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Formats de documents Microsoft Office : mythes et réalités

Formats de documents Microsoft Office : mythes et réalités

Une réponse du berger à la bergère, suite à la tribune de Louis Naugès sur ce même site il y a 15 jours.

PublicitéLe 21 mai dernier, Microsoft, dans la continuité de ses Principes d'Interopérabilité rendus publics en février dernier - organisant notamment l'accès à ses protocoles de communications et interfaces graphiques au bénéfice des développeurs y compris Open Source - a annoncé plusieurs engagements dont les bénéfices sont significatifs, tant pour l'ensemble de la communauté des utilisateurs et des développeurs. Ainsi, avec la sortie de Microsoft Office 2007 Service Pack 2 (SP2) prévue au premier semestre 2009, la liste de formats supportés en standard (déjà une vingtaine) s'allongera pour inclure XML Paper Specification (XPS), Portable Document Format (PDF) 1.5, PDF/A et Open Document Format (ODF) v1.1. Avec le Service Pack 2, les utilisateurs pourront ouvrir, modifier et enregistrer des documents au format ODF, ou encore sauvegarder leurs documents aux formats XPS et PDF sans avoir à ajouter de composants additionnels. ODF pourra aussi devenir le format de fichier par défaut pour Office 2007. De plus, nous avons défini une « feuille de route » pour l'implémentation de la norme internationale ISO/IEC IS 29500 nouvellement ratifiée (Office Open XML). IS 29500, qui a été approuvée par l'ISO (International Organization for Standardization) et l'IEC (International Electrotechnical Commission) en mars dernier, est une norme déjà largement prise en compte dans Office 2007. Nous avons annoncé la complétude de cette intégration dans la prochaine version de Microsoft Office system, nom de code « Office 14 ». Dans la même logique et le souci permanent de répondre au plus près des besoins des utilisateurs et des entreprises, nous allons d'ailleurs continuer de travailler activement dans le cadre des travaux du SC34, la commission de l'ISO responsable de la normalisation d'ODF et d'Open XML, et ce, afin de pleinement contribuer au développement et à l'amélioration de l'interopérabilité entre ces deux formats. Enfin et en pleine cohérence avec nos Principes d'Interopérabilité, nous avons annoncé notre participation au comité technique concerné de l'OASIS (Organization for the Advancement of Structured Information Standards), l'organisme en charge de développer les évolutions du format ODF. Nous participerons également à la maintenance du format PDF à travers notre implication au sein de l'AIIM (Association for Information and Image Management). Si l'on peut en juger par les articles publiés ici ou ailleurs, il semble qu'une certaine confusion règne au sein du microcosme informatique, confusion que les exégètes autoproclamés de notre petit monde semblent s'ingénier à faire perdurer ; c'est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de tenter de clarifier certaines choses. Tout d'abord, pourquoi supporter ODF 1.1 au sein du Service Pack 2 d'Office 2007 ? Tout simplement parce que nos utilisateurs nous l'ont demandé. Cela peut paraître simple, voire simpliste mais c'est la réalité. Ainsi, nous avons créé il y a deux ans presque jour pour jour un conseil exécutif pour l'interopérabilité au sein duquel nous voulions échanger et recueillir l'avis de nos plus grands clients de par le monde ; ceux-ci nous ont répété avec constance que la guerre des formats qui s'annonçait entre Open XML et ODF était inutile et qu'il fallait à tout prix permettre une interopérabilité la plus naturelle possible entre ces formats afin que les utilisateurs puissent ne pas être l'otage d'un format ou d'une application mais qu'ils puissent choisir librement et en conscience le format et l'application en fonction de leurs besoins. Par ailleurs et en toute transparence, il n'est un secret pour personne que la commission européenne nous a demandé de progresser dans le domaine de l'interopérabilité. L'ensemble de ces demandes a conduit Microsoft à l'annonce de ses Principes d'Interopérabilité qui constituent, à n'en pas douter - et je pèse mes mots - le même type de révolution copernicienne qu'a constitué en son temps l'annonce de l'initiative pour l'Informatique de Confiance pour ce qui concerne la sécurité. De même que la sécurité a été placée au centre de la stratégie de Microsoft, l'interopérabilité occupe désormais la même place enviable, ce qui a déjà eu des conséquences très significatives au sein de l'ensemble de nos processus