Comment Clear Channel a transformé son modèle économique grâce au numérique


Data Asset : maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise
La maîtrise de la donnée pour générer un maximum de valeur métier : cet enjeu est aujourd'hui essentiel, fondamental, stratégique. Et le DSI se doit de fournir les outils adaptés pour atteindre cet objectif. Les entreprises les plus performantes atteignent même une activité reposant et pilotée par...
DécouvrirValérie Brébant, DSI de Clear Channel France, a témoigné de l'importance des données dans la révolution numérique de son entreprise lors de la Matinée Stratégique CIO Data Asset : Maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise du 14 avril 2016.
PublicitéGroupe américain présent dans 28 pays avec environ 3 milliards de dollars de chiffre d'affaires, Clear Channel est le deuxième acteur mondial de la publicité dite extérieure, autrement dit l'affichage, derrière le Français JCDecaux. Sa DSI, Valérie Brébant, était le grand témoin de la Matinée Stratégique CIO Data Asset : Maîtriser et valoriser le patrimoine de données de l'entreprise du 14 avril 2016.
Si le métier d'afficheur est ancien, il a connu des évolutions importantes. L'affichage « extérieur » comprend ainsi de la publicité « intérieure » dans les centres commerciaux, les gares ou les aéroports. Et le supports ont aussi connu leur évolution, de l'affiche papier classique au totem numérique (écran éventuellement interactif) en passant par les panneaux déroulants (papier également).
Après divers rachats (Dauphin Affichage...), la filiale française de Clear Channel est la première business unit hors Etats-Unis de Clear Channel. Ses 1000 collaborateurs réalisent un chiffre d'affaire d'environ 250 millions d'euros. 120 000 faces sont proposées par l'entreprise sur le territoire national, essentiellement des panneaux classiques en extérieur mais Clear Channel a remporté deux grands appels d'offres en 2011 et a déployé à cette occasion un millier de faces numériques, des totems, dans les principaux centres commerciaux. L'une des différences majeures entre l'affichage classique et l'affichage numérique est le renouvellement du message diffusé : sept jours pour le papier en général contre une diffusion à la seconde (sur le mode de la télévision) en numérique.
Comprendre l'audience
L'un des enjeux majeurs, dans la publicité, est de maîtriser l'audience. Si la position d'un panneau publicitaire est normalement connue, encore faut-il savoir qui est susceptible de le voir et donc d'être soumis au message publicitaire de l'affiche qu'il comporte. « Dans notre secteur, un organisme indépendant et transverse -équivalent au Médiamétrie de la télévision- nommé Affimétrie nous donne des audiences pour chaque emplacement » a indiqué Valérie Brébant, DSI de Clear Channel France. En fonction de la population, de l'habitat, etc. autour de chaque emplacement, la face est pré-qualifiée en terme de ciblage. En fonction de chaque cible touchée par tel ou tel panneau, ceux-ci sont intégrés dans des « réseaux » regroupant une série de panneaux atteignant telle cible.
Avec les totems numériques, bien entendu, le mode classique était toujours possible. Mais, bien entendu, Clear Channel a choisi d'utiliser les bénéfices propres à ce nouveau support. « Les contraintes d'exploitation ne sont pas les mêmes puisque les faces sont administrables en ligne et nous avons pu amorcer notre virage dans l'usage des données avec ces totems » a expliqué Valérie Brébant. L'enjeu reste de toucher le plus précisément possible la cible visée par chaque annonceur. Et les données disponibles et exploitables sont bien plus nombreuses.
Valérie Brébant a indiqué : « on peut mesurer plus précisément le passage devant le panneau et mieux cibler en termes socio-comportementaux. » Chaque panneau peut ainsi être qualifié du point de vue de l'audience brute mais aussi en fonction de données tierces, comme la proximité géographique d'une enseigne. « Désormais, on peut ainsi définir plus exactement une audience comme les femmes de moins de 40 ans ou les jeunes hommes actifs pour chaque panneau » a observé Valérie Brébant. De plus, heure et temps de diffusion peuvent être gérés plus précisément sans la contrainte logistique de devoir aller poser une affiche et laisser la colle sécher avant de la remplacer.
