Tribunes

Les nouvelles technologies au service de l'éducation et de la formation professionnelle

Les nouvelles technologies au service de l'éducation et de la formation professionnelle

Où en est la formation en ligne en France ? De l'émergence de ces nouveaux dispositifs de formation aux facteurs clés de succès des e-formations, en passant par la richesse des développements actuels, voici comment le « e-learning » répond aux nouveaux impératifs de l'économie de la connaissance.

PublicitéA la fin des années 90, les gourous de l'Internet annoncèrent à qui voulait l'entendre la déferlante d'une nouvelle "killer application" des technologies de l'information : le e-learning. Sa progression présentée alors comme fulgurante promettait de révolutionner toutes les pratiques connues en termes d'enseignement, de formation professionnelle et de pédagogie éducative. La démonstration s'appuyait alors sur des taux de croissance vertigineux de ce nouveau type de formation aux Etats-Unis, en omettant de préciser que les chiffres cités ne concernaient que la formation aux logiciels informatiques ! Le coup de grâce était donné aux sceptiques par l'énumération impressionnante des avantages supposés de ces nouvelles manières de se former. Il est vrai que le développement exponentiel de l'Internet d'une part et de l'équipement informatique des ménages d'autre part rendait l'argumentation séduisante et crédible ! L'euphorie a tourné court avec le dégonflement de la bulle Internet, la liquidation de nombreuses sociétés opérant dans ce secteur et le retrait de grands acteurs de la formation professionnelle qui, en France, ont englouti des millions d'euros dans le développement de séquences de formation multimédia, au graphisme irréprochable... mais qui n'ont jamais trouvé leur marché. Dans le même temps les spécialistes des sciences de l'éducation mettaient en évidence la difficulté à concevoir, produire et animer ces nouveaux dispositifs d'apprentissage. En effet, comment par exemple, concilier l'individualisation nécessaire des parcours de formation et la nécessité économique d'une diffusion massive de ces "produits" ? La réflexion sur les processus cognitifs a alors abouti à développer des modèles de scénarisation si complexes et une granularité des contenus si fine, qu'aucun modèle économique pérenne ne pouvait correspondre à ces "nouveaux" impératifs pédagogiques. Ces contradictions étant renforcées par le fait que la grande majorité des contenus de formation évoluent en permanence au rythme des progrès de la connaissance et de celui des possibilités technologiques. Pragmatisme et réalisme ou le second souffle des formations en ligne Cette révolution de la diffusion du savoir semblait donc avoir tourné court. Pourtant, ces deux dernières années nous assistons à un renouveau de l'offre de formations en ligne. Pragmatisme et réalisme semblent caractériser ces nouveaux dispositifs au-delà même de leur très grande diversité. Le blended learning du monde universitaire Le développement le plus conséquent de contenus e-learning provient aujourd'hui du monde de la formation initiale, proposés au sein des universités et des écoles supérieures de commerce et de gestion. Ces acteurs proposent des formations mixtes (blended learning) qui associent dans des proportions variables, présentiel et e-learning. Les contenus de formation disponibles en ligne sont destinés à préparer le présentiel ou à le prolonger en mettant à disposition des étudiants des ressources complémentaires. Ces modalités peuvent s'accompagner d'un tutorat asynchrone de la part des enseignants, le plus souvent au moyen du courrier électronique, plus rarement par le biais de forums dédiés. L'objectif de ces dispositifs mixtes est d'enrichir l'acte de formation présentiel. Ils permettent accessoirement de mettre à disposition des étudiants salariés, de plus en plus nombreux, des ressources indispensables à leur réussite. Plus marginalement, quelques dispositifs de formation utilisent le présentiel pour préparer la formation à distance. Dans ce cas, l'essentiel de l'apprentissage s'effectue en ligne. Cette offre de formation à distance proposée par les institutionnels de la formation initiale possède un certain nombre de caractéristiques communes en rupture avec les modèles antérieurs de e-formation : - les contenus et les dispositifs sont développés au sein des institutions par des cellules spécialisées coordonnant le travail des enseignants et assurant assistance et maintenance technique ; - les enseignants sont partie prenante de la conception, de la réalisation, voire de la mise à disposition des ressources. Les outils de type "rapid learning" sont de plus en plus fréquemment utilisés et maîtrisés par les enseignants qui se transforment pour l'occasion en auteurs ; - la logique d'enrichissement des connaissances, la didactique, l'emporte sur les considérations pédagogiques ; - les technologies utilisées sont simples et accessibles, tant du point de vue du producteur que de celui de l'utilisateur des ressources, le temps des