de développement. Nous avons donc choisi d'implémenter ODF 1.1, non seulement à l'aide d'un traducteur implémenté à l'initiative de Microsoft par une communauté Open Source et disponible sur SourceForge (ce traducteur va d'ailleurs évoluer dès cet été avec la sortie de la version 2.0 au profit des anciennes versions d'Office) et qui sera utilisé pour apporter le support du format ODF 1.1 aux anciennes versions d'Office, mais grâce à une nouvelle implémentation native qui sera pleinement supportée par Microsoft à partir du SP2 d'Office 2007. Une autre question que l'on entend aussi au sein du microcosme informatique est celle-ci : « pourquoi diantre attendre 'Office 14' pour supporter la norme IS 29500 ? » Là aussi, tout simplement parce que c'est ce que nous ont demandé nos clients... En effet, nos clients nous ont demandé à de très nombreuses reprises de ne pas implémenter une fonctionnalité majeure dans un Service Pack : si l'on avait implémenté la norme IS 29500 dans le SP2, il aurait fallu que les entreprises utilisant déjà le format ECMA-376 (le format qui a été initialement proposé à la normalisation à l'ISO par l'organisme de standardisation Ecma International au début de l'année 2007 et qui est supporté en standard par Office 2007) se livrent à de nombreux tests de non régression avant l'installation du SP2 afin d'être certains qu'ils ne subiraient pas de problème dans la conversion entre les 2 versions d'Open XML. C'était beaucoup trop risqué pour un Service Pack ; il a donc été décidé de n'implémenter que le support d'ODF (et de PDF et de XPS mais ces fonctionnalités étaient déjà disponibles - il fallait simplement télécharger un add-in supplémentaire, ce qui rendait le déploiement d'Office inutilement complexe) qui est d'un impact limité puisque très peu de clients utilisaient déjà le traducteur Open XML - ODF (celui disponible en téléchargement sur SourceForge) en production et que, de toute façon, nous ne le supportions pas. Autrement dit, là aussi, nous avons écouté nos clients. Tout simplement... Est-ce que cela veut dire que nous ne supporterons jamais le format IS 29500 au sein des anciennes versions d'Office ? Même si rien n'a été annoncé officiellement en ce sens, nous avons apporté le support d'Open XML (la version ECMA-376 qui est supportée nativement par Office 2007) grâce à un pack de compatibilité additionnel pour ces anciennes versions (Office 2000, Office XP, Office 2003) ; rien ne nous interdit d'en faire autant... Mais la question que l'on entend le plus fréquemment est la suivante : « pourquoi donc avoir développé Open XML alors qu'il existait déjà une norme qui s'appelle ODF ? » Cette question s'accompagne souvent de l'affirmation péremptoire suivante : « une norme bureautique suffit largement ! » A cette question, je répondrais volontiers en fournissant la même réponse que celle que j'ai faite plus haut, à savoir : « tout simplement parce que nos clients nous l'ont demandé »... En effet, il semble évident que la préservation du capital informationnel de nos clients contenus dans des milliards de documents de par le monde - objectif qui a été l'un des objectifs essentiels (même si ce n'est pas le seul, loin s'en faut) de la conception d'Open XML - constitue une des demandes essentielles de nos clients, demande qu'il était bien difficile de ne pas satisfaire... Mais cet argument ne me semble pas suffisant ; en effet, il faut y ajouter celui constitué par les fonctionnalités uniques que permet Open XML, fonctionnalités uniques dont l'intérêt n'a pas échappé à certains de nos clients français comme, par exemple, Dassault Aviation ou le CHRU de Grenoble. Parmi ces fonctionnalités, s'il ne fallait en retenir qu'une seule, je citerais volontiers le support des « schémas métiers » ou « schéma personnalisés » Cette notion de schéma métier permet d'inclure des vocabulaires XML spécifiques à un besoin métier donné dans des documents ou des feuilles de calcul afin de faciliter l'intégration des données des entreprises et des administration dans l'environnement de travail quotidien des utilisateurs. Ici, l'approche unique d'Open XML est de permettre ce que l'on pourrait appeler « l'interopérabilité verticale », c'est-à-dire la possibilité d'intégrer d'autres types de systèmes et de données avec des documents Open XML tout en maintenant une séparation nette et simple entre la présentation et les données (les schémas métiers). Grâce à cette notion de schéma métier, Open XML n'est plus un format bureautique mais bien un format centré sur les données métier de