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Edito - Le cloud, ou le retour au bon vieux temps

Edito - Le cloud, ou le retour au bon vieux temps
Bertrand Lemaire est rédacteur en chef de CIO.

Les métriques de facturation du cloud amènent à se poser bien des questions qui nous ramènent quarante ans en arrière.

PublicitéBon, je n'étais pas né (c'est ce que j'essaye de faire croire aux jeunes femmes autour de moi) mais la plupart des lecteurs, ici, écraseront peut-être une petite larme émue et nostalgique à la lecture des lignes qui suivent. Vous vous souvenez en effet tous de ces engins sans disque dur, avec un ou parfois deux lecteurs de disquettes souples 5,25 pouces. Et, quand on était très riche, 32 ko de mémoire vive. Plus souvent 16. Voire 8 ou même 1 ko. « Qui pourrait bien avoir besoin de plus de 640 ko de mémoire ? » avait même proclamé Bill Gates, limitant ainsi la mémoire adressable dans le DOS avant de créer des rustines comme le Himem.sys à appeler dans le Config.sys. Oui, je sais, les petits jeunes ne savent pas qu'on peut parler en ko. En dessous du Go, c'est Terra Incognita.
Ecrire des programmes supposait de jongler avec ces quelques octets disponibles. On se souvient de scènes horribles, stressantes, dans le film Apollo XIII qui font penser à ces moments là. On croyait ces moments là derrière nous, les âges sombres de l'informatique. Stocker des Po, traiter des données avec des Gigamips sur de multiples coeurs fonctionnant avec une débauche de hertz... C'est normal. L'informatique était entrée dans l'âge de la consommation effrénée de ressources. Qui s'occupait d'optimiser sérieusement quoi que ce soit ? Un problème se résout toujours en ajoutant un peu de mémoire ou quelques coeurs.

Un éternel recommencement

« Allo, Houston, nous avons un problème » est pourtant de nouveau d'actualité. Car l'histoire est un éternel recommencement. Votre fusée et votre capsule Apollo XIII traversent une couche nuageuse que l'on appelle « Le Cloud ». C'est formidable, le cloud, quand on y pense. Des milliards de Po disponibles. Des Mips à l'infini et à la demande. It's raining Mips, alleluia !. Oui, mais ce n'est pas gratuit. Et c'est là que le bât blesse. Le stockage reste relativement bon marché, même si les petits ruisseaux finissent par faire de très grandes rivières de factures. Il n'en est pas du tout de même de la puissance de calcul ou du transfert de données ou de mille autres métriques dont le coût est parfois négligé. A tort.
Il se trouve que, au fil d'interviews, plusieurs DSI de très grands comptes m'ont fait une réflexion presque toujours similaire ces derniers temps, sans concertation entre eux. Je synthétise ici le propos, chacun ayant ses propres visions sur des détails.

Un besoin de FinOps

La cloudification du SI amène un bouleversement des architectures IT à cause des modèles économiques des prestataires de cloud et de la micro-facturation à l'acte. Si le stockage est peu coûteux, le calcul ou les échanges de données peuvent, à la longue, être ruineux. Il faut donc optimiser l'architecture IT pour minimiser le recours aux ressources coûteuses. Cette optimisation suppose le recours à un spécialiste qui soit capable de travailler au niveau de l'architecture mais aussi de comprendre les contrats et d'optimiser l'architecture en fonction des contrats (non-négociables mais variables dans le temps) et de leurs évolutions.
Un de ces interviewés a appelé ce nouveau métier le « FinOps » (Financier des opérations). Son travail serait donc de suivre les contrats de cloud (et leurs évolutions) et d'optimiser l'architecture IT en conséquence. Ensuite, il lui faudrait suivre les facturations pour vérifier qu'il n'y a pas eu de bourde ruineuse commise ou d'erreur de facturation quelque part. Je précise qu'un tel profil à cinq pattes est très rare donc très cher. Appel à candidatures dans tout le CAC 40.

PublicitéUn outil en attente

Alors, bien sûr, le travail semble nécessiter de traiter des données assez complexes mais, finalement, avec des objectifs simples. Voilà un profil de problème idéal pour une intelligence artificielle dont les algorithmes sauraient sans doute se dépêtrer des règles étranges et venues d'ailleurs tandis que, épuisés, les DSI cherchaient un raccourci que jamais ils ne trouvèrent vers l'efficience IT (et pourtant, le chemin leur est montré).
Si l'optimisation des choix de fournisseurs en fonction d'une architecture existante pourrait en effet relever d'une telle intelligence artificielle, j'ai des doutes quand il s'agit d'optimiser l'architecture. L'architecte « FinOps » aurait cependant besoin, sans doute, de ce qu'un autre a appelé un « Google Maps du Cloud ». En gros, il s'agirait de savoir en permanence quel est le coût et la performance (à la manière du trafic sur Google Maps) de chaque transfert de données entre clouds, ainsi que le coût et les disponibilités sur chaque espace de stockage ou chaque unité de traitement disponibles (à la manière des villes, villages et points de curiosité sur la carte).
Pour l'heure, le « FinOps » restera sans doute très humain encore quelques temps. Et il devra adopter une attitude d'un autre temps : optimiser les ressources.

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