plateformes de formation "usines à gaz" semble bien révolu. Les pratiques des entreprises et des pure players Mais le renouveau des e-formations provient également d'autres acteurs, comme les grandes entreprises, notamment dans les secteurs de la banque et de l'assurance. Là, il s'agit de former un grand nombre d'utilisateurs à l'occasion du lancement d'un nouveau produit ou d'une nouvelle procédure. Ces formations "métier" ponctuelles côtoient des formations transversales destinées à l'ensemble des personnels, relatives par exemple, à la sécurité ou à la prévention des accidents du travail. Comme dans le monde universitaire, les contenus de formation sont le plus souvent développés en interne par le service formation, parfois assisté d'un prestataire externe qui conseille en amont et/ou package technologiquement les réalisations. Ces dispositifs d'autoformation s'appuient souvent sur la présence d'un référent interne capable de répondre aux différentes questions que se posent les apprenants. A défaut d'être exhaustif sur le développement actuel des formations en ligne, il est difficile de passer sous silence les évolutions en cours pour les "pure players" du e-learning. Dans le contexte français, après l'épuration du marché consécutif au dégonflement de la bulle internet, les acteurs vivant principalement des recettes du e-learning ne sont pas légion. Ces intervenants proposent principalement des contenus de formation professionnelle en langues, bureautique et informatique pour l'ensemble des personnels utilisateurs de ces compétences. Parfois, il s'agit de contenus spécialisés en management à destination des cadres. Les dispositifs de formation sont variés, allant de l'autoformation au moyen de contenus scénarisés à l'ergonomie sophistiquée permettant des parcours individualisés, aux web séminaires qui reproduisent à distance l'action de formation présentielle traditionnelle. Ces dispositifs sont éventuellement complétés par un tutorat synchrone ou asynchrone dispensé par courrier électronique, forum, téléphone et plus récemment SMS. L'avenir prometteur des formations en ligne ? Le bouillonnement actuel des expériences en matière de formation en ligne autorise un certain optimisme quant à l'avenir des formations en ligne. Ces nouveaux modes de transmission des savoirs sont porteurs d'un gisement d'avantages : - elles permettent la baisse du coût de formation dans une période caractérisée par une paupérisation de la formation initiale publique et par une rationalisation croissante des budgets de formation professionnelle des entreprises. La baisse des coûts n'est pas un objectif en soi, elle doit permettre l'accès à la formation au plus grand nombre, ainsi que l'amélioration qualitative de l'offre de formation ; - elles correspondent mieux aux contraintes de disponibilité des individus et à la contraction du temps économique pour les organisations ; - elles apportent dans le domaine de la formation une réponse à la demande sociale d'individualisation et rendent possible la formation tout au long de la vie. Lutter contre les freins ! Pour autant, ce succès annoncé ne se produira qu'à la condition d'éliminer un certain nombre de freins. En premier lieu, les individus, dans le rôle d'apprenant ou celui de formateurs doivent relativiser d'une certaine manière leur expérience éducative passée. Il n'y a pas une bonne et unique façon d'apprendre et de faire apprendre. Les modèles d'apprentissage sont une construction permanente, faite de tâtonnements, d'ajustements, de retours en arrière parfois. La pluralité des dispositifs de formation, leur possible métissage est une richesse inestimable au service de la diversité des processus de cognition. En second lieu l'offre de e-learning quelle que soit son origine doit continuer à s'affranchir du "diktat des technologies" souvent lourdes, toujours coûteuses et jamais pérennes ! Il faut évoluer vers la simplicité de la conception et de la réalisation pour que les enseignants et les formateurs puissent facilement se les approprier et ainsi participer à l'élaboration de contenus non figés, évolutifs donc et caractérisés par un haut niveau de créativité. Les e-formations doivent aussi s'affranchir du "diktat du bon modèle pédagogique" imposé de fait par les modes conceptuelles qui rythment la recherche en sciences de l'éducation. Le reproche qui consiste à dire que les e-formations ne tiennent pas compte des spécificités du fonctionnement de chaque individu en situation d'apprentissage est particulièrement irrecevable. C'est en effet oublier que le système éducatif initial repose sur la gestion collective des groupes et que l'échec est patent dés lors que l'on doit apporter une réponse individualisée ! Enfin, et c'est probablement la seule règle d'or de ce nouveau métier, nous ne devons jamais oublier que l'acte éducatif est avant tout un échange, en conséquence de quoi la qualité, l'intensité et la fréquence de la relation humaine est la condition essentielle de notre réussite.

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