que lorsqu'il a pris le rôle de CIO, « il y avait pratiquement deux groupes distincts, qui ne se parlaient jamais ». Le métier détaillait ce qu'il voulait, l'IT rédigeait ensuite ses cahiers des charges, « et c'est ainsi que tous deux communiquaient ». Le CIO a introduit un nouveau poste, celui de conseiller technique, occupé par des collaborateurs IT affectés aux entités métiers. Pour ceux-ci, il a cherché des profils avec une solide expérience en technologie, capables de se débrouiller avec les développeurs, mais aussi avec suffisamment d'affinité avec les métiers pour comprendre les problèmes et les défis de ce côté. Par ailleurs, les responsables métiers participent à l'évaluation des performances des conseillers techniques, même si ceux-ci dépendent de l'IT. Edward Waggoner explique que ces conseillers travaillent plus étroitement avec les métiers que les responsables produits ou les postes relationnels typiques, et même davantage que les analystes métiers habituels.

Le DSI a d'abord mis ces postes en place pour les métiers qui rencontraient des défis et cherchaient à changer. « Nous avons identifié ceux qui cherchaient de l'aide, et cela nous a permis de plaider plus facilement pour l'intégration de conseillers », dit-il. Des années après le début du programme, Edward Waggoner affirme que l'IT entend non seulement davantage parler de problèmes et des défis métiers que la technologie peut aider à résoudre, mais qu'il en prend connaissance plus tôt. Il dit que les conseillers « trouvent presque tous les jours des moyens d'utiliser la technologie pour répondre aux besoins des métiers ». Par exemple, une conseillère technique l'a l'appelé à propos d'un plan pour un système de badges de sécurité, et il a noté deux séries de problèmes métiers qu'il avait négligés. « Je n'avais pas cette perspective qu'elle possède en travaillant en étroite collaboration avec le métier », confie Edward Waggoner.

5. Faire ce que l'on dit

« Le but ultime de la collaboration est un partenariat entre les métiers et l'IT, mais celui-ci ne se décrète pas. Vous pouvez dire que vous êtes un leader IT orienté métier, vous pouvez communiquer en termes métiers, mais si les métiers ne vous font pas confiance, il n'y a pas de partenariat. Celui-ci n'arrive qu'en instaurant la confiance et en ayant démontré sa capacité à livrer », explique Eric Sigurdson, responsable de la pratique CIO au sein du cabinet Russell Reynolds Associates. Pour celui-ci, un véritable partenariat survient lorsque l'IT participe aux réunions stratégiques : des discussions sur l'extension des gammes de produits, les fusions et acquisitions ou la valeur pour le client, même si ces réunions stratégiques ne sont pas centrées sur la technologie elle-même. Ce partenariat ne se produit, ajoute Eric Sigurdson, « que si le leader technologique démontre une véritable valeur et permet aux trains d'arriver à l'heure, en garantissant le bon fonctionnement de l'informatique au quotidien.

Pour Eric Sigurdson, cela commence par construire un rapport élevé entre ce qui est dit et ce qui est fait. « Il est très facile dans l'IT de dire à quel point les choses seront formidables, mais de ne jamais parvenir aux résultats promis. Vous devez faire ce que vous dites et l'exécuter avec excellence », déclare Eric Sigurdson. Celui-ci a travaillé avec un DSI recruté par un groupe mondial, chez qui l'IT était coincée dans un rôle d'exécuteur de commandes et où elle n'était pas beaucoup impliquée dans la planification stratégique. Le nouveau DSI s'est attaché à gagner la confiance des métiers en offrant à ses pairs exécutifs une vision plus détaillée sur ses plans, en expliquant comment l'IT pouvait répondre à leurs objectifs et en respectant systématiquement les promesses faites par l'IT. Le DSI s'est efforcé d'instiller ce même objectif d'excellence de la livraison à tous les échelons de son équipe, en rendant ses collaborateurs responsables de cette performance. Ces étapes ont ensuite conduit à des sessions de planification plus collaboratives entre l'IT et les métiers. « Il a travaillé avec les métiers pour hiérarchiser les initiatives IT les plus rentables et déprioriser les projets qui avaient moins d'impact, et au bout d'un an et demi, il a acquis une crédibilité auprès d'eux, montrant qu'il pouvait réaliser ce sur quoi il s'était engagé. Grâce à cela, il a pris de l'importance au sein de l'équipe de direction », a relaté Eric Sigurdson. « Les métiers ont ensuite laissé le DSI participer au processus de planification à des stades plus précoces, lui permettant de collaborer à l'élaboration de la stratégie et du produit. »