PublicitéAccroître la rentabilité publicitaire grâce aux données
Il est également plus aisé de faire un lien direct entre un affichage à un endroit donné à un moment donné et la progression du chiffre d'affaires dans les enseignes à proximité peu après. La précision du ROI n'a donc plus rien à voir avec les anciennes études a posteriori d'impact de campagne. Et il est aussi possible de piloter en temps réel l'affichage. Valérie Brébant a expliqué : « nous pouvons adapter l'affichage en fonction de données chaudes, éventuellement tierces, par exemple privilégier une campagne pour des glaces si la température monte au delà d'un certain niveau et la supprimer si la météo est moins clément. » Sans qu'il soit nécessaire de prévoir le temps plusieurs semaines à l'avance. Et la publicité peut varier selon l'heure, comme l'a noté la DSI : « dans un centre commercial, un fast-food peut demander une publicité pour un hamburger le midi et pour un sundae à seize heures ».
Outre l'intégration des données tierces, la révolution numérique a donc aussi transformé le modèle économique de l'affichage extérieur. Si, en affichage classique, on reste globalement sur une vente de réseaux de faces, en affichage numérique sur totems, la vente se fait en temps de diffusion ciblés. « Et le réseau d'affichage est construit dynamiquement, selon la demande précise du client, et non plus par réseaux de milliers de faces insécables » a relevé Valérie Brébant.
Une activité rendue plus complexe par les données
Cibler plus exactement, gérer précisément les retours... Mais les données sont-elles délivrées brutes aux annonceurs ou bien seulement au travers de rapports ? « Cela dépend des contrats, de leurs besoins tels que nous les avons compris en amont, sans oublier que nous nous appuyons sur les instituts d'études qui restent nos partenaires réguliers » a répondu la DSI. Mais les annonceurs sont de plus en plus friands de données, à commencer par les temps effectifs de diffusion des publicités. Les offres classiques, par « réseaux », restent disponibles même pour les totems numériques mais, désormais, plus aucun annonceur n'y a recours sur les supports digitaux.
L'approche commerciale entre les réseaux classiques et les totems numériques est donc radicalement différente. Comme l'arrivée des totems numériques était liée, au départ, à deux appels d'offres remportés pour un millier de faces, l'adaptation de l'équipe commerciale avait été contournée. Valérie Brébant s'est souvenue : « à l'époque, nous étions partis en mode start-up, avec une petite équipe pour définir comment définir et vendre l'offre mais aussi, côté DSI, comment construire un outil de media-planning totalement innovant qui n'a rien à voir avec l'équivalent pour l'affichage traditionnel. » L'équipe dédiée est donc née avec le digital et Clear Channel cherche à étendre à toute l'entreprise cette culture spécifique.
Du digital au papier
En effet, l'objectif de Clear Channel est d'étendre ce qui a été fait sur les totems numériques à l'affichage traditionnel. « Nous n'avons pas les mêmes possibilités techniques en termes de dynamisme d'affichage avec du timing de diffusion à la seconde » a concédé la DSI. Mais elle a aussitôt complété : « l'idée est bien de passer des traditionnels réseaux figés à des offres beaucoup plus dynamiques grâce à une méthode de qualification des audiences des panneaux. » Aujourd'hui, près de 4000 indices sont désormais disponibles sur les panneaux de Clear Channel. « On peut ainsi dire si tel panneau ciblera les possesseurs de Mercedes, les voyageurs fréquents, les amateurs de tel produit, etc. » a expliqué Valérie Brébant.
Même sur les panneaux papier, l'annonceur peut donc acheter x faces correspondant à une cible socio-comportementale et plus des réseaux figés comme jadis. Du coup, les faces ne sont plus vendus en masse mais de manière plus précise. « La donnée permet donc de mieux valoriser notre patrimoine de panneaux » a relevé la DSI. Pour elle, « nous ne sommes pas dans une data décisionnelle, d'indicateurs, mais dans une data dynamique, core business. » Pertinence et disponibilité sont les seuls critères du média-planning et à chaque nouvelle vente les cartes de répartition des réseaux sont rebattues. Le cas échéant, des ré-allocations dynamiques peuvent avoir lieu au fil des ventes successives.
La conduite du changement n'est pas terminée
Grâce aux données, Clear Channel s'est donc doublement transformé : d'une part vente de minutes au lieu de faces sur les totems numériques, d'autre part vente dynamique multicritère de supports ciblés précisément au lieu de réseaux figés en amonts.
Mais tout n'est pas achevé. Les outils sont toujours en cours de mise au point. Sur les panneaux numériques, l'intégration de la donnée chaude (météo par exemple) reste perfectible. Et puis la conduite du changement, y compris l'évangélisation du marché, se poursuit. Il restera encore à trancher le rôle de chacun dans la culture data dans l'entreprise, la DSI ayant reconnu : « la culture de la data est venue par les équipes digitales mais la réflexion doit être transverse, certainement pas seulement un silo métier ou IT. »
Article rédigé par

Bertrand Lemaire, Rédacteur en chef de CIO
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