l'entreprise. Au-delà de ces quelques considérations - à mon sens absolument fondamentales - sur les schémas métiers et sur la valeur unique qu'ils apportent au format Open XML, qu'il me soit également permis de gloser sur le fait que supporter un seul format, en l'occurrence ODF, serait la solution à tous les maux... En effet, s'il fallait supporter un seul format, la question se poserait de savoir de quelle version on parle... Parle-t-on ici du format ODF 1.0, le seul qui soit officiellement normalisé sous le numéro ISO/IEC IS 26300:2006, du format 1.1 qui a été standardisé officiellement par l'OASIS au début de l'année 2007 en apportant un meilleur support de l'accessibilité des documents ou encore de la version 1.2 qui, selon diverses rumeurs, devrait devenir un standard OASIS à la fin de cette année afin d'être soumis à l'ISO pour constituer une révision de la norme initiale l'année prochaine ? La question est, en effet, d'importance ; en effet, chacune des versions successives de ces différents standards ou normes apporte des nouveautés ou des améliorations significatives par exemple au niveau de l'accessibilité, du support des métadonnées ou des spécifications des formules mathématiques dans les tableurs. Mais hélas, toutes ces nouveautés constituent autant de raisons de créer des problèmes d'incompatibilité entre ces versions... Autrement dit, la complexité qui existe à n'en pas douter entre les différentes versions des formats d'Office : binaires (les anciens fichiers .doc, .xls, .ppt), Open XML tel qu'implémenté au sein d'Office 2007 (le standard ECMA-376) et le format Open XML IS 29500 (normalisé par l'ISO) tel qu'il sera implémenté au sein d' « Office 14 », existe bel et bien aussi au sein des différents formats ODF... On peut vouloir chercher à simplifier le monde pour tenter de le comprendre ; c'est ce que des générations de cartésiens adeptes du réductionnisme ont cherché à faire avec un succès incontestable. Pourtant et Platon, avec son mythe de la caverne, avait déjà envisagé la possibilité que nous ne voyons que l'ombre d'une réalité en fait inconnaissable, le monde dans lequel nous vivons. Le monde informatique, lui aussi, est complexe ; complexe au sens étymologique : « ce qui est tissé ensemble ». Cette complexité du monde informatique et sa diversité est aussi ce qui en fait la richesse. Le fait qu'il existe différents formats pour adresser des besoins différents n'échappe pas à cette règle ; et la seule chose qui compte n'est pas l'unicité des formats mais la capacité pour l'utilisateur de pouvoir échanger librement et simplement des données, des informations, etc. entre différentes applications, différents systèmes, etc. en fonction de ses besoins. C'est pour cela que l'interopérabilité est importante, que celle-ci repose sur des standards, des normes, des coopérations industrielles ou toute autre méthode appropriée. Multiplicité, complexité, diversité ne doivent donc pas être compris et vécus comme des contraintes mais comme le reflet d'un monde qui innove et tente en permanence de créer de la valeur pour les entreprises et pour les utilisateurs. En ce sens, la nouvelle politique d'interopérabilité de Microsoft est cohérente, volontariste et équilibrée, et constitue le fruit d'une attention particulière portée au marché et aux besoins propres à chaque utilisateur. La démarche nouvelle amorcée par les « Principes d'interopérabilité » contribue, à mon sens, à renforcer le pluralisme, l'ouverture, la transparence et l'innovation. « Que serions-nous sans le secours de ce qui n'existe pas ? » nous disait Paul Valéry dans sa célèbre « petite lettre sur les mythes ». Je forme le voeu que ces quelques lignes n'aient pas trop entamé les certitudes des exégètes du microcosme microsoftien... Car il est vrai qu'il est tellement plus simple d'appréhender le monde à travers les certitudes qu'offrent les ensembles disjoints : les bons et les méchants, les logiciels ouverts et les logiciels propriétaires, les logiciels et les services,... qui constituent autant de « prêts à penser ». Hélas pour les prosélytes de la simplicité, notre monde - y compris informatique - est complexe et c'est, à mon sens, ce qui en fait le charme... L'essentiel, c'est que les différentes briques qui le composent soient capables de fonctionner en étant « tissées ensemble » de la manière la plus transparente possible en offrant un « tout plus grand que la somme des parties ». Car, au final, c'est tout ce qui compte pour l'utilisateur.

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