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Diatribe contre les mauvais usages de Powerpoint

Diatribe contre les mauvais usages de Powerpoint

Il est rare qu'un ouvrage sur un logiciel en pointe les mauvais usages. Selon Franck Frommer, Powerpoint est pourtant coupable de bien des dérives dans les organisations.

PublicitéFustiger les mauvais usages d'un logiciel est rarement un sujet d'ouvrage. Franck Frommer n'hésite pas, lui, à publier un ouvrage qui fait déjà beaucoup parler de lui : La pensée Powerpoint : enquête sur ce logiciel qui rend stupide.

Le logiciel de Pré-AO (présentation assistée par ordinateur) de Microsoft en tant que tel n'est pas critiqué ici. Au contraire, l'auteur n'hésite pas à le qualifier d'ingénieux dans son introduction. Powerpoint permet en effet de créer une animation rhétorique appréciable. Mais la pratique actuelle le rend dangereux. Dès l'introduction, l'auteur cite ainsi le général américain James N. Mattis qui affirmait en avril 2010 : « PowerPoint nous rend stupide ». Cette dernière attaque en date n'est pas la première : l'auteur en relève un certain nombre depuis l'orée des années 2000.

Le problème de Powerpoint n'est pas technique : il est managérial, il relève de l'usage.

Prévu pour réaliser des présentations commerciales, synthétiques et vendeuses, PowerPoint est en effet devenu aujourd'hui un outil d'animation de réunions voire de communication de rapports. Cette dérive appauvrit la réflexion par la synthèse et la simplification sous forme de listes, sans liens logiques, sans explications, sans que quiconque remette en cause une jolie présentation pleine de couleurs.

Plus le logiciel se perfectionne en termes d'esthétique des présentations, plus, de ce fait, il est dangereux pour les organisations.

L'ouvrage s'ouvre sur un historique de la présentation en entreprise, sur ses raisons d'être et ses modalités évoluant au fil des années (en commençant par les fameux transparents de rétro-projection). La naissance de Powerpoint, en tant que produit innovant de rupture, et son rachat par Microsoft ne sont pas oubliés.

Ce retour sur l'histoire n'est pas là seulement pour amuser les nostalgiques : il permet d'expliquer pourquoi et comment les méthodes de travail ont été radicalement bouleversées au sein des organisations par l'irruption d'un banal logiciel aux ambitions très limitées. Il est vrai que l'émergence du produit se place dans une histoire plus générale des méthodes de travail et d'organisation. On croise ainsi dans l'ouvrage des gens bien connus : Taylor, Carnegie, Boltanski (l'organisation en mode projet)...

Le coeur de l'ouvrage se constitue de la description de « l'effet powerpoint » qui pourrait être résumé par cet inter-titre particulièrement pertinent : « l'obsession de la puce ». L'auteur en détaille la perversité et les modalités ainsi que, là encore, l'historique, en revenant cette fois aux premiers systèmes d'écritures. Il n'en n'oublie pas le plus récent et fantastique succès : le film « une vérité qui dérange » qui retranscrit une conférence d'Al Gore sur le réchauffement climatique, où PowerPoint joue un rôle central. Enfin, déclenchant la saillie du général James N. Mattis, PowerPoint devient un outil des échecs américains en Irak. On reste pantois devant certains exemples de diapositives...

PublicitéL' « effet Powerpoint » peut aller jusqu'à la manipulation par l'image abusant le participant, devenu l'auditeur voire simple spectateur. Par l'effet magique audiovisuel, PowerPoint introduit dans les réunions ce que les scénaristes de cinéma appellent la suspension d'incrédulité.

Enquête à charge, La pensée Powerpoint : enquête sur ce logiciel qui rend stupide doit être lu par tout manager. D'autant qu'il se lit facilement, presque comme un roman à suspens où la fatalité surgit à chaque page sous les traits d'un logiciel démoniaque car tentateur.

Mais ce livre a la faiblesse classique de ce genre d'ouvrages, ne répondant jamais véritablement à la question : "et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?"
Certes, il pourrait être simples, comme certaines entreprises citées par Franck Frommer, d'interdire PowerPoint durant les réunions. Ce serait un retour en arrière peu pertinent et, indubitablement, peu durable tant le besoin de présentation existe.

Une fois la charge donnée et l'ennemi acculé, il reste encore à construire la paix. Pour cela, il y a d'autres excellents ouvrages sur la bonne manière d'user de la Pré-AO, malheureusement pas assez lus.

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