L'Ille-et-Vilaine en ordre de bataille pour accélérer sa transformation numérique

Pour accélérer sur le numérique, le département d'Ille-et-Vilaine a repensé son organisation, sa stratégie technologique et son portefeuille de projets, mis au service d'une feuille de route ambitieuse.
PublicitéFin 2018, le département d'Ille-et-Vilaine (35) a entamé une démarche de transformation numérique ambitieuse. Lors d'un webinaire organisé par l'éditeur Virage Group le 11 mars 2021, quatre représentants du département sont revenus sur cette transformation : Mona Izabelle, déléguée générale à la transformation, Benoît Moraillon, directeur des systèmes numériques, Dominique Kergosien, déléguée à la stratégie digitale et au numérique responsable et enfin Lisa Garcia, responsable du bureau des projets, ont évoqué le chemin déjà parcouru et les prochains défis.
« Dans le cadre de cette démarche, nous avons travaillé avec la direction générale, les élus et l'ensemble des directions du département », a indiqué Mona Izabelle en introduction. Accompagné par le cabinet Atexo, le département a commencé par un travail de repérage et d'analyse des processus, afin d'identifier les plus porteurs de transformation. Au total, 55 processus ont été étudiés et priorisés, afin de permettre à la direction générale et aux élus d'effectuer des arbitrages. « Nous avons également pris en compte les projets structurants que nous avions déjà démarrés », a précisé la déléguée générale à la transformation. Ce travail a débouché sur une feuille de route chiffrée sur trois ans, avec un budget de 15 millions d'euros et 22 grands projets à mener autour de six axes stratégiques : tout d'abord, simplifier les démarches pour les usagers, en travaillant notamment sur l'accueil multicanal. Ensuite, harmoniser les environnements destinés aux agents, en développant un portail unique servant de point d'entrée pour les applications métiers, les processus RH et la collaboration. Il s'agissait aussi d'optimiser les processus de gestion internes et d'urbaniser le système d'information. « Notre but était de mutualiser certaines briques, pour éviter le cloisonnement où chaque métier a son logiciel propre », a expliqué Benoît Moraillon. De la même façon, l'Ille-et-Vilaine souhaitait décloisonner ses données pour les mettre au service de l'action publique. Enfin, le département avait la volonté de développer la culture numérique, aussi bien auprès de ses agents que des usagers, pour en faire un élément fédérateur. « La question de l'acculturation au numérique est essentielle », a rappelé Mona Izabelle.
Une gouvernance numérique au plus haut niveau
Pour accomplir cette transformation, qualifiée de révolution culturelle et organisationnelle, l'Ille-et-Vilaine a décidé de mettre en place une nouvelle organisation. Le département a ainsi créé un bureau des projets, confié à Lisa Garcia et rattaché à la délégation à la transformation. Ce bureau élabore les plans de charge et assure le lien avec les maîtrises d'ouvrage. « Nous sommes le point d'entrée pour tous les nouveaux besoins numériques à l'échelle du département », a décrit Lisa Garcia. Chacun de ces besoins ayant un impact en termes de ressources, les arbitrages sont essentiels. Dans ce but, le département a aussi prévu une gouvernance numérique au plus haut niveau : l'équipe de Mona Izabelle rencontre régulièrement la direction générale, et un comité de suivi de la feuille de route numérique, comprenant la direction générale et les directions transversales, se réunit tous les deux à trois mois pour faire le point depuis 2019. « Cette instance suit le portefeuille de projets, valide les principales décisions et effectue les arbitrages », a précisé Lisa Garcia. De son côté, le bureau des projets prépare et consolide les informations nécessaires, en lien direct avec les équipes projet, afin d'animer ensuite les instances de décision. L'outil de gestion de projets Project Monitor de Virage Group lui permet d'objectiver les charges de travail, les coûts et de programmer la réalisation des nouveaux besoins. « Notre rôle est aussi de fournir un appui pour le fonctionnement en mode projet, en construisant des référentiels communs, en apportant notre aide sur le cadrage de sorte qu'il soit suffisant en termes d'objectifs, de ressources et d'indicateurs de pilotage », a ajouté Lisa Garcia. Project Monitor facilite la revue du portefeuille de projets et le suivi des budgets affectés à chacun, à travers un lien avec l'outil de gestion financière Bull Coriolis (Atos).