6. Pratiquer une agilité bien comprise

Selon Eric Sigurdson, certains DSI occultent la dimension de collaboration requise par les méthodologies de développement agile, DevOps et d'autres approches, afin d'éviter de possibles contentieux ou retours en arrière de la part de métiers rechignant à des réunions fréquentes. « L'Agile exige que les métiers et l'IT s'engagent fréquemment et intensément pour faire avancer un projet », souligne Eric Sigurdson. « Mais dès lors que les équipes métier et IT se parlent tous les jours, cette collaboration peut être à double tranchant. Il y a beaucoup de va-et-vient, et s'entendre dire ce que l'on ne peut pas obtenir au milieu du projet est frustrant. Ce n'est pas toujours facile. Et cela nécessite de la franchise et de solides compétences en communication », observe-t-il.

Mais les modifications limitent fréquemment, voire suppriment, ces interactions collaboratives qui sont essentielles dans ces méthodologies. Ce qui reste alors, c'est du « théâtre agile », affirme Eric Sigurdson. D'autres l'appellent « faux agile ». « Les DSI doivent suivre une formation pour aider à diffuser une méthodologie Agile authentique, par opposition au théâtre Agile, où ils utilisent tous les termes, mais sans embrasser réellement certaines des dures réalités de l'utilisation de ces méthodologies », déclare Eric Sigurdson. « Vous devez vous former, et vous devez former à la fois les métiers et les équipes techniques, afin que tout le monde vienne à table en comprenant ce nouveau paradigme. »

7. Commencer avec des volontaires

Selon le cabinet d'études Forrester, les entreprises les plus matures sur le plan numérique, « prêtes pour l'avenir », connaissent une croissance 2,7 fois supérieure à la moyenne du secteur. Mais les recherches de Forrester révèlent que seulement 8 % des entreprises appartiennent à cette catégorie avancée. 33 % supplémentaires se situent juste en dessous de ce premier niveau, dans la catégorie « moderne », tandis que la majorité (59 %) est coincée dans le stade IT « traditionnelle ». « À ce stade traditionnel, l'IT n'a pas de place à la table des décideurs, elle se plaint d'être traitée comme un fournisseur et il n'y a pas beaucoup de collaboration avec les métiers », indique Bobby Cameron, vice-président et analyste principal de Forrester.

Les DSI qui se trouvent dans de telles situations peuvent - et devraient - trouver des moyens de passer à la catégorie moderne. Mais Bobby Cameron met en garde contre toute tentative de le faire à l'échelle de l'entreprise. Au lieu de cela, il conseille aux DSI de rechercher les domaines métiers qui souhaitent évoluer rapidement et doivent s'adapter, puis de commencer à renforcer la collaboration avec ces derniers. « Ces départements métiers ont cessé de se concentrer sur les coûts, au profit des résultats. Ils se rendent compte qu'ils ne peuvent pas simplement produire des listes d'exigences. Ils savent que la relation avec l'IT doit changer », explique-t-il. En raison du rythme rapide des changements au sein de leurs propres départements, ces métiers ont tendance à être réceptifs à la livraison continue de nouveaux produits technologiques et à adopter l'usage de pilotes et produits viables minimum afin de tester et peaufiner, explique Bobby Cameron. En tant que tels, ce sont de bons candidats pour s'engager dans des méthodologies de développement de type agile. « Rien de tout cela ne fonctionne s'il n'y a pas de collaboration, et grâce à cela, c'est tout le mécanisme de l'organisation qui se met en branle », ajoute-t-il.

C'est pourquoi Bobby Cameron conseille aux DSI qui souhaitent renforcer la collaboration de trouver un comité de volontaires. « N'essayez pas de faire virer tout le superpétrolier d'un coup. Montez dans un hors-bord et réalisez quelques projets probants. Vous trouverez quelqu'un - dans les ventes et le marketing, le service client ou l'optimisation de la chaîne d'approvisionnement - chez qui un désir de modernisation motivé par les coûts offre une opportunité de digitalisation. C'est là que vous trouverez des décideurs métiers prêts à endosser un rôle de propriétaire métier et à participer à tous les stand up quotidiens et aux rétrospectives. C'est là où le métier essaie d'être efficace que le DSI peut entrer pour dire : « Poussons la collaboration d'un cran ». »

Article de Mary K. Pratt / CIO États-Unis (Adaptation et traduction par Aurélie Chandèze)

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