La révolution numérique n'a pas encore eu lieu

Le cabinet TNP a organisé un colloque « Les histoires de demain » le 16 novembre 2017 au Pavillon Vendôme à Paris où les intervenants ont témoigné des avancées et des retards de la révolution numérique.
Publicité« La révolution numérique du travail n'a pas eu lieu : les deux-tiers des collaborateurs travaillent encore dans des organisations à structure pyramidale » a observé Frédéric Pichard, consultant du cabinet TNP, dans son ouverture du colloque « Les histoires de demain » le 16 novembre 2017 au Pavillon Vendôme à Paris. Or, pour lui, les entreprises ont l'obligation de transformer leurs modèles afin de répondre aux besoins d'agilité et surtout au besoin de collaborateurs tournés vers la satisfaction client. Pour cela, le recours à une organisation à hiérarchie aplatie est nécessaire, avec un travail collaboratif en mode projet.
La révolution numérique se révélera aussi au travers d'innovations telles que l'intelligence artificielle. De telles innovations génèrent parfois de la peur, notamment à cause d'un possible remplacement de travailleurs humains par des machines. Mais, pour Frédéric Pichard, cette crainte est infondée : « la machine n'a pas vocation à remplacer l'homme mais à l'aider pour lui permettre de se concentrer sur les actions à valeur ajoutée, grâce à une évidente montée en compétences. »
Une révolution en devenir même si elle a bien commencé
Et c'est là que le bât blesse. Car deux écueils surgissent. Le premier est la difficulté de beaucoup d'êtres humains à suivre le rythme des évolutions, rythme beaucoup plus rapide que tout ce qui a été connu jusqu'à présent. Il en résulte un risque de rejet, d'où, pour Frédéric Pichard, certains résultats électoraux récents dans plusieurs pays. Le second est la naïveté des rêves nés dans la Silicon Valley, rêves qui négligent les mauvais usages possibles des technologies.
Mais les consommateurs et les citoyens n'attendent pas les réflexions philosophiques pour embrasser malgré tout une révolution en cours. « La référence, pour les clients de notre app mobile, ce n'est pas l'app de tel ou tel concurrent mais Amazon, Facebook... Par exemple, j'attends de ma banque qu'elle m'alerte si, en fonction de mon rythme habituel de dépenses et du solde en cours de mon compte, je risque d'être à découvert, pas qu'elle attende qu'il soit trop tard pour m'imposer des frais » a ainsi observé Marc Campi, Directeur Banque en ligne chez BNP Paribas. Pour lui, la transformation digitale est radicale : « ce qui était bien il y a cinq ans est aujourd'hui considéré comme mauvais parce que la référence a changé. »
Action !
Chez Malakoff Médéric, David Giblas, directeur innovation, digital et data, a appelé à passer aux actes plutôt que de continuer à beaucoup réfléchir dans un cadre trop théorique. « Délivrer des services tangibles avec une vraie valeur est mon travail » a-t-il expliqué. Et, pour ce faire, l'organisme de prévoyance aux lourds process se pirate lui-même en instituant des « squads » transverses dont l'objet est de délivrer de nouveaux services concrets en moins de neuf mois.
Mais partir dans tous les sens ne permet pas de garantir la pertinence des actions. Certes, il faut assumer la mécanique du « test & learn ». Mais à condition de tester au plus tôt. Bertrand Cozzarolo, co-directeur de la Stratégie, du Digital et de la Relation Client de la Société Générale, a insisté : « la seule boussole, c'est les attentes des clients. » Pour partir au plus tôt à leur rencontre, les idées sont d'abord présentées aux premiers clients, les collaborateurs, à la cafeteria de l'entreprise. Si ce premier test est concluant, on passe aux « vrais » clients.
PublicitéDes femmes, des hommes, des électrons
Issue de la La Banque Postale, la directrice de la banque digitale, Alice Holzman, a nié l'opposition entre process digital et process humain. Pour elle, « digital ou humain, le client s'en fiche, c'est un continuum. » Mais cette indifférence est un faux-semblant. Car elle a témoigné aussi : « nos jeunes clients nous disent à la fois souhaiter pouvoir tout faire sur mobile et également exiger d'avoir un conseiller humain. » En fait, il s'agit bien de deux aspects différents. Le digital doit permettre d'être rapide dans des process bureaucratiques. Mais l'humain seul reste capable de véritable empathie et de conseil pertinent. « Qu'est-ce qui est important pour vous ? Le bon contact avec mon banquier répondent nos clients » a confirmé Bertrand Cozzarolo.
La digitalisation touche bien sûr aussi l'interne. Par exemple, chez ArcelorMittal, les lunettes de réalité augmentée servent à améliorer les process de maintenance et les capteurs se sont multipliés dans les hauts-fourneaux. Plus classiquement, c'est aussi au travers des outils de collaboration tels que les RSE. « Les 60 000 interactions quotidiennes au sein de notre RSE sont au delà de nos espoirs » s'est réjoui Henri Pidault, directeur de la performance de la SNCF. Les professionnels échangent sur leurs gestes métiers. Henri Pidault en déduit : « le manager n'est plus le sachant mais l'animateur d'une communauté. »
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
Commentaire
INFORMATION
Vous devez être connecté à votre compte CIO pour poster un commentaire.
Cliquez ici pour vous connecter
Pas encore inscrit ? s'inscrire