PublicitéAfin de se doter d'une capacité de réalisation à la hauteur de ses ambitions, le département a également choisi de recourir à l'externalisation. Deux marchés publics ont été attribués en 2021, l'un sur la maîtrise d'oeuvre, découpé en six lots, et l'autre sur la maîtrise d'ouvrage, avec un accent important mis sur l'accompagnement au changement. « Le numérique est un sujet sur lequel il faut augmenter les capacités d'une DSI classique, avec toute une force de frappe pour l'assister sur des sujets comme l'accompagnement ou l'UX design », a souligné Benoît Moraillon. La direction des systèmes numériques (DSN) a par ailleurs entièrement repensé son appareil de production en 2020, cherchant à dissocier davantage maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre. « Cette stratégie visait à reprendre en main notre destin technologique. Pendant des années, chaque besoin a été couvert avec un logiciel dédié, ce qui a généré une dette technique importante, ainsi qu'une forte adhérence aux solutions des éditeurs. Les chefs de projets se sentaient quant à eux enfermés dans ce schéma historique », a confié Benoît Moraillon. Pour en sortir, la DSN s'est orientée vers une logique de plateforme, bien plus transversale que dans l'ancien fonctionnement, où un schéma directeur recensait simplement les évolutions des outils, sans véritablement prendre en compte l'impact humain de la transformation numérique. La DSN vise également à être plus agile. Grâce à des approches comme le développement low code, elle ambitionne de pouvoir fournir 80% des services demandés par paramétrage : outils de gestion de la relation avec les citoyens, applications décisionnelles, digital workplace des agents, petites applications métiers et dématérialisation des processus. La direction des systèmes numériques s'est aussi tournée vers DevOps. « L'exploitation a besoin de stabilité, les équipes de développement d'agilité. DevOps nous permet de produire de nouveaux services sans compromettre la sécurité d'exploitation. » Enfin, la DSN veut travailler avec les différents éditeurs fournissant des solutions au département, afin de demander davantage d'ouverture et d'interopérabilité.
Travailler sur l'acculturation
Début 2021, malgré la crise sanitaire et le télétravail, le département a réussi à mettre plusieurs projets sur les rails. « Nous ne sommes pas partis d'une feuille blanche, plusieurs projets existants ont été réintégrés dans la feuille de route en les réalignant sur notre stratégie de plateforme », a expliqué Benoît Moraillon. Parmi ces projets figure par exemple la plateforme open data du département, fruit d'un travail d'une quinzaine de mois, ou le collège numérique. D'autres, réalisés au fil de l'eau, ont permis d'avancer, comme la mise en place du mode projet agile ou la modernisation du système d'information. Au total, une dizaine de projets sont aujourd'hui achevés sur une feuille de route qui en compte désormais près de 70 selon Dominique Kergosien. Certains projets se sont ajoutés en 2020 en raison du contexte sanitaire, comme le déploiement de terminaux portables ou la dématérialisation de certaines procédures. Actuellement, 38 projets sont en cours de réalisation et 13 autres devraient démarrer en cours d'année. Enfin, 9 sont programmés pour 2022. Les projets en cours concernent par exemple la prise de rendez-vous en ligne pour les usagers ou la mise en place d'un portail décisionnel, tandis que les prochains chantiers comptent notamment l'harmonisation de l'accueil numérique pour les 22 CDAS (centre départemental d'action social) d'Ille-et-Vilaine, le dossier social unique ou encore la mise en oeuvre de la fédération d'identités. « L'année 2020 nous a permis de passer un cap sur le numérique et ses usages, notamment en accélérant le déploiement des outils mobiles et de la visioconférence », a observé Mona Izabelle. Elle cite en exemple le cas des équipes de gérontologie qui interviennent sur l'aide personnalisée à l'autonomie : celles-ci ont été équipées de tablettes leur permettant de planifier leurs visites et d'évaluer les dossiers, où qu'elles soient.
Pour la déléguée générale à la transformation, le chemin à parcourir reste cependant encore long et nécessite beaucoup d'humilité. « Nous devons désormais conforter les usages mis en place, en travaillant notamment sur l'inclusion numérique », a pointé Mona Izabelle. Le département compte en effet plus de 150 métiers différents, avec des degrés d'appropriation très différents, et l'équipe réfléchit actuellement à un plan de montée en compétence pour accompagner tous ces collaborateurs. « Il nous faut aussi ajuster nos ambitions, en intégrant de façon plus claire certains aspects, comme le numérique responsable », a-t-elle complété. Pour Benoît Moraillon, l'année qui démarre sera quant à elle déterminante pour démontrer que les capacités de production mises en place permettent de fournir plus rapidement les services. De son côté, Lisa Garcia évoque le déploiement d'indicateurs et de tableaux de bord pour le suivi des projets, mais aussi pour mesurer les gains obtenus.
Article rédigé par

Aurélie Chandeze, Rédactrice en chef adjointe de CIO
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